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GRANDS DOSSIERS

Les chambres disciplinaires de l'ordre des infirmiers

Publié le 19/05/2009
chambre disciplinaire juridiction

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Les chambres disciplinaires ont été instituées par la loi 2006-1668 du 21 décembre 2006 portant création d’un Ordre National des Infirmiers. Etablies sur les mêmes articles que celles concernant les chambres disciplinaires des médecins, chirurgiens dentistes et sages femmes, les articles L.4124-1 et suivants de code de la santé publique elles s’appliquent, de facto, aux infirmiers. 

Les chambres disciplinaires de l’ONI : pour qui, pour quoi ?

Ces chambres disciplinaires s’articuleront autour de deux niveaux de juridictions.

  • Une Juridiction de 1ère instance, la chambre disciplinaire de 1ère instance qui dépend des Conseils Régionaux de l’Ordre des Infirmiers et qui reçoit les plaintes à l’encontre des professionnels.
  • Une juridiction de 2ème instance, la chambre disciplinaire nationale qui dépend du Conseil National de l’Ordre des Infirmiers. Elle est unique, siège au Conseil National et connaît en appel les décisions rendues par les chambres disciplinaires de 1ère instance.

Les chambres disciplinaires, quelques soit leur degré de juridiction, disposent également d’une Section des Assurances Sociale (SAS).

Ces sections sont en fait les juridictions de contentieux techniques avec la Sécurité Sociale.

Organisations et articulations de la chambre disciplinaire de 1ère instance

La chambre disciplinaire de 1ère instance (article L.4312-5-IV)

La chambre disciplinaire de 1ère instance a une compétence juridictionnelle qui concerne la discipline générale des infirmiers.

La saisie

Pour saisir la chambre disciplinaire de 1ère instance, il existe un certain nombre de procédures.

La procédure de saisie traditionnelle dite « procédure normale » passe obligatoirement par une phase appelée « conciliation préalable obligatoire ». C’est l’article L .4123-2 du Code de la Santé Publique rendu applicable aux infirmiers par la Loi du 21 décembre 2006 qui s’impose.

Cette procédure consiste à déposer une plainte au Conseil Départemental de l’Ordre des Infirmiers dont dépens l’auteur des faits incriminés.

Le Président du Conseil Départemental saisi, informe et convoque le professionnel mis en cause dans un délai maximum d’un mois et ce, en vue d’une conciliation.

La commission de conciliation du Conseil départemental saisi, se réuni en conformité avec l’article L.4312-1-I et III du code de la santé publique.

En cas d’échec de la conciliation, le Président du conseil départemental transmet la plainte à la chambre disciplinaire de 1ère instance avec un avis motivé, dans un délai maximum de trois mois à compter de la date d’enregistrement de la plainte au conseil départemental. Il a le droit de s’associer ou non à la plainte en question.

Si toutefois, le conseil départemental ne peut répondre à cette obligation, l’auteur de la plainte peut saisir directement le Président du conseil national de l’ordre des infirmiers en lui demandant de bien vouloir saisir, à son tour, la chambre disciplinaire de 1ère instance.

Le Président du conseil national dispose alors d’un mois pour transmettre la plainte à la chambre disciplinaire de 1ère instance.

Cas particulier de l’agent du service public

En application de l’article L.4312-5-IV 5ème alinéa du code de la santé publique, un infirmier du service public ne peut être traduit devant la chambre disciplinaire de 1ère instance.

Cependant, l’employeur doit informer le Président du conseil régional de l’ordre des infirmiers « de toute sanction disciplinaire mentionnée au premier alinéa de l’article L.4311-26 (1) du code de la santé publique, prononcée en raison d’une faute professionnelle à l’encontre d’un infirmier relevant du secteur public »

Également, en application de l’article L.4124-2 du CSP certaines autorités seront, néanmoins, compétentes pour saisir les chambres disciplinaires de 1ère instance afin de traduire un infirmier relevant du service public.

Il s’agit :

  • Du ministre en charge de la santé
  • Du représentant de l’Etat dans le département
  • Du procureur de la république.
  • Du directeur de l’ARH si les actes sont réalisés dans un établissement public de santé

Les saisies particulières

Les saisies de la procédure d’urgence sont codifiées à l’article R.4312-50 du code de la santé publique. Cette procédure rend applicable aux infirmiers les articles R.4126-1 à R.4126-54 du même code et qui concerne, en autre, les autorités compétentes pouvant saisir la chambre disciplinaire de 1ère instance à l’encontre de professionnels non chargés d’un service publique.

