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La nouvelle carrière infirmière. Réflexions d’une infirmière d'origine Espagnole sur l'avenir de sa profession

Publié le 10/04/2009

Ce n’est plus une question de volonté politique, tout est mis en œuvre pour le développement de carrière des infirmiers dans le territoire européen, la porte aux changements s'ouvre dans l'Europe. Le gouvernement espagnol a fait un pas en avant pour ses infirmiers en approuvant la nouvelle formation en Soins Infirmiers selon les termes décrits dans la Déclaration de Bologne (précédée par la Déclaration de la Sorbonne).

Cent ans plus tard, dans ce moment où la profession a le pouvoir de prendre le développement de sa carrière en mains, il ne faut pas laisser échapper l’opportunité d’adapter la formation des nouveaux professionnels aux temps courants, aux nouvelles technologies, à l’ouverture des limites imposées par ceux qui ont réglementé la formation infirmière au long du dernier siècle. De la même manière on ne peut pas négliger l’adaptation au nouveau milieu de travail des agents déjà en fonctions.

Le moment peut être considéré comme historique, puisque c’est la reconnaissance des capacités ainsi que des responsabilités propres à la profession qui sont en jeu. Enfin, les portes de l’enseignement supérieur vont être ouvertes pour le corps de métier le plus présent dans les hôpitaux.

C’est le moment de prendre de nouvelles responsabilités personnelles et de métier qui pendant si longtemps nous ont été refusées, faute d’une formation généraliste puissante et développée sur des termes propres à la profession, mais toujours par le biais de la médecine.

Enfin, l’opportunité nous est offerte de différencier une fois pour toutes, la formation d’infirmière comme une entité à part entière et pas comme une filière de la médecine. La profession devrait faire de manière à abolir le temps où la formation dans les écoles d’infirmières était gérée comme la filière pauvre de la médecine ; presque comme une médecine de deuxième classe où certains étudiants de Médecine peuvent apprendre des expertises qui ne le correspondent pas, d’accord à leurs plans d’études ; pareil pour des médecins ressortissants de pays étrangers avec des études de médecine non reconnus par leurs « confrères » français.

De même, il faut revoir notre relation avec les autres membres de l’équipe des soins, principalement vis-à-vis des Aides Soignant(e)s (AS). Dans le même esprit d’acquisition de nouvelles responsabilités, il faudrait pouvoir déléguer aux AS des tâches ponctuelles, voir une cession d’une partie des rôles propres à l’infirmière (les soins de confort, le contrôle des constantes avec un appareillage non invasive, pourquoi pas ?).

C’est un temps de changements dans la profession, dans le milieu de travail, dans la formation des futurs professionnels, dans la relation avec les autres membres des équipes de soins. Mais aussi de libération, de reconnaissance et de responsabilités personnelles et professionnelles.

Il faut en même temps gérer tous les changements qui s’annoncent proches, l’adaptation au nouveau milieu de travail, l’adaptation aux nouvelles responsabilités professionnelles, réajustement de la formation reçue par les nouveaux arrivants dans les nouvelles Ecoles d’Infirmières, adaptation de la formation des professionnels en poste.

De même, la formation des cadres de Santé devrait être conçue de façon à s’adapter à tous les changements mentionnés ci-dessus, puisque un avancement dans la formation des infirmiers généralistes pourrait rentrer en conflit avec les attributions actuelles des Cadres de Santé.

Qu’on le veuille ou pas, la formation des infirmiers doit être révisée pour une meilleure adéquation au temps et au milieu ; la question qu’il faut se poser est : vers où l’on veut que la profession aille ? Le chemin vers un développement des responsabilités, techniques, actes, expansion de carrière… passe obligatoirement par un avancement dans le niveau d’études. Mais surtout par une reconnaissance des compétences, reconnaissance par l’Etat, l’établissement, la hiérarchie, les autres acteurs de la santé, et par les usagers de nos services.

Les politiques actuelles attirent plus ou moins de craintes parmi le personnel parce qu’au moment d’entreprendre des actions concrètes sur le terrain, leur avis n’a pas été demandé, alors que ce sont bien les agents sur le terrain qui doivent appliquer les normes dictées par des gestionnaires. De même, les politiques de soins sont reçues par le personnel comme étant assez lointaines de leur réalité de travail de tous les jours.

Les métiers dans le sein de l’équipe de soins sont avant tout des métiers vocationnels, et l’origine variée des agents devrait enrichir un échange de cultures, connaissances et savoir-faire qui ne peut qu’être positif pour le développement des politiques de soins et envers l’attention dédiée aux usagers des services de santé.

