Le programme se veut «ludique et innovant». Décliné en 3 volets, il propose : un apport théorique d' initiation à la recherche, une évaluation via un escape game sur mesure (cf notre encadré plus bas) et une mise en pratique à travers la réalisation de posters au format scientifique. Alors que la disparité d’enseignement dans les IFSI et le fossé entre les apports théoriques et la pratique limitent l'accès des étudiants à la recherche, deux infirmiers, Flavie Barret et Garry Laudren, ont pris le problème à bras le corps avec ce programme «déjà commandé par plusieurs IFSI d’Ile-de-France pour cette rentrée 2025», assure le communiqué.
« Aujourd’hui, beaucoup d’établissements de santé souhaitent que les professionnels soignants fassent de la recherche, sauf qu’ils ne sont pas correctement formés à ce sujet. Dans les IFSI, l’enseignement en la matière reste très scolaire et théorique alors que les compétences demandées par la suite sont très hautes. Cela crée un déséquilibre important et les étudiants n’osent pas se lancer. Il y a un vrai manque d’universitarisation de la formation infirmière », analyse le binôme d’infirmiers.
Les étudiants doivent se sentir accompagnés dans leurs projets de recherche
Dans la majorité des IFSI, même si les cours sont souvent relus par des universitaires, peu d’entre eux viennent réellement dispenser des enseignements aux étudiants. Sur les 700 000 infirmiers en France, seuls 20 sont maîtres de conférences en sciences infirmières, ce qui explique «la disparité de l’enseignement en matière de recherche en soins infirmiers ». Afin de dispenser un enseignement théorique concret et ancré dans la pratique, Flavie Barret et Garry Laudren interviennent accompagnés de deux professionnelles spécialisées dans la recherche : Mathilde Labro, méthodologiste biostatisticienne et de Nathalie Marchand, Infirmière de recherche clinique.
« La recherche en soins infirmiers comporte un biais pour de nombreux étudiants : ils croient qu’ils mènent leur projet seuls, et qu’ils ne disposent d’aucune aide extérieure pour les seconder. Nous voulons leur montrer que c’est faux ! Il y a une équipe qui est là pour les accompagner de l’idéation à la publication de leurs résultats en passant par toutes les démarches règlementaires, la mise en œuvre de l’étude et l’analyse statistique. Ceci dans le but de les soulager et de les sécuriser face à ces parties très techniques qui peuvent faire peur. », explique Garry Laudren.
Apprendre en jouant grâce à l'élaboration d'un escape game
« L’objectif était de donner un côté très ludique à notre escape game, et identifier un fil conducteur pour que les énigmes s’enchaînent bien. Nous voulions stimuler les étudiants en leur proposant quelque chose de "gamifié" (ludique) sur des questions concrètes et surtout qui leur seront utiles pour comprendre un article scientifique », détaille Flavie Barret.
Pour l'aspect pratique, l’équipe de l’Hôpital Foch s’est interrogée : quelles sont les attentes minimales pour un infirmier en matière de recherche ? Comment homogénéiser le niveau des étudiants qui sortent d’un cursus infirmier par rapport aux étudiants qui sortent d’une licence en sciences humaines ? Des enjeux auxquels les 4 professionnels ont répondu grâce à l’élaboration d’un escape game. Le dispositif «novateur» permet, d'après ses auteurs, «d’évaluer les étudiants sous forme de jeu avec des énigmes et des défis, et une série d’énigmes reprenant une partie des grandes thématiques abordées durant l’enseignement théorique : comment identifier un auteur, comprendre la structure d’un article scientifique, manipuler les chiffres et comprendre les schémas élémentaires de la présentation des données statistiques».
L’escape game se déroule dans une salle de cours fermée, en groupe de 10 étudiants de deuxième année. Ils ont une heure pour déchiffrer six énigmes, élaborées par des spécialistes de la recherche. Présenté sous format papier, les énigmes sont réparties dans 6 enveloppes, chacune permettant de déverrouiller des cadenas qui ouvrent l'accès à des données probantes. La session est suivie par une session questions / réponses, sur scène, autour d’un article scientifique publié. L’occasion pour les étudiants de mobiliser à nouveau leurs connaissances et de revenir sur les difficultés qu’ils ont pu rencontrer. L’année dernière, ce sont près de 120 étudiants de deuxième année qui ont suivi cet escape game.
Posters de recherche
Le dernier volet de l’enseignement s’appuie sur les travaux des étudiants effectués dans le cadre de leur service sanitaire. D’une durée de 6 semaines, il a pour objectif d’initier les étudiants en santé à la prévention et à la promotion de la santé, en les amenant à travailler sur des thèmes prioritaires de santé publique. Les étudiants collaborent avec diverses structures (crèches, service de police…) pour répondre à une problématique donnée – par exemple, la problématique de la nutrition en crèche municipale. Leur mission consiste à évaluer cette problématique et à y répondre par des actions de prévention.
Chaque groupe d’étudiant réalise alors un travail de synthèse sous forme de poster scientifique, présentant leur service-sanitaire : problématique rencontrée, action(s) menée(s), résultat(s) obtenu(s), avant d'en faire une présentation par groupe.
Ce nouveau format d’enseignement, qui a fait ses preuves lors de l’année scolaire 2023-2024, est amené à être reconduit lors de la rentrée 2024-2025 auprès des étudiants de deuxième année, précise encore le communiqué. Le binôme d’infirmiers de l’Hôpital Foch a déjà été sollicité par deux autres IFSI pour venir dispenser son enseignement.
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