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EMPLOI

Emploi infirmier : quid du Sud-Ouest ?

Publié le 20/06/2013

En matière d'emploi infirmier, l'année 2012 a marqué un tournant dans l’hexagone et dans le Sud-Ouest notamment, en Aquitaine comme en Midi-Pyrénées. Les années de pénurie sont bel et bien révolues. La conjoncture économique en est pour partie responsable, mais pas seulement. Eléments d’explication et perspectives.

L’emploi infirmier reste tendu en 2013

Jusqu'en 2011, les recruteurs de la région Sud-Ouest devaient, sinon faire les yeux doux, du moins faire valoir leurs atouts à l’égard des futurs diplômés ou infirmiers en recherche de poste. Mais cette époque est désormais révolue. En Aquitaine comme en Midi-Pyrénées, dans le public comme dans le privé, la tendance est la même depuis la mi-2012 : on ne parle plus de pénurie infirmière, même s'il peut y avoir toujours quelques situations de tension dans quelques services considérés comme « difficiles » ou pour le recrutement de certains profils. Du reste, des difficultés à trouver un emploi existent, notamment pour les nouveaux diplômés, et la forte baisse de l'intérim infirmier confirme pleinement cette nouvelle situation.

Quelques chiffres-clés...

Midi-Pyrénées (MP) et Aquitaine, dans une moindre mesure, font partie des régions ayant une densité professionnelle relativement élevée (respectivement entre 909 à 997 infirmiers en activité pour 100.000 habitants au 1er janv. 2011 en MP, et entre 829 à 908 en Aquitaine) eu égard à la moyenne nationale (809 pour 100.000 hab. en 2010). Comme ailleurs sur le territoire national, la baisse de l'offre de postes infirmiers est le résultat d'une situation conjoncturelle liée à la situation économique difficile. En outre, en 2011-2012 deux promotions diplômées sont arrivées sur le marché du travail avec seulement six mois d'écart, la dernière (2009-2012) étant issue de la réforme des études infirmières de 2009. Enfin, ces jeunes diplômés ont tendance à rechercher en premier lieu un emploi dans les services qui les intéresse, et il s'agit rarement de la gériatrie ! Or les offres d'emplois vacants concernent d'abord ces services ou les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

Ainsi, au CHU de Bordeaux, depuis l'automne 2012 on ne parle plus de pénurie pour les infirmières, même si quelques situations de tensions demeurent, la nuit en particulier. En cause, l’effet des hausses de quotas d’étudiants en Ifsi, les nouvelles modalités de concours, ce qui induit une hausse des infirmières disponibles, explique Luc Durand, le coordonnateur général des soins. S’y ajoute un effet conjoncturel lié à la crise économique avec moins de départs en retraite et de demandes de mutation donc, au final, moins de postes qui se libèrent, poursuit-il. De fait, cette situation de plein emploi depuis l’automne dernier engendre un peu d’inquiétude pour les futurs diplômés qui vont arriver en juillet prochain. Ainsi ce sont les premiers qui seront servis et les meilleurs dossiers vus en priorité, poursuit Luc Durand qui prévoit pour 2013, environ 300 recrutements infirmiers, dont 60 % de nouveaux diplômés. Le CHU de la région Aquitaine reste néanmoins « preneur » concernant certains profils paramédicaux, tels les infirmiers de bloc opératoire (Ibode) - même s’il en forme - et les masseurs-kinésithérapeutes pour lesquels un plan d’attractivité a été mis en place compte tenu de la très forte concurrence des secteurs privé et libéral.

Comme ailleurs sur le territoire national, la baisse de l'offre de postes infirmiers est le résultat d'une situation conjoncturelle liée à la situation économique difficile.

On est sur la même tendance en Midi-Pyrénées. Depuis 2012 les choses ont changé. Jusqu’en 2011, il y avait 500 à 600 recrutements infirmiers annuels. En, 2012, on en comptait 100 de moins que les années précédentes, soit environ 450. Et les perspectives pour 2013 sont identiques, soit environ 450 recrutements, dont 300 de nouveaux diplômés en sortie d’école. Progressivement, on devrait atteindre environ 400 recrutements annuels dans les années à venir, précise Richard Barthès, directeur du Pôle ressources humaines au CHU de Toulouse. Par ailleurs, les infirmières de spécialités comme les Ibode sont toujours recherchées, mais cela est toutefois moins marqué, et des turn-over fixes sur des services difficiles sont observés, aux urgences psychiatriques par exemple. Enfin, comme au CHU de Bordeaux, on choisit désormais dans les dossiers, souligne Richard Barthès.

