Fin 2021, la France disposait de 7 546 lits hospitaliers en soins palliatifs, selon un rapport publié au printemps par la mission d'évaluation de l'Assemblée nationale sur les droits des malades en fin de vie. Sur ces lits, 1 980 se trouvaient dans une des 171 unités spécialisées en soins palliatifs. Le reste, soit 5 566 lits, étaient répartis dans 904 établissements de soins. On comptait également 420 équipes mobiles de soins palliatifs (EMSP), capables d'intervenir au domicile des patients.
Le nombre de lits a augmenté ces dernières années, sous l'effet des différents plans annoncés par les gouvernements successifs. Sur la période 2017-2021, le nombre de lits en unités spécialisées a augmenté de 11,5% (+200), et celui de lits en établissements de soins a augmenté de 7,2% (+372).
Une offre pourtant toujours insuffisante
Si l'offre a augmenté, tous les problèmes ne sont pas pour autant résolus. «Pour de nombreuses personnes auditionnées, deux tiers des malades nécessitant des soins palliatifs n'y ont pas accès», rappelait en mars une mission d'information de l'Assemblée nationale. Dans la présentation du cinquième «plan soins palliatifs» 2021-2024, le gouvernement estime qu'environ trois cinquièmes des patients décédés d'un cancer ont bénéficié de soins palliatifs, contre moins d'un quart pour les victimes d'AVC ou de sclérose en plaques. Sur la question, le consensus serait général. «Sur les soins palliatifs, tout le monde est d'accord pour dire qu'il faut avancer», a ainsi souligné début juin la ministre déléguée Agnès Firmin-Le Bodo, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.
Tous les départements français, sauf Mayotte, ont des lits spécialisés en soins palliatifs. Mais une vingtaine d'entre eux ont moins de 9,4 lits pour 100 000 habitants
Inégalités géographiques
L'un des problèmes rencontrés est celui de l'accès à ces soins spécifiques, notamment parce que la répartition des lits de soins palliatifs et des équipes est loin d'être uniforme sur le territoire. Tous les départements français, sauf Mayotte, ont des lits spécialisés en soins palliatifs. Mais une vingtaine d'entre eux ont moins de 9,4 lits pour 100 000 habitants : les départements d'Outre-mer, trois départements de la région parisienne (Yvelines, Seine-Saint-Denis et Seine-et-Marne), les Ardennes, une série de départements de l'Est de la France (de la Haute-Saône à la Drôme), auxquels il faut ajouter Var, Tarn-et-Garonne, Haute-Garonne et Landes.
Par ailleurs, 21 départements - pas forcément les mêmes - n'ont toujours pas d'unité spécialisée en soins palliatifs. Mme Firmin-Le Bodo a promis mi-juin une révision «imminente» de la circulaire organisant le secteur, notamment pour remédier à «l'hétérogénéité de l'offre selon les régions».
Financement inadapté
Pour Olivier Falorni, le député (MoDem) qui a présidé les travaux de la mission parlementaire, la tarification à l'acte en vigueur dans les hôpitaux n'est pas non plus adaptée aux soins palliatifs, qui nécessitent un accompagnement sur la durée plus que des actes ponctuels. «Pire, celle-ci peut favoriser des pratiques conduisant à de l'obstination déraisonnable» dans des services classiques de l'hôpital, alors même que les soins palliatifs pourraient apporter une meilleure réponse aux besoins des malades, écrivait-il dans le rapport publié fin mars.
Certains spécialistes dénoncent également une tendance de certains hôpitaux à rediriger vers d'autres soins des fonds destinés en principe aux soins palliatifs. «La France n'a pas réussi à ce que la totalité des départements soient couverts en unités de soins palliatifs, parce que, parfois, certains hôpitaux, alors qu'ils en avaient les moyens, ont fait un autre choix», avait de son côté indiqué Mme Firmin-Le Bodo le 7 juin devant la commission des Affaires sociales du Sénat. Selon la mission parlementaire, il manque par ailleurs plus de 100 médecins dans les structures de soins palliatifs existantes, la filière souffrant d'un manque général d'attractivité pour les personnels soignants.
Fin de vie : premières pierres pour la construction de la loi
«D'ici la fin de l'été», le gouvernement doit dévoiler son projet de loi pour créer une «aide active à mourir» en France, dont les premières esquisses sont scrutées à la fois par les défenseurs d'une légalisation de l'assistance au suicide, voire de l'euthanasie, et par les opposants. Ce texte doit tenir compte des conclusions de la convention citoyenne, qui s'est prononcée en début d'année pour la légalisation sous conditions d'une «aide active à mourir», regroupant potentiellement l'assistance au suicide et/ou l'euthanasie. Le président de la République a aussi parlé d'un «modèle français», avec plusieurs garde-fous. Le projet de loi «comprendra trois blocs : aide active à mourir, soins palliatifs et droits des patients», a annoncé le 21 mai Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l'Organisation territoriale et des Professions de santé, qui pilote le dossier au sein du gouvernement. Sur le volet le plus sensible et clivant, «l'aide active à mourir», l'exécutif avance sur une ligne de crête. La définition ne doit pas comporter les termes 'suicide' ou 'euthanasie', mais en revanche utiliser le terme 'mourir', note son document, sans trancher sur le scénario final. Conditions pour bénéficier de «cette aide active à mourir» : être majeur lors de la demande, «justifiée par un motif d'ordre médical», atteint d'une «affection grave et incurable qui engage son pronostic vital» à moyen terme, «capable de discernement pour exercer un choix autonome». L'appréciation du discernement et du «moyen terme» -estimé entre 6 et 12 mois dans le texte- figurent dans les questions délicates. Le texte divise, tant au sein de la société civile que parmi les politiques.
Les soignants sous tension
En première ligne, les soignants qui exercent en soins palliatifs répètent que «donner la mort n'est pas un soin». «Le débat semble parfois se réduire à un choix entre euthanasie et suicide assisté», a regretté la présidente de la Société française de soins palliatifs (Sfap), Claire Fourcade, lors du récent congrès de l'organisation. Les réticences et inquiétudes se cristallisent chez nombre de soignants autour de leur rôle, «malgré la promesse d'une clause de conscience». Après la trame dévoilée à des parlementaires, 15 organisations de soignants ont signifié par écrit leurs lignes rouges à Agnès Firmin Le Bodo -qui les réunit régulièrement dans un groupe de travail. Ils souhaitent notamment que l'aide active à mourir figure «dans le code pénal, pas dans celui de la santé publique, comme une exception à l'interdit de tuer», et résulte d'«une décision collégiale et a priori» des médecins, a exposé Claire Fourcade.
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