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IBODE

Faut-il dépassionner le lavage chirurgical des mains ?

Publié le 24/04/2012

Faut il dépassionner le lavage chirurgical des mains ? L'auteur, Nicolas Le Verge, Ibode et rédacteur d’infirmiers.com propose cette réflexion a travers un billet intitulé « L'anneau des saigneurs »...

Prenons un observateur et soumettons-lui diverses procédures de lavages chirurgicaux des mains. S'il est attentif, car il faut l'être, il verra en chacune d’elles un détail qui ne correspond pas exactement à sa pratique. En effet, c'est le propre de l'hygiène que d'évoluer avec les années et, par conséquent, le lavage chirurgical des mains - appris et répété maintes fois dans les écoles - peut varier d'un iota d'une époque à une autre. Il peut aussi engendrer un grand écart douteux en fonction des dispositifs médicaux mis à notre disposition pour un poste de lavage défini.

Sachant qu'un « apprenant », courageux et motivé, car il faut l'être aussi en ces temps difficiles, fixera dans son esprit son premier apprentissage comme étant l'étalon d'un savoir, il ne faudra pas s'étonner que ce qui est considéré par chacun comme LE vrai, l'unique, le parfait, l'indiscutable lavage des mains, soit une source permanente de chamailleries et souvent pour des peccadilles.

En effet, chacun est bien tenté par un peu de liberté et, sans doute aussi, son expertise aidant, de pratiquer « à sa manière » cet art de se laver les mains avec comme objectif subtil l’élimination de la flore transitoire et la réduction de la flore résidente (2 à 3 Log de 10)1 et ce, en plus ou moins 5 minutes, chrono en main, pardon, au mur. Il ne manque plus que le compteur de log, ça viendra, on ne désespère pas...

Entre temps sont arrivées dans les établissements de santé les solutions hydro-alcooliques (SHA) et les recommandations des hygiénistes quant à leur utilisation pour une désinfection chirurgicale des mains. Face à ce choc des pratiques et malgré le poids des études scientifiques, notre observateur, le revoilà, pourra mesurer combien les résistances sont fortes : contre les habitudes, contre les remises en question de nos procédures, contre les croyances, contre notre époque, et même contre les hygiénistes aux-mêmes !

Mais voilà, une règle c'est comme un élastique, c'est fait pour tirer dessus. Et comme un effet pervers de l'apologie de la puissance des produits à abaisser le nombre de log - souvenez vous bien de cet objectif, certains se sont dit qu'ils pouvaient prendre des chemins détournés, ou plutôt faire comme bon il leur semble avec le lavage chirurgicale des mains: après tout, ce sont des seigneurs! (avec un « e » et pas un « a » cette fois). Et oui, avec les SHA on peut atteindre un abattement de 5 log, soit l'élimination de 99,999% des germes1 ! Très fort. Trop fort. Pas de délicatesse pour les germes ! SHA alors ! Facile, trop facile celle-là.

Il n'aura en tout cas pas échappé à l'œil de lynx de notre observateur (on se l'imagine bien maintenant) que des choses un tantinet désespérantes se voient ! Et on peut même les montrer du doigt ! On en voit même qui se lavent les paluches avec un anneau au doigt ! Quelle honte! Et même que certaines ont des faux ongles ou des « french manucure » ! Alors là, les recommandations pour l'hygiène des mains1 de la Société française d'hygiène hospitalière sont très claires : en dépit du lavage, les mains sont recolonisées par des germes pathogènes, surtout si l'anneau est volumineux et non lisse. Voilà, tout est dit. A vous de voir... ou de fermer les yeux !

Note

1. Recommandation pour l'hygiène des mains, Société française d'hygiène hospitalière, 2009, volume XVII, p.105 ;

Nicolas Le VERGE
IBODE,
Rédacteur Infirmiers.com
lvergeni@numericable.fr


Source : infirmiers.com