Petite question par curiosité :
êtes-vous infirmier ?

Merci d'avoir répondu !

IDEL

La prise en charge des soins à domicile

Publié le 23/06/2010

Alternative à l’hospitalisation ou au placement en institution spécialisée, la prise en charge des soins à domicile est aujourd'hui effective pour un nombre croissant de pathologies comme les cancers, les maladies respiratoires, le diabète, la mucoviscidose ou de situations de dépendance comme le handicap... Faisons le tour des divers modes de prise en charge qui coexistent dans ce secteur comme l'hospitalisation à domicile, le maintien à domicile et les soins infirmiers ou médicaux.  

La prise en charge des soins à domicile fait l’objet d’un intérêt croissant de la part des français1. Bien qu'elle soit, selon une étude récente2, peu structurée dans notre pays, la prise en charge des soins à domicile est un secteur en fort développement3 qui a pesé 29 milliards d’euros pour l’année 2007, soit 28 % des dépenses totales allouées par l'État aux personnes atteintes de maladies chroniques et aux personnes âgées dépendantes. Ce développement des soins à domicile paraît lié à l’allongement de la durée de vie et à l'augmentation des pathologies chroniques lourdes.

De plus, la couverture des soins par l’Assurance-Maladie, les prestations d’aide à la prise en charge de la dépendance via le dispositif de l’APA (Allocation Personnalisée d'Autonomie) et les assurances dépendance contribuent à consolider le secteur. Il est également soutenu par un environnement politique favorable, Plan Cancer, Programme national de développement des soins palliatifs, passage à la tarification à l’activité, développement des services à la personne, augmentation des capacités d’accueil des structures de soins à domicile.

De plus, dans un contexte économique difficile, les soins à domicile sont moins coûteux que l'hospitalisation conventionnelle et sont donc une des solutions pour l'Etat à la maîtrise des dépenses de santé.

Les différents acteurs

Alors que les soins au domicile des patients étaient exercés par les médecins depuis les années 1800, la santé à domicile amorce en France un virage important dans les années 1950. Traduisant le concept américain de “home care”, quelques établissements hospitaliers et structures privées s'organisent alors pour proposer les premières places d'Hospitalisation à domicile (HAD) et assurent alors les premières prises en charge médico-sociales à domicile notamment du cancer. Parallèlement, l'activité libérale des soins à domicile est réglementée par l'arrêté du 31/12/1947 codifiant les actes pouvant être réalisés par les "auxiliaires médicaux" et remboursés par la Sécurité Sociale.

Aujourd'hui, la santé à domicile comprend plusieurs types d’intervention comme l'Hospitalisation à domicile (HAD), les soins à domicile (SAD) et le maintien à domicile (MAD). Elles se différencient notamment par rapport au degré de technicité et de médicalisation des actes pratiqués ainsi que par leurs statuts : établissements publics, associations à but non lucratif, personnels libéraux et structures privées. Ces dernières concurrencent d'ailleurs de plus en plus les structures associatives qui détenaient des positions fortes notamment dans l'HAD et l'assistance respiratoire à domicile.

Bien implantées dans l'aide au maintien à domicile (location/vente de matériel) les prestataires d'assistance médicale à domicile se positionnent aujourd'hui de plus en plus sur des prestations plus techniques et à plus forte valeur ajoutée pour eux comme : l'insuffisance respiratoire, la nutrition, les perfusions, l' insulinothérapie, la dialyse, etc. et se positionnent progressivement en tant que multispécialistes des soins à domicile.

A côté de ces acteurs principaux, des réseaux de soins interviennent également à domicile. Souvent de statut associatif, ils s'établissent grâce à la collaboration de professionnels de santé de disciplines différentes (médecins généralistes, médecins spécialistes, pharmaciens, infirmiers, kinésithérapeutes, mais aussi psychologues et travailleurs sociaux). Ces professionnels se concentrent sur la prise en charge de patients souffrant d’une pathologie ou victimes d’un problème médico-social spécifique.

Ils se coordonnent pour une prise en charge globale de leurs patients, en mettant l'accent sur la prévention. Les pathologies sont le plus souvent chroniques (asthme, diabète, hypertension artérielle, dépression…) ou lourdes (VIH, VHC, cancers). Il existe aussi des réseaux prévenant et prenant en charge l’alcoolisme, la toxicomanie ou l’aide aux populations en difficulté. Ils possèdent leur propre système de financement (à base de subventions essentiellement).

