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GRANDS DOSSIERS

Présidentielles 2012 : le catalogue santé des candidats

Publié le 16/04/2012

L’avenir du système de soins n’est pas le point fort du programme des candidats à la présidentielle 2012, bien que la santé soit une préoccupation largement partagée par les Français. Voici un petit inventaire de leurs propositions, où on en trouve même qui concernent les infirmières !

À s’en tenir à ce qui apparaît dans les médias et dans les déclarations des candidats, l’avenir du système de santé est loin d’être un thème majeur de la campagne présidentielle, alors même qu’il est une des principales préoccupations des Français. Plus grave encore, il est plutôt difficile d’avoir une idée de leur programme en la matière, au point parfois de se demander s’il existe. On peut avoir quelques lueurs en lisant leurs réponses aux questions de quelques journaux spécialisés, avant de se résoudre à plonger dans la lecture ardue des propositions de chacun à partir de ce qu’ils ont publié sur les sites de leur parti. Aussi faut il savoir gré au cabinet de consultants Nile1
de s’y être collé et de proposer un tableau comparatif des programmes santé des cinq candidats les mieux placés dans les sondages (N. Sarkozy, F. Hollande, F. Bayrou, J.-L. Mélanchon, M. Le Pen). Cet article 2lui est largement redevable.

Divine surprise ! ces programmes sont plutôt étoffés et (presque) complets, du moins dans les registres habituels : par exemple, tout le monde fonce sur les dépassements d’honoraires, actualité oblige, alors qu’aucun ne fait mention des problèmes de santé au travail et, mais qui sera surpris ?, des infirmières. Pour celles-ci, on obtient quelques précisions quand un confrère leur pose spécifiquement des questions. D’une manière générale, les déclarations d’intention et les objectifs foisonnent, les moyens de les réaliser beaucoup moins. Essayons quand même un rapide passage en revue, centré sur les mesures concrètes, pour conclure sur les priorités affichées des candidats.

HPST et T2A : d’importants clivages entre les candidats

Si le candidat Sarkozy ne peut que se féliciter de la loi HPST votée en 2009 François Hollande regrette que sa conception ait fait l’objet d’une concertation insuffisante et qu’elle impose une gouvernance trop concentrée, alors que Marine Le Pen propose de renforcer la tutelle de l’État sur les Agences régionales de santé (ARS) et que Jean-Luc Mélenchon est déterminé à supprimer et la loi et les ARS. François Bayrou se prononce pour une modification de la loi en direction d’une logique de réseaux.

N. Sarkozy est évidemment pour le maintien de la convergence tarifaire entre secteurs public et privé de l’hospitalisation, alors que F. Hollande et J.-.L. Mélenchon sont pour sa suppression. Ce dernier propose l’abrogation de la tarification à l’activité (T2A) des établissements de santé, F. Hollande de la compléter, N. Sarkozy de la moduler par un système de bonus/malus, les deux autres ne se prononçant pas (M. Le Pen s’oppose à toute augmentation du forfait hospitalier, sans aller jusqu’à sa suppression, comme le veut J.-L. Mélenchon).

La place des complémentaires : un objet de débat pour tous moins une

Les sous. N. Sarkozy est pour la tenue d’États généraux de la santé pour débattre de la place respective de la solidarité nationale, des complémentaires et de l’effort individuel. F. Hollande se prononce lui aussi pour un débat sur la place des complémentaires, F. Bayrou et J.-L. Mélenchon invitent à s’inspirer du système d’assurance complémentaire obligatoire prévalant en Alsace Moselle (dont le régime n’a jamais été déficitaire). F. Hollande propose de « rapprocher la CSG et l’impôt sur le revenu », alors que N. Sarkozy réaffirme son attachement à la TVA sociale. M. Le Pen ne dit rien de précis sur le sujet du financement.

