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Handicap : l'accessibilité pour les patients est une priorité

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Publié le 07/02/2024

La prise en charge et l'accompagnement des personnes en situation de handicap est un sujet important et récurrent pour les soignants. L'Ordre infirmier a fait de cette question le sujet central de sa dernière "matinale". Au  cœur des débats :  les problèmes d'accessibilité, aux bâtiments, aux soins mais aussi à l'école, à la formation ou à l'emploi de ces patients.

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Se mettre dans la peau d'une personne en situation de handicap n'est pas toujours un réflexe lorsqu'on cherche un cabinet médical. Et pourtant. La question de l'accessibilité est centrale pour ces personnes, que ce soit au niveau du bâti, qu'au niveau de l'accès à des services, à l'école, à des soins de santé etc. Et à l'inverse, l'inaccessibilité, ne serait-ce que physique... s'avère dissuasive. 

Près de 310 000 personnes sont accompagnées dans des établissements et des services médico-sociaux dédiés aux adultes handicapés et 170 000 enfants et adolescents.

Le nombre de personnes en situation de handicap en France oscille entre 2,6 millions à 5,6 millions (selon les critères retenus pour repérer statistiquement ces dernières) des personnes dépendantes ou non, qui vivent en logement ordinaire ou non, a rappelé Patrick Chamboredon en introduction des débats, face à plusieurs personnalités invitées pour l'occasion. Les chiffres, en réalité, varient encore plus que cela : en 2019, 7 millions de personnes de 15 ans ou plus déclaraient avoir au moins une limitation sévère dans une fonction physique, sensorielle ou cognitive et 4,9 millions être fortement restreintes dans des activités habituelles, en raison d’un problème de santé. Le président de l'Ordre national des infirmiers a également égrené d'autres chiffres : près de 310 000 personnes sont accompagnées dans des établissements et des services médico-sociaux dédiés aux adultes handicapés et 170 000 enfants et adolescents. 400 000 élèves en situation de handicap étaient par ailleurs scolarisés dans le premier et le second degrés, en 2022. 

Parfois, face à des situations, on se sent démuni. C'est la formation qui permet aux personnes de monter en compétences, de prendre de l'assurance et ainsi de répondre aux attentes.

Accompagner les infirmiers dans leur parcours de formation 

Comment faire mieux pour favoriser cette société inclusive ? Il faut d'abord faire en sorte que la formation qui soit dispensée aux professionnels de santé soit à la hauteur des attentes des personnes en situation de handicap, notamment en cas de soins complexes. Certaines personnes lourdement handicapées sont ainsi discriminées : se voyant par exemple refuser un rendez-vous à cause des soins qui peuvent faire peur aux professionnels de santé, note ainsi Fadila Khattabi, désormais ex-ministre déléguée auprès du ministre des Solidarités et des Familles, chargée des Personnes handicapées. Les professionnels, médecins, infirmiers, «ont donc besoin d'être formés, d'être sensibilisés sur ce sujet, parce que parfois, face à des situations, on se sent démuni. C'est la formation qui permet aux personnes de monter en compétences, de prendre de l'assurance et ainsi de répondre aux attentes», a-t-elle souligné. 

Fadila Khattabi rapporte aussi les propos de femmes handicapées qui vivent comme une «humiliation» de ne pouvoir avoir accès à une table gynécologique ou à un cabinet gynécologique parce que les lieux ne sont pas adaptés. C'est également le cas de certains cabinets, qui ne sont pas accessibles. «C'est évidemment très discriminant», a-t-elle martelé, rappelant qu'améliorer l'accessibilité des personnes handicapées, c'est aussi améliorer l'accessibilité des personnes âgées. 

Il nous faut faire preuve de fermeté quant à l'accès aux soins, aux bâtiments, à l'école inclusive, à la formation, à l'emploi... qui doit être une réalité, partout. 

Éviter la double peine 

Les enfants en situation de handicap ont deux fois plus de chances d'être harcelés dans les écoles, selon Fadila Khattabi, qui appelle les infirmières scolaires «à redoubler de vigilance», pour faire en sorte «que les enfants soient bien accueillis», mais aussi «pour sensibiliser les autres élèves», faisant toutefois l'impasse sur le manque de moyens humains que dénoncent ces professionnelles de santé, parfois chargées de plusieurs centaines d'enfants sur différents établissements. «Les femmes qui sont en établissements ont aussi deux à trois fois plus de chances de subir des violences sexuelles. Là aussi les infirmières, les infirmiers qui interviennent dans ces établissements, doivent faire preuve de vigilance, y compris auprès des personnes qui ne parlent pas, d'une surveillance accrue», a affirmé Fadila Khattabi. 

