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Cancer et crise sanitaire : les RCFr 2021 reviennent sur les réponses possibles

Publié le 25/11/2021

Renforcement du maintien à domicile et de la coopération interprofessionnelle, continuité des soins…, comment le champ de la prise en charge des cancers s’est-il adapté aux contraintes et obstacles imposés par la crise sanitaire et quels enseignements en a-t-il tirés ? Le point lors des Rencontres de la cancérologie française.

Malgré ses impacts négatifs, la crise Covid a permis de repenser certains modes d'organisations et certaines pratiques dans la prise en charge des cancers.

S’étant déroulées les 23 et 24 novembre 2021, les Rencontres de la cancérologie française (RCFr2021), dont Infirmiers.com est partenaire, ont inscrit la lutte contre le cancer en période de Covid-19 au cœur de leur programmation et consacré leur seconde séance plénière à l’offre de soin disponible au cours de la période pour les patients atteints de cancer. L’occasion de revenir sur les impacts alarmants provoqués par la crise sanitaire, mais aussi de faire le point sur les transformations organisationnelles, collaboratives, d’exercice… positives qu’elle a également pu induire.

Retards de prise en charge et perte de chances

La crise sanitaire et son cortège de restrictions (confinement, limitation des déplacements…) ont entraîné des retards de dépistage et de prise en charge ainsi que des ruptures dans la continuité des soins. En cause d’abord, l’accès rendu difficile aux professionnels et établissements de santé, qui a grandement découragé les patients, notamment lors du premier confinement - Au tout début de la pandémie, l’enjeu était la continuité des soins car l'accès à l'hôpital et aux médecins était difficile, souligne ainsi Gilles Bonnefond, précédent président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). À l’arrivée, note Jean-Yves Blay, le président d’Unicancer, une diminution de 6,8 % des patients nouvellement diagnostiqués a été constatée sur les 7 premiers mois de 2020 par rapport à 2019, ce qui représenterait 3 862 patients et concernerait surtout des cancers du sein, de la prostate et métastatiques. Ces hypothèses sont d’ailleurs optimistes, déplore-t-il. Dans certains secteurs, les chiffres sont beaucoup plus sévères. Parallèlement aux dépistages, la prise en charge s’est heurtée aux déprogrammations d’opérations décidées par les établissements afin de libérer du personnel pour absorber les flux des malades du Covid-19. Autant de retards – donc de perte de chances – qu’il faut désormais résorber, alors que de nouveaux diagnostiqués intègrent toujours les parcours de soin. Nous sommes face à un problème complexe ; nous ne pouvons pas multiplier les endoscopies et les arrivées au bloc, s’inquiète Jean-Philippe Metges, oncologue digestif et co-Président des RCFr21.

Une collaboration interprofessionnelle renforcée

Pour autant, la crise a permis d’imaginer de nouvelles formes d’organisation et de renforcer celles existantes, au premier rang desquelles la collaboration entre les différentes professions de santé et entre la ville et l’hôpital. Sophie Beaupère, la déléguée générale d’Unicancer, souligne ainsi la grande volonté de tous les acteurs à assurer la continuité du dépistage des cancers et des soins. L’un des points positifs pendant la crise est la formidable solidarité entre les acteurs du système de santé, soutenus par les ARS, ajoute-t-elle. Un constat que partage Marie-Ève Rougé-Bugat, médecin généraliste à Toulouse, qui affirme de son côté que la crise Covid a entraîné une modification de l’organisation des soignants exerçant en ville sur les territoires. Nous travaillons beaucoup avec les libéraux dans le cadre des CPTS et des maisons de santé, confirme-t-elle, ajoutant avoir bénéficié d’une grande cohésion établie entre les professionnels de santé. Christelle Galvez, directrice des soins au Centre Léon Bérard (Lyon), elle, fait valoir que l’absence de connaissances sur le virus a eu de positif de permettre de retrouver les binômes médicaux/soignants, notamment car la prise en charge des patients et les contraintes associées (manque de protections contre le Covid-19, absence de protocoles définis…) ont nécessité des échanges constants entre tous les acteurs de la santé. Les infirmiers libéraux sont seuls dans leur cabinet et ne bénéficient pas de temps de formation. Il y avait un manque d'informations de leur côté, ce qui les mettait en difficulté, relève celle qui a récemment été nominée par le Collectif Femmes de Santé pour son initiative portant sur la formation des libéraux à la prise en charge de l’immunothérapie à domicile . Il a donc fallu les former. Cela a permis de créer du lien entre les professionnels de ville et de l’hôpital.

Le domicile a été le poumon des centres de lutte contre le cancer

La crise sanitaire, accélérateur de transformations organisationnelles

Autre enseignement à tirer de la crise Covid, corrélé à ce lien entre la ville et l’hôpital : le développement de la prise en charge des patients cancéreux à domicile, appelée à s’inscrire dans la continuité, défend Sophie Beaupère. Face aux difficultés à assurer la continuité des parcours de soin à l’hôpital, le maintien à domicile a en effet représenté la solution la plus sécurisée, tout en permettant de soulager la tension dans les établissements de santé. Le domicile a été le poumon des centres de lutte contre le cancer, témoigne ainsi Christelle Galvez. Plus largement, le milieu hospitalier n’aura pas les capacités, ni en lits ni en personnels, pour assurer toutes les prises en charge de patients atteints de cancer, rendant l’élargissement du recours aux soins à domicile inévitable.

Et si la crise a provoqué un certain nombre de bouleversements et mis en lumière les failles du système de santé, elle a également été source d’innovations et de transformations organisationnelles positives. Sophie Beaupère et Marie-Ève Rougé-Bugat se félicitent ainsi de l’essor de la téléconsultation, qui permet notamment pour les généralistes d’évaluer les différentes maladies et de planifier des consultations physiques en cas de situations aigües, et dont les centres de lutte contre le cancer ont également été amenés à s’emparer. Le nombre de téléconsultations dans les CLCC était auparavant confidentiel, précise Sophie Beaupère. Nous sommes passés d’une centaine au niveau national à 50 000 à l’été 2020. Xavier Troussard, onco-hématologue au CHU de Caen et président de FHF Cancer, constate de son côté que la crise a encouragé une restructuration de certains hôpitaux de jour, s’illustrant notamment avec le regroupement rapide des services d’oncologie ou encore la bonne gestion des cellules de crise par des binômes réunissant personnels médicaux et administratifs.  Collaboration entre professionnels, téléconsultations, nouvelles formes d’organisations… autant d’expérimentations qui ont fait leur preuve durant la crise sanitaire et qu’il s’agit désormais de pérenniser pour garantir une meilleure prise en charge des patients atteints de cancer et rattraper les retards accumulés au cours de la période.

Journaliste audrey.parvais@gpsante.fr


Source : infirmiers.com