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Télémédecine : un petit pas pour la santé

Publié le 27/10/2010

Les décrets d’application de la loi HPST sur l’organisation de la télémédecine sont parus. Révolution ?

Pas vraiment : plutôt normalisation juridique de pratiques anciennes et constamment renouvelées, dans lesquelles les infirmières ont leur part et qui manifestent une orientation majeure, vers la télésanté.

1. Télémédecine et Loi HPST

La télémédecine, une révolution ?

La Loi HPST (hôpital, patients, santé et territoires) a été promulguée le 21 juillet 2009. Son titre II, intitulé "L’amélioration de l’accès à des soins de qualité" inclut la définition du cadre juridique de la télémédecine. Un décret publié le 19 octobre donne les modalités de sa mise en œuvre pratique.

Si j'écoute ma voisine, ça y est ! la télémédecine va enfin nous permettre de rester chez soi, de ne pas perdre de temps dans une salle d'attente bondée, de passer une consultation médicale à travers un mel ou deux, mieux, de recevoir son ordonnance sur Facebook, et pourquoi pas ! de bénéficier d'une téléinjection de la part d'une infirmière dont on pourra choisir la couleur des yeux sur notre ordinateur…

Arrêtons la science-fiction ! La télémédecine c'est sérieux et ce n'est pas nouveau.

2. Le pionnier de la télémédecine en France

Le professeur Louis Lareng est le fondateur du SAMU (service d'aide médicale urgente), dont le principe est de projeter au plus près de la victime un secours médical adapté. La régulation médicale faite au SAMU est la première téléassistance médicale opérationnelle. Le professeur Lareng est aussi, et ce n'est pas un hasard, le pionnier de la télémédecine en France. Il utilise, dès 1989, le principe de la télévision, des communications téléphoniques, puis de l'internet pour proposer une assistance médicale à distance.

Portrait de Louis Lareng

Sur le vidéogramme suivant, on pourra se convaincre que la télémédecine n'a rien de bien nouveau.

Expérience de télémédecine 1990 - INA.fr

3. Pourquoi fallait-il cette Loi HPST pour encadrer la télémédecine ?

Et bien justement parce que cette pratique et parfois certaines dérives n'étaient pas encadrées. Cette activité n'ayant pas d'existence juridique, la reconnaissance des pratiques, leur financement, leur développement et leur déploiement restaient le fruit de quelques pionniers.

4. La télémédecine est-elle utile ?

Oui, mais... Faire de la télémédecine, d'un bureau, vers une salle d'examen située au même étage n'a pas de sens, c'est un gadget coûteux et inutile : le praticien ou le patient peuvent se déplacer et trouver facilement un lieu commun ; mais quand la distance est importante, la télémédecine peut résoudre le problème, en rapprochant virtuellement le patient du conseil médical.

Exemple : on ne trouve pas un neurochirurgien dans tous les hôpitaux locaux. Si un patient se présente et que le médecin "local", non spécialiste, estime avoir besoin de l'avis d'un neurochirurgien, il faut procéder au transport du patient vers le centre hospitalier équipé.

Eh ! bien, la télémédecine peut permettre au spécialiste de donner un avis à distance, de faire procéder, par le médecin local, à différents examens cliniques et radiologiques et en fonction de tout cela, faciliter une décision efficace : un transport du patient, par voie routière ou hélicoptère, ou une surveillance locale, sans transport et sans surcoût.

C'est ce qui est mis en place dans plusieurs départements, dont le Var.

Mais jusqu'à présent, l'acte diagnostic à distance posait un sérieux problème de responsabilité pour les différents acteurs et accessoirement de rémunération de ces acteurs distants.

5. Qu'apporte ce décret d'application de l'article 78 de la Loi HPST ?

5.1. Des modification du Code de la santé publique

Ce décret apporte au Code de la santé publique les articles R6316-1 à R6316-11, qui encadrent la pratique de la télémédecine.