En ce qui concerne les remboursements, N. Sarkozy pense que leur amélioration pour les dents et les lunettes doit attendre le retour à l’équilibre du (Produit intérieur brut) PIB, qu’il prévoit pour 2013. F. Hollande est pour « la généralisation du tiers payant », F. Bayrou pour un « bouclier santé » et J.-L. Mélenchon pour le remboursement intégral de toutes les dépenses de santé, donc la suppression des forfaits et des franchises médicales. M. Le Pen se contente de ne pas taxer encore plus les mutuelles. N. Sarkozy et F. Hollande sont pour la diminution du prix des médicaments, voire de leur nombre (F. Hollande). N. Sarkozy et M. Le Pen développent une série de mesures contre la fraude.

« Divine surprise ! ces programmes sont plutôt étoffés et (presque) complets, du moins dans les registres habituels... »

Les médecins, objets de toutes les attentions

Comme dit plus haut, les professionnels de santé qui intéressent les candidats sont les médecins, invités cependant à coopérer avec les autres. Les propositions les concernant sont intimement liés aux problèmes d’accès aux soins. Tous les candidats se prononcent contre les dépassements d’honoraires excessifs, en proposant d’ouvrir des négociations conventionnelles. N. Sarkozy, F. Hollande et F. Bayrou sont pour un forfait complétant le paiement à l’acte, F. Bayrou se prononce nettement contre la rémunération à la performance (« fruit d’une logique purement business »).

Les soins de proximité sont l’autre grande affaire de cette problématique d’accès aux soins. On connaît l’attachement de N. Sarkozy aux maisons de santé pluridisciplinaires. Il propose également d’établir une carte des besoins et de relever le numerus clausus des médecins, dont J.-L. Mélenchon propose de viser la suppression. F. Hollande est pour la création de pôles de santé de proximité (et pour la limitation des conventionnements de secteur 2 dans les zones surdotées en médecins), F. Bayrou pour des dispensaires adossés aux pharmacies dans les territoires sous-dotés en médecins et J.-L. Mélenchon pour le soutien aux centres de santé. M. Le Pen est pour la fermeture des « toutes petites structures » et J.-L. Mélenchon pour l’arrêt des fermetures et démantèlements des hôpitaux, maternités, centres de soins et d’IVG.

Infirmières : on y pense, on y pense …

Bon. Et les infirmières ? Jean-Marie Le Guen, conseiller santé de François Hollande, indique qu’il y a « une équité à rétablir » pour les salaires des infirmières de la fonction publique hospitalière et une discussion à entamer avec la CNAM pour toutes les salariées (public et privé). J.-L. Mélenchon promet une augmentation générale des salaires, des études rémunérées, la prise en compte de la pénibilité et la titularisation des précaires de la fonction publique. J.-M. Le Guen est pour le renforcement de l’universitarisation des études. Il est également pour la suppression de l’obligation de cotiser à l’Ordre des infirmiers, mais pour l’ouverture de discussions quant à son avenir, alors que J.-L. Mélenchon se prononce clairement pour sa suppression, que N. Sarkozy (ou plutôt Philippe Juvin, son conseiller santé) estime qu’il faut « lui donner sa chance » et que pour F. Bayrou (ou plutôt Geneviève Darrieussecq), il est nécessaire pour représenter la profession.

Le patient, au centre de la prise en charge...

Tout le monde est pour la reconnaissance du rôle des patients, en augmentant la « démocratie sanitaire » ou leur « participation ». F. Hollande a l’intention d’indemniser leurs représentants pour assurer leur indépendance. La prévention est l’objet de toutes les attentions, par le renforcement des plans (tous les candidats), la mobilisation dans le scolaire (F. Bayrou), le « coaching parental » (N. Sarkozy) et la lutte contre les nuisances environnementales (J.- l. Mélenchon).

Dépendance : cinquième branche ou pas ?

