La consommation de psychotropes a doublé en dix ans chez les enfants. Un enfant sur 20 serait désormais concerné, relève le Haut Conseil dans un rapport intitulé «Quand les enfants vont mal, comment les aider?», révélé dans Le Parisien lundi 13 mars. Dans le détail, la consommation de psychotropes chez l’enfant et l’adolescent a augmenté de +49% pour les antipsychotiques, +63% pour les antidépresseurs et de +155% pour les hypnotiques et sédatifs entre 2014 et 2021, selon les données collectées par le HCFEA, organisme placé auprès du Premier ministre et chargé de conseiller le gouvernement. Pour la seule année 2021, l’augmentation est de +16% pour les anxiolytiques, de +224% pour les hypnotiques, de +23% pour les antidépresseurs. «Ce phénomène de sur-médication ne concerne pas des cas isolés mais bien des dizaines de milliers d’enfants. Ces niveaux d’augmentation sont sans commune mesure (2 à 20 fois plus élevés) avec ceux observés au niveau de la population générale», indique par ailleurs le rapport. Des chiffres «inquiétants», selon la secrétaire d'Etat à l'Enfance Charlotte Caubel.
Effet ciseau
«Les enfants sont nettement plus exposés que les adultes à la souffrance psychique et aux difficultés psychologiques, mais aussi à la médication», souligne le Haut Conseil qui pointe du doigt une réponse loin d'être à la hauteur de l'enjeu : «L’offre pédiatrique, pédopsychiatrique et médico-sociale est en recul et ne permet plus d’accueillir dans des délais raisonnables (délais d’attente de 6 à 18 mois) les enfants et les familles». Or «le nombre d’enfants en difficulté psychique augmente», à la fois faute de soins appropriés, et en raison d'effets comme «la crise sanitaire, la guerre en Ukraine, l'éco-anxiété». D'où un «effet ciseau» : plus d'enfants en souffrance psychologique et moins de capacités pour les soigner.
Hospitalisations en urgence, passages à l'acte suicidaires...
Cette situation entraîne une «aggravation de l’état de santé des enfants», une «augmentation des hospitalisations en urgence, des passages à l’acte suicidaires et de suicides chez l’enfant et l’adolescent». Et «faute de soins adaptés, le recours à la seule prescription de médicaments psychotropes». Plus grave encore, le rapport souligne qu'une grande partie de ces prescriptions se font hors autorisation de mise sur le marché, ces médicaments n'étant pas conçus pour les enfants.
«Les recommandations des autorités de santé en France sont de proposer en première intention des pratiques psychothérapeutiques, un accompagnement psychologique, éducatif et social», explique la vice présidente du HCFEA Sylviane Giampino. «Les médicaments n'arrivent qu'en dernière instance et en complément. Or il s'avère que des enfants peuvent prendre des psychotropes et ne pas accéder à ces aides complémentaires».
«Tout le monde nous dit on ne sait pas où adresser les enfants car tout est saturé. Pendant ce temps l'enfant grandit, moins bien, les symptômes s'installent, s'aggravent», ajoute cette psychologue de l'enfance.
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