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Suicide d'un cadre à Saint-Calais : pas de faute de la direction selon l'Igas

Publié le 07/02/2017
couloir vide hôpital

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L'Inspection générale des affaires sociales (Igas), dans son rapport sur le suicide d'un cadre de santé au centre hospitalier (CH) de Saint-Calais (Sarthe), ne constate pas "de défaut d'organisation de l'établissement, ni de faute ou décision inappropriée de la direction" concernant le défunt, qui avait mis en cause sa hiérarchie.

Suicide d'un cadre infirmier : le CH de Saint-Calais a été mis hors de cause.

L'homme s'était donné la mort à son domicile en juillet 2016. Travaillant auparavant à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) du CH, il venait d'obtenir son diplôme de cadre et déplorait que la direction l'ait affecté contre son gré au service de soins de longue durée (SLD), avaient rapporté le syndicat CGT, citant une lettre posthume.

La ministre des affaires sociales et de la santé, Marisol Touraine, avait chargé l'Igas d'éclaircir les circonstances de ce drame, mais aussi de contrôler les risques psychosociaux au sein du CH.

L'inspection a publié le 2 février 2017 une synthèse de son rapport. Elle explique ne pas pouvoir en divulguer l'intégralité car il contient des informations qui relèvent de l'intimité de la vie privée du défunt, ainsi que des jugements de valeur sur le comportement [...] de plusieurs personnes facilement identifiables. Le rapport a été rédigé par Félix Faucon, ancien adjoint au directeur général de l'offre de soins (DGOS) et Alain Meunier, qui avait dirigé le CHU de Clermont-Ferrand. Ils observent que le défunt n'avait eu aucun contact avec la direction pendant sa formation de cadre, jusqu'à un entretien, le 17 juin 2016, avec la directrice et la coordonnatrice des soins pour préparer la reprise de ses fonctions, fixée au 1er juillet. Dans plusieurs courriers reçus après son décès, il a mis en cause la direction de l'établissement pour expliquer son acte, en se référant notamment à la teneur de cet entretien, confirme l'Igas.

Après avoir recueilli près de 80 témoignages, la mission reste confrontée à deux séries de versions contradictoires: celles qui considèrent que l'entretien du 17 juin a été déterminant pour le passage à l'acte et celles qui mettent en avant des motifs personnels. Le poste auquel le cadre a été affecté était en adéquation avec son statut et son expérience, même s'il était l'un des plus difficiles du CH, estime l'Igas. Ce professionnel avait été reconnu et soutenu par la direction depuis son arrivée au CH, comme en témoigne sa promotion rapide. La décision d'affectation, certes différente des souhaits de l'intéressé, mais acceptée formellement par lui sur le moment, était régulière et justifiée, considèrent les inspecteurs.

Des difficultés sur la mobilité interne, l'absentéisme et les plannings

La directrice actuelle à dû conduire, dès sa nomination en 2006, un redressement de l'établissement car sa situation appelait des mesures énergiques, sources d'inévitables tensions, dépeint l'Igas. Malgré les résistances, cette direction a pris les décisions nécessaires pour améliorer les pratiques professionnelles, rétablir l'équilibre financier et développer [...] une politique qualité étendue et structurée, saluent-ils. L'un de ses volets est consacré, depuis 2014, aux risques psychosociaux, et se fonde sur une méthodologie solide et des documents institutionnels validés et actualisés, ajoute la mission. Elle décrit un dialogue social non conflictuel au sein du CH, tout en confirmant que la gestion des situations individuelles est un sujet d'opposition à la direction et de contestation du management.

Le CH est doté d'une charte de mobilité mais son application obéit à des critères flous et elle est parfois inadaptée, pointe l'Igas. Alors que les cas de mobilité non volontaire sont minoritaires, la mobilité interne est perçue comme une pression ou une sanction et alimente contestation et ressentiment dans les relations entre agents, cadres et direction. En l'état, elle constitue potentiellement un risque psycho-social, avertit la mission.

L'évolution des effectifs n'est pas un facteur de dégradation des conditions de travail à Saint-Calais, juge l'Igas. Ils sont en baisse modérée sur le budget principal mais en hausse sur les services médico-sociaux comme pour l'ensemble de l'établissement. L'absentéisme et le turnover augmentent au CH, restant inférieurs à la moyenne nationale. Cependant, les données d'absentéisme pour l'année en cours sont préoccupantes car elles montrent une très forte hausse du nombre de journées d'absence au CH et pour son service de [SLD] en particulier, souligne la mission. Elle décrit dans ce dernier une instabilité des plannings et des rappels sur des jours de repos, avec un fort impact sur la vie personnelle des agents. Elle signale des locaux non fonctionnels et un effectif étroitement dimensionné.

L'Igas formule une série de recommandations à mettre en oeuvre dès 2017. Elle appelle le CH, l'agence régionale de santé (ARS) et le conseil départemental de la Sarthe à rechercher toute possibilité de renforcer le service de SLD et l'Ehpad. Elle invite ces autorités à se prononcer rapidement sur le schéma architectural proposé par l'hôpital. Elle propose de mettre en oeuvre des incitations rémunérées aux remplacements ponctuels pour éviter les rappels sur repos. La mission préconise aussi des formations des cadres du CH à la prévention des risques psychosociaux et à l'identification des situations critiques. Elle plaide pour garantir l'effectivité des droits syndicaux des représentants du personnel et renforcer leur formation pour l'exercice de leurs missions.

Elle propose à l'ARS et aux CH du Mans et de Saint-Calais d' élaborer un plan de communication positivant la mise en place du groupement hospitalier de territoire [GHT] de la Sarthe, qui associe ces établissements, parmi d'autres. L'objectif serait de prévenir les risques psychosociaux liés à l'absence de visibilité et aux inquiétudes sur l'avenir du centre hospitalier. Pour un établissement exposé à des difficultés de recrutement durables pour les médecins et certaines professions paramédicales, l'adossement au [CH] du Mans dans le cadre du [GHT], voire d'une direction commune, peut prévenir ou pallier un potentiel non-renouvellement de compétences critiques qui serait un facteur d'insécurité professionnelle collective, écrivent les inspecteurs.

"Consternation" de la CGT

L'union départementale CGT santé-action sociale de la Sarthe, dans un communiqué du 3 février, fait part de son incompréhension et sa consternation face aux conclusions de l'Igas. De très nombreux témoignages ont permis de mettre en avant une grande souffrance des personnels liée principalement à des comportements managériaux autoritaires et répressifs, des pressions psychologiques et des faits de harcèlement, réaffirme le syndicat. La direction n'est à aucun moment mise cause par l'Igas malgré les accusations argumentées du défunt, s'indigne-t-il. Pour lui, les quelques remarques sur la gestion des plannings et la mobilité interne ne peuvent faire oublier l'absence de prise en considération de tous les problèmes reprochés à la direction. La CGT demande à nouveau le départ de la directrice et appelle les salariés de l'hôpital de Saint-Calais à réagir.


Source : infirmiers.com