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Lettre à un(e) ami(e) – Une journée "pourrie" de libérale...

Publié le 08/08/2013
infirmière libérale voiture téléphone

infirmière libérale voiture téléphone

Nous vous avons sollicités à l’occasion de la Journée internationale de l’infirmière, le 12 mai, et vous nous avez répondu... Vos plumes se sont envolées... Votre imagination s’est déliée... Vos états d’âme se sont exprimés... Entre beaux et bons mots ou tristes maux, vos contributions toucheront ceux qui les recevront... Merci !

Entre le 10 et le 12 mai, nous avons publié les trois lettres qui nous ont le plus enthousiasmés à la rédaction. L'ensemble des lettres est désormais disponible sur un espace dédié. Voici l'une d'entre elles. Merci à tous pour vos contributions.

Lettre à un(e) ami(e) qui voudrait devenir infirmier(e)...

A quoi ressemble une journée pourrie quand on est infirmière à domicile ?

Être IDEL n'est pas tous les jours facile

C'est très simple, examinons ensemble les faits de plus près...

Cela commence généralement très tôt le matin. Tu as égaré tes clefs, quelque part on ne sait où. Bien sûr, il s'agit précisément du trousseau avec les clefs du cabinet, celle de ta voiture ainsi que des demeures de tes chers patients. En plus d'être énervant, c'est assez flippant sur le coup.
Ensuite, tu entames ta ronde chez l'imposante madame Michelin. Tu sues corps et âme pendant 20 minutes pour prélever un malheureux INR, et jusqu'au trait s'il vous plaît ! En bruit de fond, pour t’accompagner dans ta besogne, tu apprécieras la chaîne des clips en continu sur Direct 8. Justin Bieber résonnera le restant de la journée au fond de ton cortex. Madame Michelin t'achèvera d'un délicat : "Je suis à 100%, alors j'vois pas pourquoi j'dois payer !"

Ensuite, tu cherches pendant de longues minutes la maison de madame E. Dans la nuit noire, tu tournes en rond, tu fais des demis-tours, braques, contre-braques et rebraques, manquant de peu de faire le saut de l'ange dans le ravin. Tu te résignes à frapper à la porte d'une inconnue pour demander ton chemin. Elle est à moitié aimable et à moitié sourde. En définitive, elle ne comprend rien mais te tient malgré tout le crachoir pendant 5 looooongues minutes, te racontant ses misères... "J'ai eu 10 opérations en 2 ans, alors vous savez j'en ai bavé !"

Ton téléphone te harcèle en continu, et même que les gens ils te disent tous que leur prise de sang est urgente. "Urgente m'entendez ?! Même que c'est le docteur qui l'a dit !" Et puis il y a madame Michu qui te dit qu'il est tout de même 8 heures 20, alors que tu avais dit 8 heures !

Tu te pointes chez monsieur Jevisdansundépotoiretjaimeça pour faire son pilulier. Cette histoire sent le roussi dès le début, rien qu'à voir la tonne de sachets plastiques gisant au fond du placard. Impossible de remettre la main sur l'ordonnance... Tu l'avais pourtant soigneusement rangée la dernière fois. Une fois dénichée, tu réalises que tu n'as plus de Zopiclone, et qu'il va donc falloir le faire renouveler et repasser... C'est pénible.

Puis tu vas chez madame Piaf résidant à Trouperdudufinfondelacampagne pour son intra-musculaire trimestrielle de vitamine B12. Toc-toc-toc ! Personne. Tu lui passes un coup de fil : madame fait ses emplettes à la boulangerie mais arrive dans 5 p'tites minutes, à peine... Connaissant l'oiseau, madame Piaf prendra certainement le temps de jacasser encore longuement avec le voisinage environnant sur le chemin du retour.

Continuant ton bonhomme de chemin, tu enclenches la marche arrière, oubliant la présence discrète d'un poteau électrique. Forcément, le pare-choc et le phare arrière apprécient moyennement. Derrière toi des vestiges de bris de glace et de plastique. Tu sais maintenant à quoi sera destinée ta si précieuse pause déjeuner. "Allo m'sieur le garagiste, c'est pour un devis..."

Tu te faufiles dans la tanière de madame Deschiens. Tu n'as pas envie de sentir à nouveau ce subtil mélange d'odeur poisseuse et de tabac froid qui vient violemment te piquer le nez. Tu manques de peu de marcher dans une déjection canine à l'entrée. Dans le coin de la pièce, 3 caniches aboyeurs enfermés dans une cage te fracassent les tympans. Au milieu de ce vacarme, madame Deschiens te martèle dix fois que sa prochaine prise de sang est prévue pour le 15 de la semaine prochaine. "Vous notez bien hein ? Vous n'oublierez pas hein ? Vous voulez pas que j'vous appelle la veille pour vous r'dire ?" Si si envoyez-moi un recommandé même...

Tout en donnant les traitements à Germaine, tu discutes un peu. Elle dit ne pas se sentir très bien. Tu creuses un peu et tentes un interrogatoire : "Mais vous avez mal où Germaine ? Bah un peu partout ! Depuis quand ? Depuis l'aut' matin !" C'est pas gagné... Après dix minutes d'enquête infructueuse, prête à décoller, c'est la main posée sur la poignée de porte que tu entends un suppliant : "Vous pourriez pas me mettre le bassin ?"

Tu viens de terminer de prélever le bilan de madame D. En recapuchonnant maladroitement l'aiguille, tu te piques. Pas que ça fasse mal non, mais vous m'aurez compris, on n'est jamais tranquille ensuite...

Vient la toilette de monsieur T. Son épouse ne t'adresse jamais la parole, sauf aujourd'hui où elle te dit de but en blanc, sans même te regarder : "Vous l'avez mal rasé hier !"

Ensuite sur la route du retour, madame D t'appelle pour te hurler dix fois que tu as oublié de passer pour son pansement. C'est pas faux !

De retour chez toi, tu retrouves la table de la cuisine jonchée de miettes, au milieu de laquelle trône le bol sale du matin de petit homme. Mmmmm... je sens qu'il y en a un qui va prendre cher...

P.S : heureusement, c'est pas tous les jours comme ça !

Anerick

 Elevez la voix, prenez de la hauteur, faites-vous connaître - et reconnaître - partagez et profitez de cette journée internationale des infirmières du 12 mai 2013 qui vous est dédiée pour exister plus encore.

Bernadette FABREGAS Rédactrice en chef Infirmiers.com bernadette.fabregas@infirmiers.com


Source : infirmiers.com