Les articles précisent que l’action disciplinaire peut être introduite devant la chambre disciplinaire de 1ère instance par les personnes ou autorités suivantes :

  • Le conseil national ou le conseil départemental de l’ordre agissant soit de leur propre initiative soit suite à des plaintes formulées par des patients, organisme d’assurance maladie, professionnels conseils des organismes de sécurité sociale, les associations de défense des usagers…..
  • Le ministre chargé de la santé
  • Le préfet du département au tableau duquel est inscrit le professionnel
  • Le préfet de région
  • Le directeur de l’Agence Régionale d’Hospitalisation dans le ressort de laquelle exerce le professionnel
  • Le procureur de la République du tribunal de grande instance dans le ressort duquel le professionnel est inscrit au tableau.
  • Un syndicat ou une association de professionnels

Les attributions disciplinaires

Comme il est précisé dans l’article L.4312-5-IV, la chambre disciplinaire de première instance a des attributions juridictionnelles disciplinaires en matière de discipline générale.

L’article L.4124-6 est rendu applicable par la loi 2006-1668 du 21 décembre 2006 et confère aux chambres disciplinaires de 1ère instance la possibilité d’appliquer les peines disciplinaires suivantes :

  1. L’avertissement
  2. Le blâme
  3. L’interdiction temporaire avec ou sans sursis ou l’interdiction permanente d’exercer une, plusieurs ou la totalité des fonctions d’infirmier, rétribuées par l’Etat, les départements, les communes, les établissements publics, les établissements reconnus d’utilité publique ou des même fonctions accomplies en applications des lois sociales
  4. L’interdiction temporaire d’exercer avec ou sans sursis ; cette interdiction ne pouvant excéder 3 ans
  5. La radiation du tableau de l’ordre

Il est à noter que les deux premières peines comportent la privation du droit de faire partie du conseil départemental, du conseil régional, du conseil national, de la chambre disciplinaire de 1ère instance ou de la chambre disciplinaire nationale de l’ordre pendant trois années.

Les peines suivantes sont privatives des droits précédemment évoqués à titre définitif.

Par ailleurs, quand un infirmier est radié du tableau, la décision est portée à la connaissance des autres conseils départementaux et de la chambre disciplinaire nationale, dès qu’elle est devenue définitive.

Il est également important de préciser que les peines s’appliquent à l’ensemble du territoire national.

La composition

La composition de la chambre disciplinaire de 1ère instance répond également à des mesures législatives et réglementaires définies par les articles L.4312-5-IV, R.4311-89 et R.4311-90 du code de la santé publique.

Ils indiquent que hors le Président de la chambre disciplinaire de 1ère instance, qui est nommé par le Vice Président du Conseil d’Etat et qui appartient au corps des magistrats de l’ordre administratif des tribunaux administratifs et des Cours d’appel administratives, les membres de cette chambre sont élus dans les mêmes conditions que les conseillers régionaux. C'est-à-dire au prorata du nombre d’infirmiers inscrits aux tableaux départementaux dépendant du Conseil régional de l’Ordre des Infirmiers.

La chambre disciplinaire de 1ère instance siège avec un minimum de cinq membres.

La section des assurances sociales (SAS) de la chambre disciplinaire de 1ère instance

C’est une instance juridictionnelle appartenant à la Chambre disciplinaire de 1ère instance du Conseil Régional de l’Ordre des Infirmiers.

Elle est en charge de régler les contentieux techniques avec la Sécurité Sociale.

Elle s’intéresse à toutes les fautes, fraudes, aux abus et à tous les faits concernant l’exercice de la profession d’Infirmier à l’occasion des soins dispensés aux assurés sociaux. Elle est définie par l’article L.145-5-1du code de la sécurité sociale, tout comme la chambre disciplinaire de 1ère instance, la SAS du Conseil Régional de l’Ordre des Infirmiers est saisie en première instance.

Cette section est également présidée par un magistrat des juridictions administratives et comprend un nombre égal d’assesseurs membres de l’Ordre Infirmier et représentant les organismes de sécurité sociale dont un, au moins, est praticien conseil nommé par l’administration de tutelle (Art L.145-7-1 du CSS).

Les assesseurs membres de l’ordre des infirmiers sont désignés par le conseil régional.

Les sanctions susceptibles, d’être prononcées par la SAS à l’encontre des infirmiers, sont précisées par l’article L.145-5-2 du CSS.

