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L'éthique clinique fait ses premiers pas dans les hôpitaux français

Publié le 10/04/2003

"Centre d'éthique clinique : pour apporter une aide en cas de décision médicale éthiquement difficile", dit l'affiche apposée dans la salle d'attente du centre ouvert depuis quelques mois. D'ordinaire, l'éthique médicale fait l'objet de colloques de philosophes ou de débats au sein de comités spécialisés. Pour la première fois, de collective l'éthique devient une affaire personnelle.

Peut-on et doit-on arrêter les traitements chez votre père atteint d'un cancer en fin de vie ? Quand faut-il passer des soins curatifs aux soins palliatifs ? Faut-il poursuivre la réanimation de votre bébé prématuré malgré les risques élevés de handicap à terme ? Que faire dans le cas d'un malade inconscient proche de vous pour qui des décisions thérapeutiques décisives mais risquées sont à prendre ? Autant de questions personnelles sur lesquelles il vous faut réfléchir et apporter une réponse sans que vous sachiez à qui vous adresser.

C'est précisément à ce besoin que le centre d'éthique médicale entend répondre en proposant une consultation. Les patients eux-mêmes tout comme les proches sont concernés. Mais la consultation est ouverte également aux équipes soignantes qui sont en proie aux mêmes doutes et interrogations.

"Attention, précise à Reuters Santé, le Dr Véronique Fournier, responsable du centre, il ne s'agit en aucun cas de rendre un avis médical". Les experts consultés émettent des recommandations qui sont purement consultatives. La décision reste toujours de la responsabilité du médecin en charge du patient.

Mais ce type de consultation s'avère utile car elle permet de "dépassionner" la décision, de réfléchir dans le "calme" et prendre en compte toutes les dimensions de la personne concernée : médicale, mais aussi socio-familiale, professionnelle, religieuse et culturelle. Elle a l'avantage d'associer des psychologues, des philosophes, des sociologues, des juristes, des théologiens.

Prudente, la responsable du centre affiche de suite le cadre d'un tel exercice médical peu ordinaire. "Le centre d'éthique n'est pas un lieu d'enregistrement et de traitement des plaintes, un lieu de résolution des conflits, un lieu d'information et d'orientation des patients, un lieu de réflexion sur les grandes questions d'éthique médicale".

CONFLITS DE VALEURS

Le centre peut être contacté par téléphone (tel 01.58.41.22.33) ou par fax (01.58.41.22.32). Un ou deux experts se proposent de rencontrer les différentes personnes concernées : la personne malade, ses proches, les médecins, les autres membres de l'équipe soignante. "L'objet est de mettre à plat la question posée, son contexte, et les arguments des uns et des autres", explique le Dr Véronique Fournier.

Conflits de valeurs liés à la procréation médicalement assistée, au choix de stratégies thérapeutiques, à la réanimation néonatale, aux soins aux personnes handicapées, forment les motifs de saisines les plus courants à l'heure où les droits des patients tentent de s'imposer dans notre système de santé.

Ainsi l'éthique clinique entre dans la pratique quotidienne alors que le comité consultatif national d'éthique, créé en 1984, est, comme son nom l'indique, une structure nationale dont la mission consiste à élaborer des avis d'intérêt général.

Cependant, écrit Véronique Fournier, "les liens de complémentarité" entre ces deux démarches sont évidents. "L'éthique clinique, dans l'élaboration de ses recommandations quotidiennes, au chevet des malades, s'inspirera des avis du Comité consultatif national d'éthique. A l'inverse, elle pourra être conduite à faire part à ce dernier de ses observations quant aux pratiques médicales quotidiennes, donc à l'informer, voire à le questionner, si elle éprouve le besoin d'un cadre de référence théorique sur un sujet ou sur un autre qui lui sont soumis".

Pionnière en ce domaine en France, le Dr Véronique Fournier s'inspire d'un centre d'éthique clinique américain, le "Mac Lean Center" de Chicago fondé en 1984 tout en reconnaissant que le contexte culturel est très différent de part et d'autre de l'Atlantique. L'avenir dira si une éthique clinique française peut s'ancrer dans la pratique quotidienne.

Mais, les observateurs attentifs ont déjà noté, l'intérêt d'une telle démarche à la lecture d'une tribune libre publiée dans le quotidien "le Monde", signée par Véronique Fournier et le chef de service de réanimation de l'hôpital de Valenciennes (Nord) qui a été confronté au cas d'une patiente Témoin de Jéhovah qui avait refusé d'être transfusée en appelant à la décision des juges.

"Notre voeu le plus cher serait que la Justice ne tranche pas, qu'elle ne condamne ni l'une ni l'autre des issues", concluaient les deux signataires qui visiblement témoignaient d'une réflexion féconde menée en commun, pesant les arguments des médecins et ceux de la patiente./yg


Source : infirmiers.com