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Travail en 12h : 85 % des agents satisfaits du dispositif

Publié le 07/10/2014
équipe de soignants service hopital

équipe de soignants service hopital

Plus de huit agents hospitaliers sur 10 (85%) ayant des horaires en 12 heures sont satisfaits de ce dispositif, mais 69% des représentants du personnel y sont défavorables, selon une étude de l'Association pour le développement des ressources humaines dans les établissements sanitaires et sociaux (Adrhess), présentée le 1er octobre 2014 lors des Rencontres RH de la santé.

Les agents hospitaliers sont globalement satisfaits du travail en 12h.

Les Rencontres RH de la santé étaient organisées par la Fédération hospitalière de France (FHF), l'Adrhess et le ministère de la santé, à Montrouge les 30 septembre et 1er octobre 2014.

Le travail en 12 heures est un enjeu économique, social et sociétal pour les hôpitaux, a estimé Jean-Marie Barbot, le président de l'Adrhess, en ouverture d'un atelier consacré à la controverse sans fin des horaires en 12h. Il a rappelé que cette organisation du travail, présente depuis longtemps dans les services de réanimation, s'étend progressivement dans les autres secteurs de l'hôpital, mais que très peu d'études ont été menées sur le sujet. Une enquête menée en 2013 dans 49 établissements franciliens avait montré que 37 d'entre eux avaient au moins un service concerné par le travail en 12h, a-t-il rappelé.

Afin d'avoir un panorama plus large de cette problématique, l'Adhress a interrogé entre juin et août les directeurs des ressources humaines (DRH) sur leur perception des horaires en 12h dans les services hospitaliers. Un échantillon de 600 établissements a été sollicité par courrier électronique. Parmi eux, 136 établissements de toute taille, dont huit CHU et 45 CH de plus de 70 millions d'euros de budget, ont participé à l'étude. Une organisation en 12h a été mise en place dans 71% des établissements répondants. L'intégralité des CHU répondants et la quasi-totalité (98%) des CH de plus de 70 millions de budget ont mis une telle organisation en place. Un résultat assez important et étonnant, a commenté Matthieu Girier, chargé de communication de l'Adrhess et DRH aux CH de Lens et Hénin-Beaumont. La situation est plus contrastée parmi les établissements de moins de 70 millions d'euros de budget, tous statuts confondus, a-t-il poursuivi. Plus de 75% des établissements dont le budget est compris entre 20 millions et 70 millions d'euros ont des services en 12h, contre 36% des établissements de moins de 20 millions d'euros de budget et 32% des CHS.

Une organisation en 12h a été mise en place dans 71% des établissements répondants.

Un établissement sur deux (51%) compte moins de 10% des personnels non médicaux travaillant en 12h, essentiellement les services de sécurité, les unités de soins continus et de soins intensifs, qui sont les plus représentés. 8% déclarent plus de 50% de leur effectif en horaires en 12h.

La motivation des équipes demeure le premier motif de mise en oeuvre d'une telle organisation et seuls six établissements sur 136 l'ont mise en place sur la seule initiative de la direction, relève l'étude.

Ces projets ont majoritairement (69%) reçu un accueil défavorable des représentants du personnel (37% défavorables, 32% plutôt défavorables). A l'inverse, les DRH se sont majoritairement montrés favorables (14% favorables, 40% plutôt favorables). Les DRH des établissements connaissant déjà une organisation en 12h sont les plus favorables, avec un taux d'approbation de 69,15%.

Plus de 76% des établissements ayant mis en place cette organisation ont entrepris d'évaluer le dispositif, indique l'enquête. Ces études ont permis de révéler la satisfaction des personnels (85%) et le très faible nombre d'équipes ayant souhaité revenir à un fonctionnement plus classique en trois équipes (4%).

Une manière de « compenser » le stress du travail

Le travail en 12h est particulièrement apprécié du personnel car il permet de mieux accepter le stress et l'insatisfaction du travail, a expliqué Fanny Vincent, doctorante en sociologie à l'université Paris-Dauphine. Elle prépare une thèse sur le travail en 12h et a passé six mois au sein de différents services ayant mis en place ces horaires. Le nombre de jours de repos occasionnés par cette organisation donne aux agents l'impression de ne pas être tout le temps à l'hôpital, a-t-elle observé. Dans un monde hospitalier où les horaires décalés sont fréquents, cela leur permet aussi de retrouver enfin une vie sociale. Par ailleurs, quitte à ce que leur journée soit 'gâchée' par leur service, ils préfèrent travailler 12h et ensuite avoir des jours de repos, a-t-elle déclaré. Jours de repos qui leur permettent en plus de revenir plus facilement à l'hôpital en cas de besoin.

Véronique Rivat-Caclard, coordonnateur général des soins au centre hospitalier public (CHP) du Cotentin, a relevé d'autres avantages au travail en 12h. La demande des agents est un élément moteur, a-t-elle indiqué, car cette organisation leur permet de mieux concilier leur vie personnelle et professionnelle. Cette organisation permet aussi une meilleure adéquation avec la présence médicale et une meilleure autonomie dans la répartition de la charge de travail des agents. Par exemple, les agents travaillant le matin ne sont pas sous pression pour finir toutes les toilettes avant 13h, a-t-elle dit.