En la matière, on y retrouve :

  1. L’avertissement
  2. Le blâme avec ou sans publication
  3. L’interdiction temporaire ou permanente, avec ou sans sursis, du droit de dispenser des soins aux assurés sociaux
  4. Dans le cas d’abus d’honoraires, le remboursement à l’assuré du trop-perçu ou le reversement aux organismes de sécurité sociale du trop remboursé, même s’il n’est prononcé aucunes sanctions prévues aux 1° à 3°

Les sanctions prévues par cet article du CSS ne sont pas cumulables avec celles prononcées par la chambre disciplinaire de 1ère instance relevant de l’article L.4124-6 du Code de la Santé Publique, à l’occasion des mêmes faits.

Si les juridictions compétentes prononcent des sanctions différentes, seule la plus lourde s’applique.

Quand les décisions deviennent définitives, elles ont force exécutoire.

En ce qui concerne le 3°) du présent article, les sanctions doivent faire l’objet d’une publication par les organismes sociaux.

Les sanctions prévues aux 1°) et 2°) du même article (L.145-5-2 du CSS) entraînent la privation de faire partie d’un Conseil de l’Ordre quelques soit l’échelon (départemental, régional, national) pendant une période de trois ans.

Les sanctions prévues aux 3°) et 4°), toujours du même article, entraînent la privation définitive de faire partie d’un Conseil de l’Ordre quelque soit l’échelon.

Ces dispositions sont inscrites dans l’article L .145-5-3 du Code de la Sécurité Sociale.

Actuellement et en l’absence de SAS des chambres disciplinaires de 1ère instance de l’ordre des infirmiers, la SAS de la chambre disciplinaire de 1ère instance de l’ordre des médecins est compétente pour tout contentieux avec la sécurité sociale, impliquant un infirmier (art R.145-8 du code de la sécurité sociale).

Dans ce cas, un des assesseurs est obligatoirement un infirmier proposé par les syndicats les plus représentatifs de la profession, nommé par le Préfet de Région.

Organisations et articulations de la chambre disciplinaire nationale

La chambre disciplinaire nationale (art L.4312-7-IV)

La Chambre disciplinaire nationale connaît en appel les décisions rendues par les chambres disciplinaires de 1ère instance des Conseils Régionaux de l’Ordre des Infirmiers.
Elle est unique et siège au Conseil National de l’Ordre des Infirmiers.

La saisie

Contrairement à la chambre disciplinaire de 1ère instance, la saisie la chambre disciplinaire nationale ne nécessite pas de conciliation préalable.

La saisie peut-être introduite par :

  • l’auteur de la plainte
  • le professionnel sanctionné
  • Le ministre en charge de la santé
  • Le procureur de la République
  • Le conseil départemental de l’ordre dont dépend le professionnel sanctionné
  • Le conseil national de l’ordre.

La procédure d’appel contre les décisions des chambres disciplinaires de 1ère instance est suspensive sauf quand la dite chambre a été saisie en application de l’article L.4113-14 du code de la santé publique (praticien exposant des patients à un danger grave, le représentant de l’Etat dans le département prononce immédiatement une interdiction du droit d’exercer pour une durée maximale de cinq mois….)

La décision rendue par la chambre disciplinaire nationale est susceptible de cassation par recourt devant le conseil d’Etat.

Les attributions disciplinaires

Les attributions disciplinaires de la chambre disciplinaire nationale sont sensiblement identiques à celles des chambres disciplinaires de 1ère instance.

La différence significative réside dans le fait que les sanctions prononcées par cette chambre ne sont pas susceptibles d’appel et ne peuvent prétendre, en cas de contestation, qu’à la voie du recourt en cassation devant le conseil d’Etat.

La composition

La composition de la chambre disciplinaire s’inscrit également dans les textes législatifs et réglementaires du code de la santé publique et particulièrement de l’article L.4312-7-IV, R.4311-93 et R.4311-94 dudit code.

Elles précisent que hors le Président nommé par le ministre de la Justice et appartenant au corps des Conseillers d’Etat, la chambre disciplinaire nationale comprend 12 membres titulaires et 12 membres suppléants.

La chambre siège en formation avec un minimum de cinq membres.

La SAS de la chambre disciplinaire nationale

La SAS de la chambre disciplinaire nationale du conseil national de l’ordre des infirmiers connaît en appel les décisions rendues par la SAS de la chambre disciplinaire de 1ère instance d’un conseil régional de l’ordre.

Elle est unique et a compétence nationale. Elle siège au Conseil National de l’Ordre des Infirmiers.

Cette section est présidée, également, par un magistrat de l’ordre administratif ayant rang de Conseiller d’Etat. Ce magistrat est nommé par le Garde des sceaux.

