Les personnes atteintes d’un cancer du poumon localisé peuvent tirer avantage d’une immunothérapie avant leur opération. C’est ce que révèle une étude présentée par Gustave Roussy au congrès de l’ESMO 2020. Dépourvue d’effets secondaires notables, une injection d’anticorps a permis de détruire la moitié des cellules tumorales chez 41% des patients suivis.
Les cancers bronchiques non à petites cellules représentent 85% des cancers pulmonaires. Le facteur principal déterminant le traitement à suivre est avant tout la localisation de la tumeur (plus que sa taille) ainsi que la présence ou non de métastase. Chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie… plusieurs options thérapeutiques sont envisageables. L’usage d’anticorps monoclonaux ou immunothérapie est également une alternative qui a déjà fait ses preuves. Dans certains cas, elle a amélioré considérablement la survie de patients atteints de formes métastatiques.
Vers un nouvel usage de l’immunothérapie ?
Si, dans le cadre de tumeur localisée, le traitement de référence reste la chirurgie, là aussi, l’immunothérapie pourrait avoir un intérêt. En effet, une équipe de chercheurs de Gustave Roussy a tenté de savoir si recourir à des anticorps monoclonaux avant une opération pouvait s’avérer ou non bénéfique pour les patients. « L’idée est de faire comprendre au système immunitaire, lorsque la tumeur est encore en place, comment s’en défendre et permettre ainsi d’éviter la récidive, dans le cas où il resterait quelques cellules tumorales après l’intervention », explique le Pr Benjamin Besse, chef du département de médecine oncologique, spécialiste des cancers thoraciques, principal auteur de l’étude sur le sujet. Le chercheur a présenté récemment les résultats de ses travaux oralement lors du congrès de la Société Européenne d'Oncologie Médicale (ESMO) qui s’est tenu virtuellement cette année au vu des circonstances. Ceux-ci se sont avérés plus qu’encourageants car, non seulement ils montrent qu’injecter un anticorps monoclonal ne présente pas de risque pour le patient mais, de plus, ce protocole agit sur la tumeur.
Un pourcentage important de cellules tumorales détruites en une seule injection
Plus précisément, l’étude comportait 30 patients d’un âge médian de 64 ans, tous atteints de cancer du poumon localisé. L’ensemble des participants a reçu une injection d’anticorps 3 à 4 semaines avant la date prévue de l’intervention. Le premier objectif des scientifiques était d’évaluer la non-dangerosité de ce traitement qui peut être une prise de risque
. Nous devions nous assurer que cette immunothérapie ne provoque pas de perte de chance : qu’elle ne fasse pas progresser la tumeur, qu’elle n’induise pas un décalage de l’opération de plus de 15 jours
, précise le Pr Besse. Il était aussi primordial d’éviter toutes complications potentielles lors de la chirurgie ou des effets secondaires graves.
Au final, les données sont claires : elles ne révèlent aucun effet délétère important chez les patients dans les deux mois qui suivent l’injection. En parallèle, tous ont été opérés dans un délai inférieur à un mois après l’immunothérapie. Les complications post-opératoires constatées chez 23% des participants demeuraient peu sévères.
Mais, le fait le plus marquant a été observé suite à l’analyse des tumeurs extraites. On a eu la bonne surprise de découvrir que 50% des cellules tumorales avaient été détruites par le système immunitaire chez 41% des patients
, s’enthousiasme le spécialiste. Mieux encore, chez 14% d’entre eux, c’est 90% des cellules cancéreuses qui ont été supprimées, et cela en un laps de temps très court. On pensait que l’immunothérapie nécessitait du temps pour agir, or ces effets ont été extrêmement rapides
. Compte tenu de ces résultats très prometteurs le protocole de l’étude a été modifiée et inclura à présent un groupe contrôle composé également d’une trentaine de personnes qui seront opérées d’emblée à titre de comparaison.
Roxane Curtet Journaliste infirmiers.com roxane.curtet@infirmiers.com @roxane0706
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