Le travail en 12h est particulièrement apprécié du personnel car il permet de mieux accepter le stress et l'insatisfaction du travail

Droit de réponse de Fanny Vincent

Je souhaiterais intervenir pour resituer le contexte de cet article et rétablir la vérité quant aux propos déformés qui me sont attribués et qui donnent lieu à des interprétations erronées.

Tout d'abord j'ai été sollicité par Jean-Marie Barbot, président de l'AdRHess pour intervenir lors des rencontres RH de la santé (puisque c'est de là que part l'article) à un titre universitaire, pour apporter, en toute modestie, un regard "extérieur" et neutre sur les 12h, mon travail étant un travail de doctorat, qui n'a pas vocation à faire des recommandations sur les 12h et encore moins à en faire l'apologie comme on a l'air de m'en accuser.

Mon propos lors de la table-ronde sur "la controverse sans fin des horaires en 12h" portait essentiellement sur les usages et les appropriations que les soignants désireux ou satisfaits de leur travail en 12h en avait, principalement du point de vue de l'équilibre entre le travail et le hors travail. Les questions qui cadraient mon intervention étaient les suivantes : Comment expliquer le développement d’horaires en 12h dans les services des hôpitaux publics ? Dans quelle mesure le contexte de travail fournit-il des clés d’explication au 12 heures ? Dans quelle mesure les métamorphoses sociales du rapport au temps et du rapport au travail nous permettent-elles d’appréhender le 12 heures comme un phénomène dérogatoire certes, mais en voie de normalisation dans un certain nombre de services hospitaliers ?  Mon propos se basait donc sur une perspective à la fois compréhensive (comprendre les motivations des soignants) et critique (quels effets cela produit-il ? - encore une fois en termes de "conciliation" vie professionnelle/vie privée puisque c'était ici mon propos).

J'ai dans un premier temps expliqué que le contexte de travail à l'hôpital était aujourd'hui tendu (du fait d'un certain nombre de réformes et de bouleversements organisationnels affectant l'hôpital parmi lesquels la doctrine managériale qui s'impose à l'hôpital aujourd'hui, et l'insuffisance du nombre de postes créés au titre des 35h notamment) et que les soignant-e-s en pâtissaient dans leur travail (travail dans lequel certain-e-s ne se reconnaissent plus, travail intense pour lequel ils/elles disent n'avoir plus le temps, fatigue, manque de reconnaissance, etc.). J'ai ensuite dit : "Alors quitte à ce que le travail ne soit pas reconnu et quitte à ce que la journée de travail, en 8h ou en 12h soit « gâchée » dans tous les cas par la fatigue que le travail provoque, ou « gâchée » par les rythmes atypiques attachés à ces métiers hospitaliers (on est décalé par rapport au reste de la population me disent certains soignants ; en effet les horaires qui s'imposent aux soignant-e-s de l'hôpital ne sont pas ceux de la société), autant rester 12h. C’est l’idée de concentrer le temps du travail qui s’est imposée ; quitte à venir travailler, autant venir pour 12h, pour de bon, et ne pas avoir à multiplier les jours au travail qui donnent l’impression d’ « être tout le temps à l’hôpital »".

Je conviens que le terme "gâché", que j'ai mis entre guillemets n'est pas très heureux, mais je n'ai pour l'instant pas trouvé d'autre terme transcrivant mieux cette idée.

Puis, j'ai ensuite dit, "les jours de repos supplémentaires dégagés avec les 12h peuvent sembler faciliter l’acceptation du temps occupé par le travail. Ce temps « de repos » gagné agit alors comme une compensation de la fatigue et de l’insatisfaction que peut dégager le travail, ainsi que du temps que l’on y passe. Il faut ainsi lire les 12h comme une solution que les soignants en 12h ont l’impression d’avoir trouvée pour maitriser le temps du travail." J'ai encore dit bien d'autres choses mais ce serait ici trop long de tout retranscrire. Je reste à la disposition de ceux/celles qui le souhaitent pour échanger à ce sujet.

Fanny Vincent 
fanny.vincent0@gmail.com

Les transmissions sont un point de vigilance

Le point faible du travail en 12h est le temps et le mode de transmission, a averti Véronique Rivat-Caclard. Cette nouvelle organisation diminue le nombre de transmissions, mais diminue aussi le temps qui leur est accordé. L'outil informatique peut venir en soutien, a-t-elle indiqué. Il ne remplace pas les transmissions, mais permet d'avoir des données recueillies au fil de l'eau, voire des synthèses. Ces documents sont des guides qui permettent de gagner du temps à la transmission, a-t-elle souligné. La transmission écrite doit être privilégiée, ont aussi rapporté des DRH présents dans la salle.

Véronique Rivat-Caclard a aussi expliqué que, si la continuité est améliorée sur la journée, ce n'est pas le cas sur la durée du séjour, avec des agents parfois absents plusieurs jours.

Sur la pénibilité et la fatigue au travail, elle a rappelé l'absence d'études, ainsi que les difficultés liées à des situations particulières: grossesses, postes adaptés ou fin de carrières. L'auditoire a ainsi fait part de son inquiétude sur la santé des agents travaillant 12h par jour quand ils arriveront à 45 ans-50 ans.


Source : infirmiers.com