La politique ici préconisée, n’empêche pas le développement des pôles au sein des centres ; elle ne devrait pas non plus les remplacer, il faut plutôt la voir comme étant un pas vers le développement complet des dits pôles à travers l’implication des agents dans la prise des décisions dans le respect du Projet d’Etablissement vers une meilleure attention aux usagers.

La difficulté d’application des politiques dépend en grande manière de la formation reçue dans les différentes écoles de soins et pour les différents métiers. Un Infirmier Diplômé d’Etat (IDE, où qu’il ait été diplômé) n’a pas forcement la même perception de la hiérarchie qu’un AS (même issu du même centre de formation) ou qu’un autre professionnel dans l’équipe.

La politique de soins est en étroite corrélation avec la hiérarchie, car c’est bien celle-ci le lien d’union entre les actions entreprises et les buts recherchés. Les agents dans les équipes de soins sont les maillons exécuteurs d’une politique étudiée et décidée ailleurs par des professionnels plus proches encore de leur encadrement que d’eux mêmes.

La motivation et l’intérêt étant des états d’esprit très subjectifs, le but de cette proposition serait de trouver le moyen de faire ressentir aux agents ces changements (évolution, nouvelles responsabilités) comme partie intégrante de leurs fonctions et imbriquées dans leur développement de carrière.

La nécessité de connaitre les désirs du personnel est justifiée pour les actions à entreprendre en suite en rapport avec le travail à fournir par le même personnel, tout dans le cadre du projet d’établissement et en harmonie avec celui-ci.

Puisque la politique de soins marque, entre autres, la façon d’appliquer les différents savoir-faire des divers métiers dans l’équipe, il faudrait tenir compte des attentes, désirs, compétences du personnel de qui l’on attend l’application des normes, et la réalisation des techniques et autres pour les quelles ils n’ont pas participé à leur rédaction.

La « spécialisation » des soignantes vers une fonction d’encadrement (formatrice comme soignante) ne devrait en aucun cas prendre toute la place des soignants à l’heure de porter jugement sur leurs fonctions, techniques, savoir-faire, développement de carrière et encore plus de sujets.

Virginie Henderson considérait que la seule fonction de l’infirmier était d’« aider l’individu, sain ou malade à récupérer la santé (ou vers une mort tranquille), que celui-ci réaliserait sans aide s’il avait la force, volonté ou connaissance nécessaires, de manière à lui faciliter l’indépendance le plus tôt possible ». Mais elle avait aussi prévue une adaptation des fonctions et responsabilités tout au long du temps.

La formation que les soignants suivent pour devenir partie de l’encadrement établie une différence primordiale par rapport aux agents toujours soignants. Un éloignement des soins et dans la relation avec les usagers des services nous empêche également de voir la réalité perçue par ceux-ci. Les soignants qui ont volontairement choisi de rester en première ligne se voient souvent privés de participer à la gestion directe de leurs quotidiens, il ne leur reste que l’accès à l’application des injonctions reçues. C’est un problème résolu en partie avec l’apparition des pôles, où le soignant peut commencer à participer à la gestion directe des soins ; mais encore une fois, même la participation des soignants est réglementée sans leur avis.

Le soignant se retrouve alors dans un carrefour d’un très faible équilibre entre les actions à entreprendre et la réalité du terrain de travail journalier, les demandes de la hiérarchie et les besoins ressentis des usagers. La hiérarchie demande une implication mal perçue par les agents à cause de l’ignorance des buts. Cette ignorance parfois parait comme le but recherché dans le ressenti des agents, qui voyant creuser une tranchée de plus en plus large entre eux et leur encadrement aboutissent à une perte de motivation.

En vue des changements dans l’organisation des hôpitaux, on doit réfléchir à la façon dont une nouvelle dimension de l’infirmerie pourrait rentrer dans les nouveaux organigrammes des établissements.

Enfin, un développement de carrière passe par une nouvelle formation, mais aussi, par un recyclage du personnel en fonction, de manière à pouvoir profiter de tous les outils à notre disposition dans l’hôpital de demain, dans lequel on se trouve déjà.

Les infirmiers se trouvent moralement obligés de procurer aux générations à venir une profession qui corresponde aux temps courants, dans le cadre du nouveau hôpital, avec un maximum d’autonomie et responsabilité et une position dans l’équipe de soins renforcée

Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions

Nadia June - Cadre de santé

 


Source : infirmiers.com