Les CLIC (Centre Local d’Information et de Coordination) sont des services sociaux et médico-sociaux qui ont des missions d’accueil, de conseil, d’orientation des personnes âgées et de leur entourage concernant la prise en charge des situations complexes qu’elles peuvent rencontrer à domicile, notamment celles liées à leur santé. Ces structures facilitent l'accès aux droits des personnes, promeut le travail en réseau entre les professionnels notamment les professions de santé, permet l’accompagnement à domicile et l’aménagement de l’habitat.

L’Hospitalisation à Domicile (HAD)

L’Hospitalisation à Domicile représente le niveau d’intervention médical le plus haut. Elle est préconisée pour les malades atteints de pathologies graves, aigües ou chroniques. Elle permet de délivrer des actes médicaux comparables à ceux pratiqués à l’hôpital. Les patients pris en charge, de tous âges, répondent à des situations cliniques très diverses et 30 % d’entre eux sont moyennement à fortement dépendants. Les soins palliatifs, de cancérologie et de périnatalité sont les principaux motifs d’admission des patients en HAD.

Les structures d'HAD emploient toutes les catégories de personnels que l'on retrouve dans les structures hospitalières. Travaillant étroitement avec les médecins libéraux, elles peuvent également solliciter des infirmières libérales auxquelles elles confient certains de leurs actes.

L'offre de soins en HAD est très disparate sur le territoire français, elle est surtout développée dans les zones urbaines. En 2006, 164 structures d’HAD ont offert près de 6 700 places (pour 3 900 en 2000) et assuré près de 85 000 séjours soit près de deux millions de journées d’hospitalisation4. Malgré son développement, l’offre d’HAD reste faible dans le système de soins. Toutefois, l’objectif gouvernemental est de proposer 15.000 places d’HAD pour fin 2010.

Les Soins à Domicile (SAD)

Les soins à domicile sont avant tout des soins infirmiers à domicile. Cette offre est assurée en France essentiellement par les infirmières libérales (pour 93 %)5. Présentes partout sur le territoire6, elles sont avant tout des infirmières de proximité, seules ou associées en cabinet, assurant la totalité des soins à domicile dédiés à cette profession. Le reste des actes rémunérés sont réalisés par des structures7 qui emploient des infirmières ou des aides-soignantes salariées.

Les soins infirmiers à domicile comportent

  • des actes qui contribuent au diagnostic infirmier, des actes médico délégués de première intention qui ne nécessitent pas d’hospitalisation (prélèvements pour examens biologiques, surveillance d’évolution de patients, conseil, suivi de maternité, vaccins, etc., et tous les actes médico-infirmiers quotidiens de première intention, etc.)
  • des actes qui permettent de traiter en ambulatoire les pathologies aiguës itératives (infectieuses, protocoles antibiothérapies simples ou complexes, pansements simples ou complexes, réhydratation, etc.)
  • le suivi de pathologies chroniques et l’éducation des patients et de leur entourage en ambulatoire leur permettant une socialisation correcte et une qualité de vie (diabète, HTA, pathologies relevant de la psychiatrie, pathologies vasculaires dégénératives, dermatologie, plaies chroniques, etc.)
  • le maintien et/ou retour à domicile des patients dépendants. La prise en charge à domicile des patients dépendants en coordination avec les intervenants de ville et le médecin traitant (prévention d’escarres, surveillance et veille clinique).
  • le retour à domicile de patients hospitalisés pour des pathologies aiguës ou des traitements chirurgicaux ainsi que des patients considérés en phase palliative.
  • le relais ambulatoire des cures de chimiothérapie anticancéreuses initiées en hospitalisation de jour (actes de haut niveau de technicité, surveillance de l’état clinique du patient, prévention des complications liées aux cytotoxiques, bilans nutritionnels, etc.) en lien avec les services d’oncologie et le médecin traitant.

Les Services de Soins Infirmiers à Domicile

Les SSIAD sont des Services de Soins Infirmiers à Domicile qui assurent, sur prescription médicale, aux personnes âgées de 60 ans et plus, malades ou dépendantes, aux personnes adultes de moins de 60 ans présentant un handicap et aux personnes de moins de 60 ans atteintes de maladies chroniques, certains soins infirmiers et d'hygiène générale.

Ils sont constitués d'au moins un infirmier coordonnateur pour assurer l’organisation des soins, d'aides-soignants qui assurent sous la responsabilité des infirmiers les soins de base et relationnels et les concours nécessaires à l’accomplissement des actes essentiels de la vie, d'aides médico-psychologiques et en tant que de besoin d’autres auxiliaires médicaux.
Le service de soins infirmiers à domicile peut passer convention avec des infirmiers libéraux qui sont alors associés aux interventions du service.

