Plan cancer : adapter le système de santé est nécessaire

Le Pr Jean-Paul Vernant, dans son rapport d'orientation pour le troisième Plan cancer (2014-18) rendu public le vendredi 30 août 2013, préconise trois objectifs stratégiques dont une adaptation du système de santé et de son financement pour tenir compte des progrès thérapeutiques, avec une évaluation en temps réel.

Ce professeur d'hématologie à l'université Pierre-et-Marie-Curie de Paris a remis son rapport le vendredi 30 août au matin à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, Geneviève Fioraso, et à la ministre des affaires sociales et de la santé, Marisol Touraine. Dans ce document de 165 pages, diffusé par l'Institut national du cancer (Inca), le Pr Vernant et les membres du groupe de travail proposent trois objectifs stratégiques en vue de modifier l'état de santé de la population. En plus de poursuivre les actions entreprises par les deux premiers plans pour l'organisation de la recherche et celle des soins, le troisième plan doit anticiper les nouvelles organisations qu'imposeront les innovations thérapeutiques en permanent développement. Ce premier objectif consiste à mettre en œuvre les adaptations nécessaires du système de santé et de son financement liées aux modifications prévisibles de la prise en charge des cancers qui imposent une évolution des pratiques, des métiers et des équipements.

Dans la conclusion de son rapport, le Pr Vernant relève en particulier que les hospitalisations conventionnelles seront de plus en plus courtes mais s'accompagneront de "soins de haute technicité nécessitant des équipements sophistiqués (anatomocytopathologie, informatique, imagerie, radiothérapie)". Les métiers de la cancérologie devront s'adapter à ces nouvelles exigences et une gradation des soins tant médicaux que chirurgicaux devra être mise en place, ajoute-t-il. La majeure partie du parcours de soins se déroulera en ambulatoire, ce qui nécessite de repenser d'emblée les rapports hôpital-ville, avec la création de nouvelles fonctions professionnelles d'interface, et une implication croissante du médecin traitant et des autres professionnels de santé proches du domicile, ainsi que des malades eux-mêmes dans le parcours de soins.

Le Pr Vernant souligne la nécessité de se doter d'un système de santé réactif, suggérant de créer un comité indépendant chargé de proposer des ajustements et de nouvelles recommandations au fur et à mesure que des problèmes surgissent", mais "à la condition d'une évaluation en temps réel de l'impact des actions inscrites dans le troisième plan. Un Plan cancer élaboré et corrigé de façon ininterrompue permettrait que soient exploités rapidement et au bénéfice de tous les multiples progrès que nous sommes en droit d'attendre dans les années à venir, fait-il valoir.

Réduction des inégalités de santé

Autre objectif stratégique fixé pour le troisième plan, la réduction effective des inégalités de santé doit constituer une des lignes directrices, selon le rapport. Le Pr Vernant prévient qu'il conviendra de prendre garde que les innovations thérapeutiques ne soient pas l'occasion d'accentuer les inégalités sociales et territoriales déjà trop importantes.

Se félicitant de l'essor des équipes de recherche au cours des deux précédents plans, il appelle à poursuivre les collaborations avec l'industrie pour permettre un transfert rapide des innovations thérapeutiques dans le domaine du soin. Mais il plaide pour que les pouvoirs publics prennent leurs responsabilités et négocient avec les industriels afin que ces innovations soient commercialisées à leur juste prix.

Le troisième objectif doit être la simplification de l'organisation existante pour en augmenter l'efficacité et la cohérence. Pour cela, le rapport préconise notamment de laisser à l'Inca toutes ses responsabilités nationales, de donner aux cancéropôles "de larges responsabilités interrégionales" et de transformer les anciens réseaux régionaux en délégation régionale sous la tutelle des cancéropôles.

Pour atteindre ces trois objectifs stratégiques, le Pr Vernant formule des propositions d'objectifs et de recommandations articulées en cinq axes thématiques: le développement de la prévention et du dépistage; la recherche; les métiers, les formations et les pratiques de la cancérologie; le parcours de soins; la vie pendant et après le cancer. Cinq axes transversaux les complètent sur l'implication du médecin traitant; l'évolution des modalités d'implication des malades; l'organisation cible proposée pour obtenir une simplification, une meilleure lisibilité et une meilleure efficacité de la lutte contre le cancer; le système d'information; les problèmes de financement et de tarification se posant aux patients et aux établissements de santé.

Il était prévu dans le deuxième Plan cancer (2009-13) de mener 118 actions. Selon un bilan publié la semaine dernière, 60% ont été réalisées à juin ou le seront d'ici l'échéance du plan à fin 2013, rappelle-t-on.