Le déploiement des CPTS améliore le quotidien des patients 

Les infirmiers constituent 28% des professionnels engagés dans Les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), a rappelé David Guillet, président de la fédération des communautés territoriales des professionnels de santé. Celles-ci regroupent les professionnels d'un même territoire qui souhaitent s'organiser – à leur initiative – autour d'un projet de santé pour répondre à des problématiques communes. Alors que le déploiement des CPTS s'est largement accéléré ces dernières années, les améliorations concrètes pour les patients sont déjà palpables : cette nouvelle organisation permet de répondre à des enjeux de coordination (avec des possibilités de mutualisation sur les territoires), de formations (engagées au niveau des CPTS sur la prise en charge des personnes en situation de handicap), et même des formations pluriprofessionnelles (en présence d'aidants) ou encore la sensibilisation des étudiants des IFSI par des acteurs des CPTS. 

Un outil pour identifier les cabinets accessibles

«50% des personnes en situation de handicap considèrent que leur état de santé est mauvais, aujourd'hui en France», selon Cécile Cordonnier, membre d'APF France Handicap, une association de représentation et de défense des droits des personnes en situation de handicap. «66% d'entre elles rencontrent des difficultés à accéder à des soins». L'association a donc créé un outil pour aider toutes les personnes souffrant d'un handicap à identifier des cabinets accessibles, améliorer leur information et ainsi faciliter leur parcours. Le projet pilote a été expérimenté dans la région Pays de la Loire et en Ile-de-France, avant d'être nationalisé. Ce questionnaire adressé aux professionnels de santé permet de mieux connaître l'accessibilité de leurs cabinets. «L'objectif est donc très concret avec ce portail national, qui peut aussi permettre aux infirmiers de repérer des professionnels de santé accessibles vers lesquels orienter leurs patients», note Cécile Cordonnier, en charge du projet Annuaire de l'accessibilité des cabinets médicaux et paramédicaux chez APF France Handicap. 

Vers une « accessibilité universelle »

«On parle d'accessibilité universelle pour désigner tout le parcours d'accessibilité, mais aussi de l'accessibilité du matériel, des formations, des outils, ou encore des initiatives concrètes (raccourcir les temps d'attente pour les personnes qui souffrent d'un trouble du spectre autistique...)», a-t-elle expliqué, rappelant que l'accessibilité revêt ainsi plusieurs formes et que toutes doivent être prises en compte et améliorées. 

Pour l'heure, 3 800 professionnels de santé se sont déjà enregistrés et ont publié ces informations sur sante.fr, dont 700 infirmiers. «On invite toutes les personnes à s'enregistrer pour établir une cartographie des ces cabinets mais aussi pour que chacun puisse se rendre compte des questions que se posent les personnes en situation de handicap avant de se rendre dans un cabinet». 

Mutualisation et transversalité des prises en charge 

Pascal Jacob, président de l'association Handidactique, et auteur de la charte Romain Jacob, lui même touché par la question (ses deux fils, dont l'un est décédé, sont handicapés), a par ailleurs salué le travail des infirmiers, mais également invité les professionnels à casser les silos dans lesquels ils sont souvent coincés dans leur exercice. «L'infirmier, l'infirmière fait le lien entre les différents spécialistes, restaure le dialogue entre les professionnels», a-t-il souligné. 

La CPTS était justement «l'échelon manquant» jusque-là dans les prises en charge, selon David Guillet. «L'hôpital ne savait jamais trop à qui s'adresser. Aujourd'hui, la mutualisation et la transversalité dans les prises en charge permet aussi aux CPTS d'avoir un dialogue de pair à pair avec l'hôpital». Autre avantage : les CPTS ont également une force de mobilisation intéressante car elles peuvent faire entrer l'aidant ou le proche du patient, dans le parcours de soin. La Fédération Nationale des CPTS est signataire de la charte Romain-Jacob, qui comprend 12 recommandations pour un meilleur accès aux soins des personnes vivant avec un handicap. «Pour nous, l'objectif de cet engagement était d'envoyer un signal fort : il y aura un avant et un après au niveau des refus de prise en charge».

Pour en savoir plus : 

L'association Handidactique : https://www.handidactique.org/

APF France Handicap : https://www.apf-francehandicap.org/

Annuaire de l’accessibilité des cabinets médicaux et paramédicaux : https://www.sante.fr/carte-thematique...

Fédération des communautés territoriales des professionnels de santé : https://www.fcpts.org/


Source : infirmiers.com