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Rapport de l’IGAS sur le LMD infirmier : le mépris ?

Publié le 14/10/2008
actualité santé

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L’inscription dans le cursus LMD (Licence-Master-Doctorat) des études infirmières est une revendication largement partagée non seulement dans la profession infirmière, mais aussi par les masseurs-kinésithérapeutes et les sages-femmes. Cette demande s’appuie sur les accords dits de Bologne (2002) qui visent à harmoniser les formations universitaires dans l’ensemble de l’Union européenne.

Dans une lettre de mission datée de septembre 2007, les ministres de la santé, de l’enseignement supérieur et du budget et le secrétaire d’Etat chargé de la fonction publique chargeaient l’IGAS (Inspection générale des affaires sociales) d’en examiner la pertinence, les modalités éventuelles et les conséquences si cette réforme était appliquée à ces professions ainsi qu’à un certain nombre de professions paramédicales. Le texte soulignait que les enjeux portaient notamment sur l’attractivité de ces professions (en particulier infirmières), sur la nécessité de maintenir un enseignement plus orienté sur la pratique que sur la théorie, sur la compatibilité de celui-ci avec les exigences universitaires et sur son coût.

Avec plusieurs mois de retard, la mission IGAS a rendu sa copie mi-septembre. Dès sa publication, début octobre, elle a suscité des réactions hostiles de la part de certaines organisations infirmières (Fédération nationale des infirmiers, Syndicat National des Infirmier(e)s Conseiller(e)s de Santé, Syndicat national des professionnels infirmiers) et de la fédération des masseurs-kinésithérapeutes, alors que les organisations de sages-femmes sont plutôt satisfaites des propositions de la mission, qui préconisent l’entrée de leur formation initiale dans le cursus LMD.

Les protestataires infirmiers contestent essentiellement deux recommandations : la licence octroyée aux infirmières serait une licence professionnelle ; le passage des infirmières de la fonction publique en catégorie A serait soumis à condition : seules les infirmières diplômées depuis 1995 y auraient droit (du fait de la plus longue durée de leurs études à partir de cette date). Pour les organisations protestataires, cette restriction dénie aux autres professionnelles des compétences qu’elles détiennent aussi bien que leurs collègues, grâce à leur expérience.

Le premier argument avancé contre la licence professionnelle est que son obtention ne demande que deux semestres de cours en fac, contre six pour une licence « normale », après passage dans une école professionnelle (les actuels IFSI). De plus, elle faciliterait l’obtention du diplôme d’infirmière par le dispositif de la VAE (validation des acquis de l’expérience, qui permettrait à certaines aides-soignantes de devenir infirmières), très contesté dans le milieu infirmier à cause de son risque de dévalorisation du diplôme. Ensuite, elle serait un obstacle à la création d’une véritable filière licence-master-doctorat. La mission souligne en effet que le master ne pourrait actuellement être attribué qu’à trois spécialisations (IBODE, IADE, cadres de santé). Quant au doctorat, l’absence de recherche en soins infirmiers rendrait son attribution presque impossible.

Enfin, et peut-être surtout, la recommandation d’une licence professionnelle est considérée comme étant une marque de mépris à l’égard de la profession : les protestataires soulignent que pour la mission IGAS, une licence normale courrait le risque d’être « trop abstraite », trop théorique pour une profession essentiellement « opérationnelle », et d’être tenue pour une licence « au rabais » par les autres universitaires. Ils font remarquer que c’est pourtant comme cela que sont formés les médecins : par une alternance de stages et de cours.

En définitive, la mission refuserait à la profession de pouvoir se constituer en véritable discipline autonome : elle ne serait qu’une profession d’exécution. Il faut d’ailleurs noter, ce que curieusement ne font pas les organisations protestatrices, qu’elle ne fait aucune référence à l’Ordre infirmier, pourtant chargé de veiller aux bonnes pratiques et donc de les définir, ni au groupe de travail, conséquent (80 membres), mis en place par la DHOS et chargé de l’élaboration des référentiels de pratique. Il s’agit bien là pourtant de la construction de cette discipline infirmière, sans pour autant préjuger de sa nature, en particulier de sa plus ou moins grande proximité avec la médecine. Le Conseil régional de l’Ordre de Paris a d’ailleurs réagi contre les propositions de l’IGAS, mais en des termes identiques à ceux du FNI …

Départager sur le fond entre les rédacteurs de l’IGAS et les organisations protestatrices n’est pas l’objet de cet article. Il faut en effet garder à l’esprit que, contrairement à ce qui est parfois avancé, un rapport de l’IGAS n’engage que ses rédacteurs et certainement pas le Gouvernement ; pour ce dernier, il est un document d’études devant servir à alimenter un débat. A priori, les décisions ne sont donc pas prises.

Interrogée, la ministre de la santé a effectivement déclaré la discussion ouverte. Les organisations protestatrices ont cependant des doutes sur ce point : les jeux seraient déjà faits. Elles font remarquer que les récentes propositions de modification du décret dit de compétences (décret d’actes infirmiers) et l’intention prêtée au Gouvernement de diminuer le nombre d’heures de formation initiale des infirmières vont bien dans le sens d’une dévalorisation de la profession. Les protestataires infirmiers et masseurs-kinésithérapeutes ajoutent que la mission IGAS est loin d’avoir auditionné l’ensemble des représentants des professions concernées. La consultation de la liste des personnalités entendues tend à leur donner raison sur ce point.

Cependant, les déclarations des organisations protestataires contrastent singulièrement avec le silence de la grande majorité des autres organisations.

Pour finir, il faut remarquer, avec la mission, que les deux recommandations sont autonomes l’une par rapport à l’autre : dans la Fonction publique, le niveau de rémunération ne dépend pas directement du niveau de diplôme. Mais il est évidemment difficile de les déconnecter totalement l’une de l’autre.


Serge Cannasse
infirmiers.com
sergecannasse@carnetsdesante.fr



- Communiqué du Syndicat infirmier : Reconnaissance universitaire : une licence professionnelle pour les IDE ?

- Communiqué du FNI

- Communiqué de presse de l’Ordre des masseurs kinésithérapeutes

Sur Infirmiers.com :

- LMD : réactions des organisations infirmières

- Remise du rapport sur le LMD

- Entretien avec la conseillère pédagogique régionale en soins

- Un nouveau programme de formation pour les infirmiers de demain

- LMD et soins infirmiers (2006)

-LMD : Roselyne Bachelot répond aux étudiants infirmiers


Source : infirmiers.com