Côté qualité des soins, la situation s’améliore, même si des progrès restent à faire. C’est, en substance, la conclusion que la Haute autorité de santé (HAS) tire de sa mesure annuelle des indicateurs de qualité et de sécurité des soins dans les établissements sanitaires et médico-sociaux (public et privé confondus). Le bilan, présenté en conférence de presse*, s’appuie sur 34 indicateurs évalués par un regard conjoint des patients et des professionnels de santé, sur les quatre secteurs traditionnellement identifiés : médecine-chirurgie-obstétrique (MCO), soins médicaux et de réadaptation (SMR), hospitalisation à domicile (HAD) et psychiatrie en temps plein et en centres médico-psychologiques (CMP). Avec un premier constat positif : la participation à ces enquêtes est en hausse constante. Plus de 2 millions de questionnaires ont été remplis pour cette année, et plus de 800 000 commentaires ont été laissés par les patients. Bien plus donc que les « 50 000 qui répondaient aux questionnaires » en 2016, a précisé Laetitia May-Michelangeli cheffe du service évaluation et outils pour la qualité et la sécurité des soins de la HAS. À noter que les résultats des indicateurs portent sur l’analyse des dossiers de 2022.
Un score qui s'améliore sur les escarres
Le deuxième constat, c’est que globalement la satisfaction et l’expérience patient s’améliorent. Le secteur MCO affiche ainsi un taux de conformité de 74,3%, soit +0,9 point par rapport à l’année précédente. En tout, il a augmenté de 1,5 point en sept ans. Il est plus ou moins identique en SMR, où il est de 75,7%. Dans le détail, les indicateurs associés à l’évaluation et la prise en charge de la douleur progressent également. « Les résultats pour les longs et courts séjours et pour la HAD sont bons », a observé Laetitia May-Michelangeli, soit « autour de 90% de conformité. » Le taux de conformité en HAD a ainsi gagné 7,8 points par rapport à 2021, équivalant à 84%, avec 86% des établissements qui atteignent un niveau satisfaisant. Objet d’une inquiétude émise par la HAS à la suite de la précédente mesure, la traçabilité des risques d’escarres augmente également : l’indicateur est ainsi de 85% en HAD, où les patients, souvent très fragilisés, y sont particulièrement exposés. « Les professionnels sont engagés pour faire au mieux dans les conditions actuelles. »
Côté nouveaux indicateurs, la HAS s’est félicité des données relevant de celui relatif à la prescription d’antibiotiques dans le cas d’infections respiratoires basses en court séjour. Il avait pour vocation de déterminer si celle-ci était bien de moins de 7 jours. « Les résultats sont bons pour une première mesure nationale », a en effet affirmé Laetitia May-Michelangeli. « 81%, soit ¾ des prescriptions sont bien de moins de 7 jours, le reste étant justifié cliniquement. » Ces résultats sont encourageants, notamment dans un contexte où l’antibiorésistance représente une menace pour la santé mondiale. En revanche, pour ce qui est de la vaccination des professionnels contre la grippe saisonnière, il n’y a pas de quoi se réjouir, a-t-elle noté. Seuls 19% des personnels hospitaliers se sont fait vacciner durant l’hiver 2022-2023. « On ne peut pas s’en satisfaire », a-t-elle jugé, rappelant que « le personnel qui se vaccine se protège », mais surtout « protège les patients ».
Une lettre de liaison à la sortie de qualité contribue à une meilleure coordination avec l’aval.
Lettre de liaison et prise en charge des AVC à la traîne
Et cet indicateur n’est pas le seul qui a besoin de s’améliorer. La coordination entre la ville et l’hôpital reste compliquée avec une transmission de lettre de liaison qui plafonne toujours à des niveaux de conformité peu satisfaisants. En MCO et en psychiatrie en hospitalisation à temps plein, s’ils progressent de quelques points, ils n’atteignent encore que 59% (+6 points par rapport à 2021) et 52% (+7,5% points) respectivement, ce dernier chiffre témoignant d’une « prise de conscience » du secteur sur les courts séjours. L’identification du médecin traitant et les traitements médicamenteux de sortie sont les 2 critères qui tirent le plus le score de l’indicateur vers le bas. Or, rappelle la HAS, cette lettre de liaison en sortie d’hospitalisation est essentielle car elle permet d’assurer « la coordination avec les professionnels de santé exerçant en ville. Une lettre de liaison à la sortie de qualité contribue à une meilleure coordination avec l’aval. » La situation n’est toutefois pas homogène selon les secteurs. En SMR, le niveau de conformité de cette lettre est de 80%. « C’est peut-être parce que ces services ont plus de temps pour réaliser cette lettre », a avancé Laetitia May-Michelangeli comme explication.