Les services de soins infirmiers à domicile ont pour mission de contribuer au soutien à domicile des personnes, notamment en prévenant, ou différant, l’entrée à l’hôpital ou dans un établissement d’hébergement et en raccourcissant certains séjours hospitaliers. Ils interviennent au domicile des patients ou dans les établissements non médicalisés prenant en charge des personnes âgées ou des personnes handicapées. On comptait, en 20078 , 2 285 structures de SSIAD sur le territoire français pour 93 534 places disponibles.

Le médecin généraliste

Le médecin généraliste, acteur de base du système de soins français, l'est aussi dans les soins à domicile. Impliqué dans tous les types de prise en charge comme l'HAD, les SAD ou les SSIAD, il en est le prescripteur principal. Il peut coordonner les soins autour d'une personne âgée ou d'un malade lourd résidant à domicile. Toutefois, ce rôle de coordination demande à être encore développé chez certains médecins traitants.

Quel avenir pour les soins à domicile en France ?

Le développement des soins à domicile en France concerne en premier lieu la prise en charge des personnes âgées dépendantes. C'est une problématique importante quand on sait que chaque année, l'espérance de vie s'accroît toujours un peu plus. Ainsi le nombre de nos concitoyens octogénaires va doubler dans les dix prochaines années pour passer à 4 millions en 2020.

Ce phénomène de vieillissement de la population s’accompagne d’une diminution des aidants naturels puisque d’après les projections démographiques de l’Insee9, le nombre de personnes de 50 à 79 ans, qui aujourd’hui constituent la majorité des aidants, devrait augmenter seulement que de 10 % environ entre 2000 et 2040. Le maintien à domicile des personnes âgées dépendantes nécessitant de trouver des solutions en matière de prise en charge, le gouvernement prévoit donc dans le cadre du « plan de solidarité grand âge » de développer l’offre de soins infirmiers à domicile de 40 % en cinq ans.

Parallèlement, certains experts10 recommandent l’affectation d’un responsable de la coordination des différents acteurs, la définition de protocoles de prise en charge à domicile, la diffusion des outils de partage d’information ou encore la mise en place de plateforme régionale pour réguler l’offre et la demande. Ils formulent une série de propositions pour assurer un modèle économique pérenne en promouvant les partenariats public-privé pour le domicile, dont les financements reposeraient sur un futur Fonds national dédié au domicile ou encore sur des enveloppes de types MIG (Mission d’Intérêt Général). Enfin, ils insistent par ailleurs sur une juste valorisation tarifaire des pratiques comme le suivi à distance, l’éducation thérapeutique ou la prévention.

Reste à savoir quel écho donneront les pouvoirs publics à ces propositions !

Notes

1 “Les Français et l’aide à domicile”, SOFRES, 25 juin 2001
2 Etude réalisée par Alcimed (2008/2009) avec le soutien de 3 associations de patients et 6 représentants des industries de santé. Etude diligentée  dans le cadre des dispositions relatives au 5ème risque, à la Loi de Finance de la Sécurité Sociale de 2010 (LFSS) et à la mise en place des Agences Régionales de Santé (ARS).
3 Les perspectives du marché français de l'assistance médicale à domicile -2008
4 PMSI HAD 2006 (ATIH) - Exploitation Drees-Irdes
5 Inspection générale des affaires sociales (2006) « Situation financière des centres de soins infirmiers » RM2006-176P site internet : lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/064000901/0000.pdf
6 Densité moyenne : 85 infirmières pour 100 000 habitants, mais forte hétérogénéité selon les départements : écart de 1 à 7. Source  http://www.fni.fr : « Place de l’IDEL dans le système de soins » 2007.
7 Ce sont en majorité des structures associatives à but non lucratif de types : SSIAD ou HAD.
8http://www.travail-solidarite.gouv.fr/IMG/pdf/SSIAD.pdf
9 Personnes âgées dépendantes et aidants potentiels : une projection à l’horizon 2040 – Etudes et résultats n° 160 - Février 2002 –DREES
10 Etude  Alcimed (2008/2009)

Sources

- http://www.travail-solidarite.gouv.fr/
- APF- CTN-LA/JF - Thème 4 – Fiche pratique : les soins infirmiers à domicile – Mars 2009
- http://www.eurasante.com/

 

Pascal MACREZ
Consultant-formateur, association ALTELIS, Brétigny sur orge.
Rédacteur infirmiers.com
pascal.macrez@orange.fr


Source : infirmiers.com