C’est l’une des craintes qui agitent les instances internationales infirmières : face à une pénurie mondiale annoncée de ces professionnels et au vieillissement de la population qui frappe les pays les plus développés, les pays pauvres ou en voie de développement risquent de voir leurs effectifs infirmiers se réduire au profit de ces derniers. Lors d’une intervention auprès de la BBC, Howard Catton, le directeur général du Conseil international des infirmières (CII), a refait part de cette préoccupation, dénonçant les « effets négatifs du recrutement international des infirmières dans des pays plus riches ». Il y relayait notamment les inquiétudes des associations d’infirmiers africaines, explique ainsi le CII dans un communiqué.
Pour s’être entretenu avec des « infirmières dirigeantes d’Afrique », il a relevé que des pays à « hauts revenus semblent utiliser leur puissance économique pour recruter de précieuses ressources infirmières. » De quoi susciter ds craintes autour d'une « nouvelle forme de colonialisme ». Or, parallèlement, les pays africains ne reçoivent pas de compensation équitable pour la perte de ces professionnels, qu’ils ont formés. « Cela a un effet négatif sur leur capacité à fournir des soins de santé à leur propre population, ce qui nuit également au développement à long terme de ces pays et aggrave les inégalités », s’est-il agacé. Pourtant, souligne le CII, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) elle-même décourage le recrutement de professionnels dans les pays les plus vulnérables, via son code de pratique mondial pour le recrutement. « Le code stipule qu’il doit y avoir un bénéfice mutuel et une proportionnalité en termes de ce qui est donné en retour lorsque des infirmières sont recrutées. Nous ne voyons pas de compensation qui reconnaisse la valeur réelle de ce qui est perdu et c’est ce qui explique une grande partie de la colère et du sentiment d’inégalité exprimés par ces infirmières dirigeantes », a pointé Howard Catton. Aussi brandit-il la nécessité d'indemniser les pays dans lesquels sont recrutés ces infirmiers à hauteur de l'investissement consentis lors de leur formation.
Des mesures à prendre pour éviter la fuite des infirmiers
La question de ces inégalités est d’autant plus prégnante que, parallèlement, certains de ces pays sources sont confrontés à un problème de chômage croissant des infirmiers. En cause, des plafonds et des limites imposés par leurs gouvernements à l’embauche de ces professionnels. « Nous ne disposons pas de données exactes, mais on nous a dit qu’il pourrait s’agir de 10 à 20 % des infirmières dans certains endroits », a-t-il déclaré, appelant ces pays à prendre des mesures pour éviter la fuite de leurs infirmiers vers les pays plus riches en assumant « la responsabilité du financement des postes d’infirmières, de l’amélioration des conditions des salaires et des conditions de travail ».
Ce n’est pas la première fois que le CII soulève cette problématique ; en janvier 2023 déjà, il avait exprimé son « indignation » devant le recrutement qu’il jugeait massif de professionnels africains par les pays plus riches.
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