Même chose pour la prise en charge des AVC en longs et courts séjours. Si, de manière générale, les résultats à l’imagerie cérébrale diagnostique sont bons – ils atteignent 92% en MCO – d’autres indicateurs sont clairement moins satisfaisants. C’est notamment le cas de la prévention des risques de pneumopathie d’inhalation : elle n’est réalisée que 3 fois sur 10 en MCO. La planification du suivi post-AVC plafonne, elle, à 33%, tandis qu’en SMR, c’est l’indicateur relatif à la prévention du retour à domicile qui pèche un peu (à 47%). « Il y a une vigilance » à avoir « sur l’état cardio-vasculaire. Il faut que les établissements et les régions s’emparent de ces chiffres pour trouver des solutions », a-t-elle prévenu. Enfin, la HAS alerte sur la baisse de l’indicateur associé à la consommation de produits hydroalcooliques, utilisé pour mesurer l’hygiène des mains des professionnels. Il a perdu 11 points par rapport à 2022 (à 83%), probablement en raison du relâchement des mesures mises en place lors de la crise sanitaire.
Une vigilance toujours d'actualité en psychiatrie
Enfin, côté psychiatrie, la situation reste peu satisfaisante. Outre la qualité de la lettre de liaison, l’évaluation et la prise en charge de la douleur somatique doivent également être améliorée. Le taux de conformité n’atteint que 63% - soit tout de même une augmentation de 4,8 points par rapport à 2021 – avec 54% des établissements qui présentent un niveau satisfaisant. Parallèlement, la HAS a pour la première fois opéré une mesure de la qualité dans les centres médico-psychologiques (CMP). Elle identifie ainsi un point de vigilance sur la prise en charge de l’état cardio-vasculaire et métabolique chez les patients adultes (résultats des examens sanguins, antécédents, mesure de la pression artérielle…) : le score national plafonne à 16% et aucun établissement n’atteint un niveau satisfaisant. Des niveaux similaires sont observés sur les indicateurs relatifs au repérage et à la proposition d’aide à l’arrêt des addictions, avec un taux de 18%.
Face à ces résultats, il ne s’agit évidemment pas d'accabler les professionnels de santé exerçant en psychiatrie, a insisté Laetitia May-Michelangeli, rappelant que ces structures sont particulièrement sous tension et n’ont pas l’habitude de tracer leurs activités. De manière générale, ces mesures de qualité doivent permettre « d’encourager les établissements à s’intéresser à ce qu’ils font ». Certains indicateurs seront donc reconduits pour l’année 2024, l’idée étant de les alterner « une année sur deux pour laisser le temps aux établissements de s’améliorer ». « Les indicateurs sont développés avec les patients et les professionnels de santé et sont régulièrement actualisés. La mesure n’a de sens que si la démarche est répétée et les résultats, analysés et utilisés », a-t-elle conclu.
La présentation des indicateurs de qualité a aussi été l’occasion de faire un état de la certification qualité des établissements. À l’issue des 1 444 visites effectuées par les experts sur les 2 394 prévues, la HAS présente un bilan mitigé : si les résultats sont globalement bons avec 85% des établissements visités ont reçu une décision de « qualité de soins confirmée », dont 22% qui ont obtenu la mention « haute qualité des soins », une structure sur 6 est non certifiée, 13% le sont sous condition, et 3% ne le sont pas. Soit 33 établissements pour lesquels une nouvelle visite a été reprogrammée dans un délai de 12 à 24 mois. « Ce chiffre est bas mais n’a jamais été aussi élevé », a constaté Lionel Collet, le président de la HAS. Les établissements de petite taille éprouvent plus de difficultés à obtenir leur certification que les CHU et les structures de grande taille, qui bénéficient notamment d’une culture universitaire mieux ancrée, a expliqué Anne Chevrier, cheffe du service de certification des établissements de santé de la HAS. À noter que le site Qualiscope, ouvert au grand public, répertorie l’ensemble des structures avec leur niveau de certification.
Consulter les rapports :
- En MCO, dont chirurgie ambulatoire
- En SMR
- En HAD
- Et en psychiatrie ambulatoire et temps plein
*Le mercredi 14 février à PariSanté Campus (Paris)
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