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Mediator : des experts désemparés

Publié le 09/02/2011

Les experts externes de l'AFSSAPS craignent que pour l'opinion publique, ils soient à la solde des "labos", alors qu'ils revendiquent remplir une mission de santé publique.

Des experts externes de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) expriment leur "désarroi" vis-à-vis de l'opprobre médiatique qu'ils subissent dans le cadre de l'affaire Mediator* (benfluorex, Servier) et au-delà, dans une lettre ouverte transmise mardi à l'APM.

"Nous sommes sidérés par tout ce qu'on a lu et entendu dans les médias sur l'affaire Mediator*. Nous serions tous des incompétents et des vendus à 'big pharma' alors que nous essayons de faire ce travail volontaire le plus correctement possible. Nous le vivons très mal", se désole Marie-Claude Bongrand, pharmacien hospitalier à l'hôpital de la Conception à Marseille (AP-HM), auprès de l'APM.

"L'opinion publique ne doit pas ignorer notre désarroi", est-il écrit dans ce courrier rédigé avec le Dr Marie-Hélène Denninger, hématologue à l'hôpital Beaujon à Clichy (Hauts-de-Seine, AP-HP), et le Pr Jean Doucet, médecin interniste au CHU de Rouen, et signée par 12 autres experts.

Commercialisé en 1976, Mediator* était un traitement adjuvant des diabétiques en surpoids qui a été largement prescrit comme coupe-faim. Il a été retiré du marché en novembre 2009 en raison d'une efficacité modeste et d'un risque de valvulopathie. Des études épidémiologiques ont estimé entre 500 et le 2.000 le nombre de décès qui lui seraient attribuables.

Le livre du Dr Irène Frachon du CHU de Brest, des documents révélés par les médias puis l'enquête de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) ont notamment mis en cause le fonctionnement de l'Afssaps, pointant la question des conflits d'intérêts.

"Les événements sanitaires préoccupants de l'actualité conduisent certains à jeter un opprobre définitif sur l'institution de l'Afssaps, sans distinction ni discernement, atteignant ainsi tous ses membres, personnel, évaluateurs internes et experts externes, sans qu'aucune voix ne se fasse entendre en réponse", déplorent les signataires. "Nous sommes tous montrés du doigt en cette période de crise où les informations diffusées sont parfois incomplètes".

Les experts veulent donc se défendre aujourd'hui car, écrivent-ils, "le silence observé conforte l'opinion publique dans la conviction que toutes les accusations formulées (...) sont légitimes, et que tous les individus impliqués dans la sécurité sanitaire doivent être considérés comme malhonnêtes, voire criminels, au mieux totalement incompétents (...)". En outre, "l'opinion publique ne doit pas ignorer non plus que les experts continuent cependant à travailler, la démission n'étant pas acceptable pour des acteurs militants de la santé publique". Ils demandent que leur travail soit "pris en considération" et qu'"on [leur] accorde la sérénité et la confiance indispensables à l'exercice de [leur] mission".

Les experts externes apportent à l'Afssaps "un large spectre de compétences" car médecins, pharmaciens, enseignants chercheurs, en milieu hospitalier ou en ville, ils sont en contact régulier avec les besoins des patients alors que ce travail "demande un investissement important et ne leur apporte aucun avantage direct dans leur carrière". Ils rappellent en outre qu'ils sont tenus de fournir une déclaration d'intérêt et soulignent que le secteur de la santé est le plus en avance en la matière. "Nous avons tous vérifié que nos déclarations d'intérêts étaient à jour et aucun de nous n'a de conflit majeur avec Servier", précise Marie-Claude Bongrand.

"Manifester notre soutien"

Il s'agit aussi d'"exprimer notre respect et manifester notre soutien aux président et vice-président de la commission d'AMM qui doivent être prochainement auditionnés par les missions parlementaires sur Mediator*". Le Pr Jean-François Bergmann de l'hôpital Lariboisière à Paris (AP-HP), premier vice-président de cette commission, doit être entendu jeudi matin par la mission de l'Assemblée nationale. Il n'y a pas encore d'audition prévue pour le second vice-président, Véronique Andrieu, maître de conférence au laboratoire de pharmacie galénique industrielle et cosmétologie de la faculté de pharmacie de Marseille, ni pour le Pr Daniel Vittecoq de l'hôpital Paul Brousse à Villejuif (Val-de-Marne, AP-HP), président de cette commission.

Les rédacteurs de la lettre souhaitent également la diffuser auprès des autres experts externes de l'Afssaps pour recueillir des signatures supplémentaires. Ils mentionnent par ailleurs le désarroi des évaluateurs internes de l'Afssaps.

Selon le dernier bilan du dispositif de gestion des conflits d'intérêts rendu public par l'agence sur son site internet, 2.232 experts externes ont été nommés soit en qualité de membres des commissions, comités, groupes d'experts ou groupes de travail, soit en qualité d'experts auprès de ces instances. Parmi les 1.377 membres ayant un mandat en 2009, 99,5% ont rempli une déclaration d'intérêt et 28% ont déclaré n'avoir aucun lien.


Source : infirmiers.com