Dernier grand thème santé de cette présidentielle : la dépendance. N. Sarkozy estime raisonnable d’attendre le retour à l’équilibre des finances publiques, qu’il prévoit pour l’année prochaine, avant d’entamer une réforme. F. Hollande et M. Le Pen se prononcent pour une cotisation spécifique (5ème risque ou 5ème branche). F. Bayrou veut rendre la loi sur le handicap « effective », alors que J.-L. Mélenchon en veut une nouvelle. F. Hollande veut une « Agence de l’accessibilité des bâtiments » et l’affectation d’un certain nombres des nouveaux postes de l’Éducation nationale pour l’accompagnement des élèves concernés.

L’actualité récente a mis sur le devant de la scène le problème de l’euthanasie et la contraception. N. Sarkozy et F. Bayrou proposent de ne pas toucher à la loi Léonetti, tandis que F. Hollande est en faveur d’une « assistance médicalisée pour finir sa vie dans la dignité ». F. Hollande propose un forfait contraception pour les mineures, J.-L. Mélenchon un « accès effectif et gratuit » à la contraception et à l’IVG. M. Le Pen est pour le déremboursement de l’avortement en faveur du remboursement de médicaments « utiles », si le choix est à faire.

Arrivé à ce point de l’article, vous devez être en train de bailler. Normal. C’est une des raisons du peu d’empressement des candidats sur les sujets de santé : ça ressemble trop à un catalogue manquant de vision d’ensemble et comportant des articles dont on n’est pas sûr de les avoir en rayon. D’autant que, seconde raison, les points techniques sont nombreux et pas toujours simples à saisir. Enfin, troisième raison, en santé la part du symbolique et des valeurs, donc des émotions, est toujours prête à surgir sans prévenir. C’est pourquoi, de l’avis de nombreux politologues, les sujets de santé sont « casse-gueule ».

Des priorités variées

D’où la sage décision de nos estimés confrères Viva magazine (en avril)2 et Allodocteurs.fr (en mars)3 de simplifier l’exercice en demandant à chaque candidat quelle serait sa priorité une fois élu.

N. Sarkozy : installation d’un dispositif de prise en charge des urgences non vitales en amont des urgences hospitalières, avec des médecins libéraux ; quelques semaines avant (allodocteur.fr) : renforcement de la lutte contre les abus et les gâchis, renforcement des plans de santé publique (notamment contre le suicide des jeunes), promotion de la médecine de parcours.

F. Hollande : plafonnement des dépassements d’honoraires, mise en place du tiers payant chez les généralistes, fin de la convergence tarifaire du secteur privé hospitalier avec le secteur public.

F. Bayrou : mise en place d’un bouclier santé et réforme des complémentaires sur le modèle « Alsace Moselle » ; quelques mois avant (egora.fr) : mise en place d’une autorité indépendante chargée de l’alerte sanitaire et constituée d’experts totalement indépendants.

J.-.L. Mélenchon : lancement d’une démarche de démocratie participative ascendante et abrogation des lois HPST, sur la T2A, sur les retraites, etc ; remboursement des soins à 100 %.

M. Le Pen : personna non grata dans ce journal, donc pas interrogée ! en revanche, sur Allodocteurs.fr elle se prononce pour « le transfert immédiat au Parlement du contrôle budgétaire complet de la protection sociale française. »

On remarquera facilement que les priorités affichées oscillent entre trois pôles : les problèmes mis en avant par l’actualité, l’attitude à l’égard des médecins, les convictions politiques. Et bien que la santé soit une préoccupation largement partagée par les électeurs, il est peu vraisemblable que ce soit elles qui dictent leur choix, hormis ceux des professionnels de santé, bien sûr ! Un sondage récent montre en effet que seuls 14 % d’entre eux jugent les propositions des candidats « assez pertinentes » et que 41 % les ignorent …

Notes

1. Comparaison des programmes santé des candidats à l’élection présidentielle 2012. Nile consulting. 28 mars 2012.
2. Les candidats à la présidentielle interrogés sur la santé par Viva presse
3. Sept questions à Nicolas Sarkozy, François Hollande, François Bayrou, Jean-Luc Mélenchon et Marine le Pen sur Allodocteurs.fr


Source : infirmiers.com