Le 15 mars à Fos-sur-Mer puis le 18 mars à Perpignan, des infirmières exerçant à domicile ont subi des violences de la part de familles de patients. Dans les deux cas, les infirmières traumatisées se sont rendues au commissariat pour porter plainte… mais n’ont pas pu le faire : elles en ont été dissuadées par les autorités qui ont préféré enregistrer, à la place, un dépôt de main courante. Ce qui implique qu’aucune enquête ni poursuites ne seront déclenchées contre les agresseurs malgré la gravité des faits
… Le syndicat national des infirmiers libéraux (Sniil), par la voix de sa présidente Catherine Kirnidis, exprime sa colère.
Jeudi dernier, à Fos-sur-Mer, une infirmière exerçant à domicile et l'étudiante en soins infirmiers qui l'accompagne s’occupent d’une patiente en soins palliatifs dont l'état s'est fortement dégradé. Elle décède au décours du soin. La famille, avertie de l’issue probable, les injurie, les menaçe de mort, les brutalise et, même, les séquestre. Les infirmières ne peuvent sortir de cette situation que grâce à l’intervention de la police municipale prévenue par le médecin traitant contacté « en douce » par l’infirmière.
Que des soignants soient mis en danger dans le cadre de leur travail, c'est inacceptable et intolérable
Comme l'explique Catherine Kirnidis, présidente du Syndicat national des infirmiers libéraux (Sniil) dans son communiqué, particulièrement touchées, les deux soignantes sont alors prises en charge à l’hôpital où elles se voient attribuées chacune une incapacité temporaire de travail (ITT) de 10 jours. Pour autant, malgré la gravité des faits, les fonctionnaires de police minimisent les événements, affirmant qu’il n’est pas nécessaire de porter plainte. Encore fragilisées, les infirmières cèdent, ne procédant alors qu’à un simple dépôt de main courante
. Et Catherine Kirnidis de poursuivre et de s'insurger : deux jours plus tard, le 18 mars au matin, même réaction des autorités policières, cette fois à Perpignan. Une infirmière libérale s’est, en effet, vu refuser un dépôt de plainte contre le mari d’une patiente qui venait de l’agresser verbalement et de la menacer violemment
. Les fonctionnaires de police, arguant qu’ « il n’y avait pas eu de coups », et se déclarant débordés, ont, là aussi, d'après le Sniil, minimisé les faits et conseillé à l’infirmière de revenir le lendemain pour un simple dépôt de main courante... malgré le fait qu’un autre patient de l’infirmière habite le même immeuble, que cela l’oblige donc à revenir sur les lieux matin et soir tous les jours, et que l’agresseur a promis qu’il « ne s’arrêterait pas là »
.
La jeune étudiante en soins infirmiers l'a confié à infirmiers.com, malgré les soins psychologiques qui nous attendent et le temps qui nous fera passer à autre chose, je peux vous assurer que pour rien au monde, je ne changerais de profession. Je compte bien obtenir mon diplôme dans 4 mois. Cet événement me rendra sans doute plus forte
. C'est vraiment ce que nous lui souhaitons.
Le Sniil soutient les victimes et s’insurge contre l’attitude des autorités policières
Parce que les situations de violence
sont trop fréquentes dans le secteur des soins de ville et trop souvent banalisées, le Sniil tient, d’abord, à apporter tout son soutien aux infirmières victimes de ces violences
. Le syndicat dénonce également avec la plus grande fermeté l’attitude des autorités policières qui, dans les deux cas, a consisté à minimiser les faits et à dissuader de porter plainte
. Une agression dans le cadre de son activité professionnelle est toujours un fait grave et, à ce titre, rappelle le Sniil, elles doivent avoir les mêmes droits à l’empathie des fonctionnaires de police que tout policier, enseignant ou médecin agressés eux aussi dans l’exercice de leur profession
. Et d'exiger que les ministères concernés (Santé, Intérieur, Justice)
agissent au plus vite pour que ce type d’ « accueil » réservé aux infirmières libérales ne se reproduise plus.
Rappelons que les infirmières et infirmiers libéraux sont les seuls professionnels de santé exerçant à 90% à domicile, dans tous les quartiers, à toute heure et pour tous types de patients. Ils se trouvent déjà en première ligne d’une violence au quotidien en augmentation
, il ne faudrait pas que s’y rajoute une violence institutionnelle toute aussi inacceptable
, s'insurge Catherine Kirnidis.
Malgré les soins psychologiques qui nous attendent et le temps qui nous fera passer à autre chose, je peux vous assurer que pour rien au monde, je ne changerai de profession. Je compte bien obtenir mon diplôme dans 4 mois. Cet événement me rendra sans doute plus forte.
Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern
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