«Nous constatons toujours des atteintes aux droits des résidents en Ephad (...). La réponse des pouvoirs publics n’est pas à la hauteur des atteintes dénoncées, ni de l’urgence», regrette Claire Hédon dans un entretien au JDD. La Défenseure des droits présente lundi 16 janvier un rapport de suivi de 64 recommandations émises en mai 2021 pendant la crise du Covid.
Le document de mai 2021 et le livre de Victor Castanet «Les Fossoyeurs» -- dont une version actualisée est attendue pour fin janvier-- «ont permis une prise de conscience, pas simplement des pouvoirs publics, mais de l'ensemble de la société», s'est réjouie Claire Hédon. Mais beaucoup reste à faire. Elle cite «une hausse des signalements» auprès de l'organisme Défenseur des droits, qui avait instruit quelque 900 réclamations durant les six ans précédant le rapport de 2021, et 181 en seulement 18 mois. Il s'agit de «maltraitance» (43% des cas), «limitation de visites» (30%), de «restrictions à la liberté d'aller et venir» (12%). Ces manquements concernent aussi bien le privé que le public. Or «dix-huit mois après le premier rapport, le bilan s'avère extrêmement préoccupant: 9% de nos préconisations se sont traduites par une action, 55% ont fait l'objet d’annonces mais peinent à se matérialiser, et 36% restent sans réponse», déplore Claire Hédon.
Au moins huit soignants et animateurs pour dix résidents
Sa principale recommandation : fixer «un ratio minimal d'encadrement», comprenant «au moins huit soignants et animateurs pour dix résidents en Ehpad». «En France, le rapport est de 6 pour 10, là où les pays du nord sont à 10». Et «si vous rétablissez un taux d'encadrement normal, les aides-soignants reviendront y travailler», avance-t-elle. Selon le rapport présenté, «certains soins», comme la toilette, sont «organisés dans une logique comptable pour réduire les effectifs du personnel». Il évoque les résidents d'un Ehpad qui avaient «au mieux une douche tous les quinze jours» et restaient pour certains «la plupart du temps en blouse d’hôpital ou en pyjama». Pour pallier le manque de personnel, l'établissement imposait aussi «deux jours d'alitement par semaine par résident».
Mettre un terme aux violations de liberté
Autre point noir, les confinements intempestifs dans des établissements suite à quelques contaminations au Covid. La Défenseure des droits demande de «mettre un terme aux violations de la liberté d'aller et venir» et de «rétablir le droit au maintien des liens familiaux des résidents en Ehpad» (cette question constitue 46% des réclamations reçues). Elle cite des «cas d'isolement arbitraire de résident dans leur chambre» ou de «restrictions de visites», détaille des exemples de «prohibition de la présence d’un proche lors des repas; obligation de maintenir les portes des chambres ouvertes afin de vérifier le respect du maintien d’une distance entre les personnes; interdiction de contact physique, comme prendre la main».
Encourager les signalements et renforcer les inspections
Le rapport relève aussi les faiblesses de la lutte contre les maltraitances, notamment l'absence d'«outil de mesure fiable et partagé par ensemble des autorités de contrôle». Il demande un «dispositif de vigilance médico-sociale pour renforcer l’identification, le signalement et l'analyse des situations de maltraitances». Le gouvernement a lancé en septembre trois missions administratives pour élaborer des pistes pour mieux repérer, quantifier et prévenir les maltraitances contre les personnes âgées ou handicapées et les enfants. Saluant le décision du gouvernement d'inspecter la totalité des 7 500 Ehpads dans le sillage du scandale Orpea, elle note toutefois «l'insuffisance de moyens humains» pour effectuer «les inspections requises». Par ailleurs, la publication de 10 indicateurs clés sur chaque établissement pour aider les familles à faire leur choix, annoncée en mars 2022 par le gouvernement, se fait encore attendre.
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