Suite à la Grande Conférence de la Santé (GCS) , conduite par le Premier ministre et la ministre de la Santé le 11 février dernier, une feuille de route a été établie pour permettre d’innover dans la constitution des études médicales et paramédicales, et rendre l’exercice des professionnels plus attractif pour les futurs étudiants (1). Qu'en est-il pour la réingénierie attendue des infirmièeres puéricultrices ?
De concert avec la Loi de santé , c’est donc l’avenir des professions paramédicales qui se joue. Les infirmières puéricultrices sont mobilisées pour voir enfin aboutir la réingénierie de la formation et réorganiser son accès. Aucun groupe de travail en la matière n’est en cours au ministère de la Santé que ce soit en termes de formation ou d’exercice professionnel. La reconnaissance de la spécialité IPDE et sa défense sont donc primordiales.
Pour rappel, le programme de formation actuel des infirmières puéricultrices date de… plus de 30 ans ! En effet, aucune révision profonde n’a été réalisée depuis 1983.
Depuis 2008, l’Association nationale des puéricultrices diplômées et des étudiantes (ANPDE) et le Comité d'Entente des Ecoles Préparant aux Métiers de l'Enfance (CEEPAME) ont activement participé aux travaux de réingénierie du diplôme d’Etat de puéricultrice, organisés par la DGOS. Si les référentiels d’activités et de compétences ont été validés début 2009, aucune suite n’a été donnée à ces travaux. Les instituts de formation ont bien sûr adapté ce programme aux connaissances actuelles et aux missions des infirmières puéricultrices, mais sont fortement limités par ce cadre.
Quelle réalité aujourd'hui du métier de puéricultrice ?
Dans ce contexte, il est intéressant de recueillir les propos d’une personne impliquée dans la formation pour connaître son point de vue sur les changements qui s’opèrent actuellement et sur le métier d’infirmière puéricultrice aujourd’hui. Fabienne Lebigre est cadre de santé formatrice depuis 10 ans. Elle a auparavant exercé en service hospitalier et nous fait part de son regard sur la profession.
Quel est pour vous la plusâvalue de l’infirmière puéricultrice (IPDE), quel que soit son secteur d’exercice ?
L’infirmière puéricultrice dans une situation de soin ne s’intéresse pas seulement à ce qui est le plus manifeste. Elle essaie de comprendre ce qui se joue de façon plus implicite dans ce que vit l’enfant et sa famille. Elle est capable d’observer et de décoder des comportements, de donner du sens afin de créer, d’ajuster son approche, son soin à chaque enfant, chaque famille. » « Cela exige d’entretenir un réel engagement envers l’enfant dans sa construction personnelle ».
De façon personnelle, que voulez-vous transmettre aux étudiants IPDE au cours de leur formation ?
Je souhaite leur transmettre la passion du métier mais aussi l’exigence visâàâvis de soi, car on engage sa personne. Il faut être en capacité de réfléchir sur ses représentations, de faire évoluer son regard sur l’enfant, les parents, ses collègues, d’adopter une posture réflexive. J’essaie également d’éveiller une curiosité professionnelle pour toujours évoluer dans son métier. La capacité à se positionner, argumenter, négocier de façon constructive dans l’intérêt de l’enfant est primordiale. Je souhaite donc que les étudiants ait acquis à la suite de leur formation une capacité à observer, décoder, donner du sens en se décentrant de leurs propres références. Sur le plan technique, il est nécessaire d’avoir le souci d’une rigueur (et non d’une rigidité) et d’une qualité dans des soins techniques maitrisés.
Que pensezâvous du programme de formation actuel visâàâvis des compétences nécessaires à ce jour pour exercer le métier d’IPDE ?
Le programme est à actualiser et ajuster au regard de l’évolution des problématiques actuelles de santé et psychoâsociales. Toutefois, le préambule (NDLR : du référentiel de formation) reste suffisamment large pour que l’on puisse, du fait des délais interminables d’une future réingénierie, construire des pédagogies et des contenus en lien avec ces nouvelles problématiques, avec une certaine marge d’initiative, tout en restant ans le cadre. Mais surtout, la durée de formation est trop courte pour développer et approfondir réellement les différentes dimensions et connaissances liées à la profession. Comment en 650h de temps école, laisser suffisamment de temps de travail personnel aux étudiants pour mieux intégrer les apports, approfondir leurs recherches, mûrir leur réflexion et positionnement ?
Dans le contexte actuel de réforme des formations médicales et paramédicales (à travers la Grande Conférence de Santé notamment), quelles adaptations vous semblent prioritaires pour la formation IPDE ?
Il faut allonger nécessairement le temps des études, de façon à pouvoir approfondir les différents aspects de la formation et du métier d’autant que le profil des étudiants change : beaucoup ont peu ou pas d’expérience professionnelle. Cependant, il faudra être vigilant, notamment, au coût de celleâci et à sa prise en charge, car ce peut être un réel obstacle pour les futurs candidats. Je pense également qu’il faut développer la culture de l’interdisciplinarité (avec les sagesâfemmes, les internes de pédiatrie/néonatalogie) dans des travaux ou réflexion communes (TD, tables rondes…) au cours de la formation. Du temps supplémentaire de formation permettra enfin d’initier à la recherche clinique infirmière en tant que telle, et d’introduire davantage de travaux de réflexion par rapport à des activités spécifiques de l’infirmière puéricultrice comme les consultations de puéricultrice en service de PMI ou les fonctions de direction d’EAJE.
A travers le regard de Fabienne Lebigre, il apparait de façon plus concrète la nécessité de finaliser la réingénierie de cette spécialité. Espérons que la Grande Conférence de la Santé et la feuille de route tracée par le Premier Ministre aboutissent à une vraie prise en compte des réalités du terrain et des difficultés rencontrées par les étudiants.
Note
Charles EURY Infirmier puériculteur
Administrateur, Commission étudiante, Association nationale des puéricultrices(teurs) diplômés et des étudiants (A.N.P.D.E.)
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