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Le directeur des soins, pierre angulaire de la réforme territoriale

Publié le 01/08/2016
Stéphane Michaud

Stéphane Michaud

A quelques semaines des 14èmes Journées nationales des Directeurs des soins qui se dérouleront fin septembre 2016, nous avons rencontré le Président de l’Association Française des Directeurs des Soins (AFDS) pour une longue interview. Le contenu de ces journées, la fonction de Directeur des soins et l’attractivité de ce métier pour les cadres de santé sont parmi les nombreux thèmes que nous avons abordés lors de cet entretien.

Cadredesante.com : Quel est l’historique de l’Association Française des Directeurs des Soins (AFDS) ?

Stéphane Michaud, président de l'Association Française des Directeurs des Soins évoque les thématiques qui seront abordées lors des 14èmes Journées nationales des Directeurs des soins.

Stéphane Michaud : Cette association a été créée il y a 43 ans, elle est donc antérieure à la publication du décret officialisant la fonction d’infirmier général dans les hôpitaux. Peuvent y adhérer aujourd’hui les professionnels ayant satisfait au cycle de formation de Directeur des soins (DS) dispensé par l’École de Hautes Études en Santé Publique (EHESP), ou, sur avis du Conseil d’administration, ceux qui projettent de la suivre et s’inscrivent au concours. L’association compte actuellement 410 adhérents, soit plus de la moitié des DS en activité au sein des CHU, des CH, mais aussi des Instituts de formation ainsi que les Conseillers techniques auprès des ARS.

Aujourd’hui, nous sommes sollicités par les tutelles pour participer aux groupes de travail

CDS.com : Quels sont les objectifs suivis par l’AFDS ?

S.M. : Il s’agit en premier lieu de promouvoir cette fonction auprès des pouvoirs publics, auprès des acteurs sanitaires et médico-sociaux, des usagers et des autres professionnels de santé, notamment les cadres qui souhaiteraient une évolution de carrière. Nous travaillons ainsi en concertation avec le Ministère, la Haute Autorité de Santé (HAS) ou la Fédération Hospitalière de France (FHF) pour négocier, au sein de groupes de travail dédiés, une juste reconnaissance de cette fonction. Il y a quelques années, nous demandions à être reçus par les tutelles pour apporter notre expertise dans l’organisation de la prévention, de la prise en charge des patients ou lorsque la défense de nos droits devait être argumentée. Aujourd’hui nous sommes sollicités pour faire partie de leurs groupes de travail, ce qui est déjà, en soi, une avancée significative.

CDS.com : Quelles sont les thématiques sur lesquelles vous travaillez actuellement ?

S.M. : Sans surprise, ce sont les Groupements Hospitaliers de Territoire (GHT) qui sont au centre des discussions, avec un travail approfondi sur les projets de décrets relatifs au Projet de soins ou à la Commission des soins. L’AFDS a été la seule à se manifester, au sein de la communauté médicale et paramédicale, pour essayer d’influer sur les décisions à venir. Mais je dois dire que si les DS sont présents lors des négociations, les cadres y sont aussi puisque nous les représentons de facto. Nous avons d’ailleurs initié, depuis quatre ans que je suis à la Présidence de l’AFDS, un projet de partenariat avec des associations comme l’ANCIM afin de montrer notre volonté d’ouverture et de faire participer les cadres à nos travaux. Nous ouvrons nos débats également plus largement vers la FHF, l’association des DRH (ADRHESS), des Directeurs d’hôpitaux (ADH), mais aussi des Présidents de Commissions de CME.

Nos Journées d’études sont ouvertes également aux cadres de santé

CDS.com : Vous réalisez des actions de formation également ?

S.M. : Tout à fait, et c’est le but des Journées nationales d’études des Directeurs des soins que nous organisons chaque année. Les prochaines se tiendront du 28 au 30 septembre 2016 à Joué-les-Tours et seront ouvertes également aux cadres et cadres supérieurs de santé, comme les deux dernières éditions, mais aussi aux Directeurs du secteur médico-social et aux DH. Cet événement existe depuis 40 ans et attire de plus en plus de congressistes, avec quelques 460 inscrits l’année dernière. Le thème principal sera évidemment la territorialité mais ne tournera pas uniquement autour des GHT. Il s’agira de le traiter sous l’angle de la démocratie sanitaire, avec des intervenants extérieurs au monde de la santé avec notamment Michel DUPUIS, philosophe et professeur à l’Université catholique de Louvain (UCL) en Belgique ou Philippe GABILLIET, professeur de leadership, ESCP Europe.