5.2. Des définitions

La définition générale : « relèvent de la télémédecine définie à l'article L. 6316-1 les actes médicaux, réalisés à distance, au moyen d'un dispositif utilisant les technologies de l'information et de la communication »

On distingue :

  • la téléconsultation (professionnel médical qui donne une consultation à distance à un patient) ;
  • la téléexpertise (avis médical spécialisé demandé et rendu à distance) ;
  • la télésurveillance médicale (suivre un patient à distance à l’aide de matériels de surveillance) ;
  • « la téléassistance médicale, qui a pour objet de permettre à un professionnel médical d'assister à distance un autre professionnel de santé au cours de la réalisation d'un acte. ».
  • la réponse médicale donnée par le SAMU (opérationnelle depuis 1970 et logiquement intégré aux pratiques de télémédecine).

Pour l’avant dernier point, je garde la formulation complète. Autant pour les autres pratiques, on parle de « professionnel médical », autant pour la téléassistance médicale, on parle de professionnel de santé, et dans ce cas les infirmiers sont pleinement concernés.

Exemple : une échographie à distance. Au CHRU de Tours le radiologue Philippe Arbeille a mis en place, dès 1997, un dispositif d’échographie à distance pour éviter de faire déplacer des patients vers un centre hospitalier équipé. A distance le radiologue suit les mouvements d’un échographe robotisé et manipulé sur place par une infirmière formée à cet effet. La visioconférence permet aux deux professionnels de santé et au patient de communiquer et de conduire l’examen dans d’excellentes conditions.

http://www.cnes.fr/

Ce type de dispositif est également utilisé par la Marine nationale et dans d’autres centres hospitaliers.

Remarque

Que dire du professionnel de santé infirmier qui manipule un échographe à distance ? Rien de plus et rien de moins que la manipulation du BladderScan®… : ce sont des matériels dont l’usage est réservé à un personnel qualifié en radiologie médicale…

Mais, comme les choses sont bien faites, la Loi HPST propose un volet « coopération entre professionnels de santé » et certaines pratiques pourront faire l’objet de protocoles soumis à autorisation et contrôle de l’Agence régionale de santé (ARS).

Fiche pédagogique sur la coopération entre les professionnels de santé

5.3. Protection du patient

Les actes de télémédecine sont réalisés avec le consentement libre et éclairé du patient.

5.4. Traçabilité

L’acte de télémédecine nécessite l’authentification du professionnel de santé et l’identification du patient. Un compte-rendu est inséré dans le dossier médical du patient ou tout dossier tenu par un professionnel de santé intervenant.

5.5. Prise en charge

Nous aurons certainement l'occasion d'entendre à nouveau le terme de télémédecine lors de la discussion du projet de Loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. En effet, la télémédecine nécessitera un financement particulier, qui n'était pas prévu dans les Lois de finances précédentes. C'est le fond pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) qui sera normalement augmenté en conséquence.

5.6. Organisation

Les activités de télémédecine peuvent faire l’objet d’un programme national, d’un contrat pluriannuel ou d’un contrat particulier avec l’ARS pour les professionnels de santé libéraux. Ces professionnels devront être formés à l’utilisation des outils technologiques utilisés.

6. Et les infirmiers dans tout cela ?

On a vu que les infirmiers et plus globalement les professionnels de santé pouvaient intervenir dans la téléassistance médicale. On reste sous le contrôle d’un professionnel médical, mais on participe à l’acte de télémédecine. On ne pouvait pas attendre autre chose dans une pratique intitulée télé-médecine. Il aurait été certainement plus ouvert de parler de télé-santé pour élargir le sujet à des pratiques non médicales.

La Fédération nationale des infirmiers a mené en 2009 un colloque sur le thème de la télésanté. Vous trouverez les différentes tables rondes de cette journée avec quelques retours d’expériences.

Congrès FNI

Conclusion

Enfin, je vous recommande de lire le rapport de la commission Galien.

Vous pourrez alors aisément deviner où les infirmiers peuvent avoir une place essentielle dans la télésanté, peut-être l’étape suivante de la télémédecine.

Les maladies chroniques ou le vieillissement de notre population induisent de nouveaux besoins.

Avec les déserts médicaux déjà présents, il faudra bien répondre à ces besoins en santé de la population. La télémédecine c’est bien, mais on peut attendre beaucoup mieux et plus de notre société, sous réserve d’un financement à la hauteur des enjeux.. A suivre !

Webographie

Jérôme CLÉMENT   Président de l’association formatic Santé Rédacteur Infirmiers.com  jerome.clement@infirmiers.com


Source : infirmiers.com