Si psychiatrie et pédiatrie souffrent massivement d’un manque chronique et structurel de moyens humains et financiers qui met en danger les patients, la pédopsychiatrie fait face à une situation d’autant plus critique. La crise sanitaire, qui a certes permis de mettre en lumière le problème, l’a surtout aggravé en provoquant un mal-être croissant chez les plus jeunes, dans un contexte d’essoufflement global du système de santé. Résultat, la Cour des comptes juge l’offre en pédopsychiatrie « mal adaptée », les parcours « peu lisibles » et la gouvernance, quoi que volontaire, « peu efficiente ».
Une offre inadaptée aux besoins
Le nombre de lits dédiés dans les hôpitaux a ainsi chuté de 60% en 30 ans et ne sont plus que 2 200 aujourd’hui ; le nombre de médecins, lui, a fondu d’un tiers en 10 ans (- 34% entre 2010 et 2022) pour atteindre péniblement les 2 000. Des effectifs bien faibles pour prendre en charge les « 1,6 million d’enfants et adolescents » qui souffrent d’un trouble psychique, selon les estimations de la Cour des comptes. Seuls « entre 750.000 et 850.000 » enfants par an, « bénéficient de soins prodigués en pédopsychiatrie », la plupart du temps dans des centres médico-psychologiques (CMP) « submergés par les demandes », pointe-t-elle. Or « une partie des patients suivis ne souffrent que de troubles légers, au détriment de la prise en charge d’enfants souffrant de troubles plus sévères. » Et si la France se situe « dans la moyenne des pays européens » en termes d’offre de soins, elle se caractérise par « de fortes inégalités territoriales ».
Des financements à mieux répartir
Pourtant le secteur ne manque pas d’argent : plus de 3 milliards d’euros lui sont consacrés par an. Le problème, estime la Cour des comptes, vient surtout de son utilisation, qui pourrait être améliorée. « L’indispensable revitalisation » de la pédopsychiatrie « est une priorité de santé publique », souligne-t-elle.
Aussi, pour soulager les CMP et afin qu’ils puissent « se consacrer au suivi des troubles modérés à sévères », elle recommande de s’appuyer sur les psychologues libéraux (25 000 à l’heure actuelle), qui ont « vocation à prendre progressivement une place dans le parcours de soin. » Elle propose également de créer des « maisons de l’enfance et de l’adolescence » qui assureraient « un accueil de première ligne » et rempliraient les missions d’évaluation et d’orientation aujourd’hui dévolues aux CMP, qui y consacrent près de « 50% de leur travail ». Quant aux hôpitaux, qui accueillent les cas les plus graves, le rapport préconise un « renforcement du nombre de lits de pédopsychiatrie », mais « en nombre limité » et « par redéploiement de lits adultes ». Enfin, elle demande au ministère de la Santé de fixer des « objectifs nationaux de santé mentale infanto-juvénile » ainsi qu’un calendrier précis et des indicateurs pour évaluer les politiques menées, ou encore la création au sein du projet territorial de santé mentale d’un volet dédié à la pédopsychiatrie.
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