La section est composée d’un nombre égal d’assesseurs membres de l’Ordre Infirmier et d’assesseurs praticiens conseils, représentants des organismes de sécurité sociale, nommés par l’autorité compétente de l’Etat sur proposition de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés. Les assesseurs membres de l’ordre des infirmiers sont désignés par le conseil national. (Art. L.145-7-2 du CSS).

Les sanctions prononcées sont sensiblement les mêmes que les sanctions prises par les SAS des chambres disciplinaires de 1ère instance sans nouvelle possibilité d’appel.

Les décisions rendues par la SAS de la chambre disciplinaire nationale sont susceptibles de cassation par voie du recours devant le Conseil d’Etat. (Art. L .145-5-5 du CSS).

Particularité du Conseil Régional de l’Ordre des Infirmiers concernant la suspension du droit d’exercice

Rôle et pouvoirs du Conseil Régional de l’Ordre

Lorsqu’un infirmier est frappé d’un état pathologique ou d’infirmité rendant dangereux l’exercice de sa profession, une suspension temporaire renouvelable du droit d’exercer peut-être prononcée.

Avant la Loi n°2006-1668 du 21 décembre 2006 portant création de l’ordre infirmier, le code de la santé publique confiait cette décision à l’appréciation du Tribunal de Grande Instance en vertu des articles L.4311-24 et L.4311-25 maintenant abrogés par la loi.

Aujourd’hui, cette tache revient aux conseils régionaux de l’ordre des infirmiers.

La procédure est complexe, elle repose sur un rapport motivé établi, à la demande du conseil régional concerné, rédigé par trois médecins spécialistes désignés comme experts.

Un de ces médecins est désigné par l’intéressé, le second par le conseil départemental dont dépend l’infirmier impliqué, le troisième par les deux précédents.

Le conseil régional peut-être saisi soit par le Préfet, soit par délibération du conseil départemental ou du conseil national.

L’expertise doit être effectuée au plus tard deux mois après la saisie du conseil régional.

A l’issue, le président du conseil régional de l’ordre désignera un rapporteur en charge d’exposer les faits lors du débat contradictoire.

L’infirmier concerné, le conseil départemental et éventuellement le conseil national sont convoqués par lettre recommandée accusé de réception huit jours au moins avant la séance au conseil régional.

L’infirmier peut se faire assister ou représenter par toute personne de son choix, le conseil départemental ou le conseil national par un de leurs membres ou un avocat.

La décision est notifiée à l’intéressé par lettre recommandée avec avis de réception, mais également au conseil départemental, au conseil national et au préfet du département.

A ce moment, l’intéressé dispose de dix jours pour déposer un recourt au conseil national.

A la différence des décisions prises par les chambres disciplinaires, donnant lieu à un recourt en appel ou en cassation, le recourt concernant cet état de fait n’a pas d’effet suspensif.

Les organismes d’assurance maladie, les mutuelles du département dans lequel l’infirmier exerçait sont informés des décisions de suspension d’exercice prises par le conseil régional.

Dans le cas ou l’infirmier exerce dans un établissement de santé, le conseil régional informe de la décision le directeur de l’Agence Régionale de l’Hospitalisation qui en informera le directeur de l’établissement.

Enfin, l’ensemble des conseils départementaux sont informés par le conseil national des décisions de suspension prises par les conseils régionaux.

Conclusion

Les chambres disciplinaires sont de véritables juridictions rendant l’ordre des infirmiers encore plus indépendant vis-à-vis des autres professions de santé.

Il est de chaque infirmier de bien prendre la mesure de ce changement radical dans notre façon de fonctionner et d’exister dans notre pratique quotidienne.

Les infirmiers sont enfin rentrés dans l’ère de l’institution qui permettra à notre profession d’avoir un empreinte forte et, qui plus est, prévue par la loi sur toutes les décisions qui viendraient à être prises concernant notre métier.

Note

  1. « L’employeur amené à prendre une mesure de licenciement, révocation ou suspension d’activité d’un infirmier(ère) dont l’exercice professionnel expose les patients à un danger grave… » (retour au texte)

Webographie

Bibliographie

  • Code de la santé publique – DALLOZ 2008-
  • Code Civil – DALLOZ – 2008
  • Philippe TISSERAND. -Le fonctionnement de la section des assurances sociales – Soins N°709 – octobre 2006
  • Jean Paul MARKUS – Les juridictions ordinales- Lgdj 2003

Infirmier Chef Pierre LEMAIRE
ESM, Coordonnateur de la cellule Medico-Juridique SDIS78


Source : infirmiers.com