CDS.com : Quelles seront les autres thématiques phares développées lors de ces trois jours de formation ?

S.M. : Nous organisons, le deuxième jour, des ateliers traitant de l’éthique dans la pratique managériale, au cours desquels nous parlerons de confiance, d’erreur, d’évaluation de pratiques professionnelles et de sécurité des soins. Cette deuxième journée sera marquée également par un atelier sur le parcours de professionnalisation des cadres de santé. La troisième journée sera plus axée sur l’exercice professionnel des Directeurs des soins dans un contexte de réformes multiples de l’environnement sanitaire marquées principalement par l’avènement des GHT. Quelques craintes sont formulées ça et là quant aux suites de la mise en œuvre des GHT, qui n’est pas une fusion d’établissements. Ces craintes ne sont pas réelles tant que l’on n’en sait pas plus sur les nouvelles configurations mises en place au sein de ces GHT.

Nous proposons des pistes de réflexion innovantes dans le cadre des GHT

CDS.com : Comment l’AFDS appréhende-t-elle cette situation ?

S.M. : Nous restons vigilants mais nous croyons plus en une mutualisation des compétences plutôt qu’à des suppressions de postes généralisées. Au sein des Instituts de formation également, lesquels devraient se regrouper au niveau régional comme l’indique le décret, la situation reste floue quant au devenir des DS gestionnaires de ces instituts. Nous proposons d’ailleurs des pistes de réflexion innovantes quant aux nouveaux modes de management qui pourraient se faire jour, par une représentation au sein de trois groupes de travail traitant respectivement de la Commission des soins de territoire et du projet de soins de territoire, de la nouvelle fiche de poste des DS, ainsi que de la réingénierie des métiers. Je devrais d’ailleurs être reçu au Ministère fin août pour présenter les avancées issues des trois groupes de travail afin d’être force de propositions et apporter nos idées.

CDS.com : De nombreux postes de DS sont à pourvoir dans les établissements de santé. Quels sont les freins à l’attractivité de cette profession pour les cadres de santé ?

S.M. : Je vois trois ou quatre raisons à ce manque d’attractivité. La principale tient au fait que cette fonction représente une 3ème partie de carrière pour des professionnels de santé qui sont déjà installés dans la vie et rechignent à repartir de chez eux pendant un an à Rennes pour étudier puis à prendre un poste dans une autre région que leur région d’origine. C’est un facteur important bien que les périodes de stages son propices à un rapprochement du domicile. Ensuite, la grille indiciaire est peu différente des cadres supérieurs par exemple, c’est la raison pour laquelle nous travaillons pour l’aligner sur celle des DH. Nous avons connu dernièrement, d’autre part, un moment de doute sur les missions des DS, notamment lorsqu’ont été créés les pôles de soins qui donnaient plus de prérogatives aux CSS. Mais je vous certifie qu’il n’en est rien et que les DS prennent une place significative dans l’organisation des hôpitaux, par une écoute réelle quant aux problématiques paramédicales et par un dialogue actif avec les Présidents de CME.

Il y a de belles choses à construire dans la phase actuelle de transition

CDS.com : Le DS doit également trouver sa place dans le nouveau mille-feuille stratégique des hôpitaux…

S.M. : Effectivement, le DS doit se saisir de toutes les problématiques, notamment de qualité. Le cœur de métier n’est, pour moi, pas régi par les seules ressources humaines, mais surtout par l’organisation de la prise en charge des patients qui comprend un volet important sur la gestion des risques et la qualité. Il est dès lors primordial aujourd’hui de définir qui fait quoi : nous avons besoin des ingénieurs qualité dans les hôpitaux, pour leur expertise méthodologique et non pas pour définir les axes de prise en charge spécifiques, qui restent les prérogatives des DS et de la CME. Ce volet fait d’ailleurs partie de la fiche de poste réactualisée des Directeurs des soins, pour laquelle je reste très optimiste car il y a vraiment de belles choses à construire au cours de cette phase de transition.

Propos recueillis par Bruno Benque  Rédacteur en chefwww.cadredesante.com  bruno.benque@cadredesante.com


Source : infirmiers.com