L’intérim sous tension

Comme dans tout cycle de crise économique, le secteur de l’intérim est touché, les intérimaires étant une variable d’ajustement pour les recruteurs. L’emploi infirmier n’y échappe pas. Pour Jerick Develle, directeur général d’Adecco Medical (ex-Quick Medical service) - qui emploie près de 25.000 soignants par an -, l’année 2012 est la conjonction de trois phénomènes : la baisse du niveau de vie des ménages qui a impacté l’activité des établissements de santé, des maisons de retraite…, la sortie quasi simultanée de deux promotions d’infirmiers diplômés, auxquelles s’ajoute la mise en place début 2012 d’une journée de carence dans le secteur public qui a engendré notamment moins d’absentéisme. Mais aujourd’hui les choses sont en train de s’équilibrer d’un point de vue général (…) avec une stabilisation de la situation en Aquitaine mais qui n’est pas encore effective en Midi-Pyrénées ». Et ce dernier prévoit plutôt « un été normal, neutre, avec un volume de recherche pour les infirmiers a priori meilleur pour septembre.

Un point de vue un peu plus nuancé pour Stéphane Volleau, responsable marketing de L’Appel Médical (groupe Randstad) qui souligne depuis 2012 « un moindre recours au travail temporaire » du fait d’une double arrivée d’infirmiers diplômés sur le marché du travail et d’une baisse de l’activité économique qui impacte les embauches et/ou les remplacements de personnel infirmier dans les établissements de santé (cliniques et hôpitaux). Toutefois, cette tendance générale qui s’applique à la région Sud-Ouest, a moins impacté le secteur médico-social qui a de forts besoins en personnels paramédicaux, infirmiers et aides-soignants en particulier. Toujours est-il que depuis les missions d’intérim sont moins nombreuses et raccourcies, avec une forte réactivité demandée aux intérimaires. Même si des besoins en IDE sont bien réels, il n’y a pas de reprise en terme d’emplois et il semble que la conjoncture spécifique de 2012 ait tendance à s’installer quelque peu, ajoute-t-il.

Le nouveau cursus de la formation infirmière dont l’afflux massif sur le marché du travail n’a pas été anticipé et par la frilosité des établissements en matière de recrutement.

Il y a une très forte baisse pour les infirmiers, surtout depuis début 2013. C’est aussi le cas pour les aides-soignants (AS) même si la baisse est moins significative, pour des raisons budgétaires essentiellement. Même si l’été est en principe une période propice et forte en termes d’offres d’emplois, les prévisions ne sont pas bonnes, souligne pour sa part Emilie Bellegarde, de l’Aile Médicale, filiale santé du groupe Synergie, à Toulouse. Toujours est-il que c’est avec le CHU que les demandes sont les plus régulières (lors d’arrêts maladie, par exemple), alors que celles avec les Ehpad ou les cliniques sont en baisse du fait de la mise en place de pools de remplaçants, poursuit-elle. Une grosse baisse confirmée par Gildas Moinard, son collègue bordelais sur le dernier semestre 2012, avec un léger soubresaut en avril dernier. On espère que cela va repartir. Il n’y a aucune vision par rapport au marché. Une baisse expliquée en partie et là encore par le nouveau cursus de la formation infirmière dont l’afflux massif sur le marché du travail n’a pas été anticipé et par la frilosité des établissements en matière de recrutements. Mais a contrario de sa collègue toulousaine, ce dernier travaille d’abord avec les Ehpad, les centres hospitaliers locaux et les cliniques privées, notamment les maisons de retraite privées.

Quid du secteur privé ?

Dans le secteur privé, la tendance depuis 2012 est à la stabilité, voire à la baisse. A la clinique des Cèdres (Capio, 603 lits et places) à Cornebarrieu (31), les recrutements infirmiers étaient stables en 2012 et les perspectives pour 2013 sont identiques (remplacement des départs) comme pour les AS et les cadres de santé, indique Marie-Hélène Wujciack, la responsable des ressources humaines. A la clinique Pasteur (492 lits et places) à Toulouse, la tendance est plutôt à la baisse du fait de l’offre inférieure à la demande et des IDE en nombre plus important en demande de recrutement ; les perspectives pour 2013 sont liées aux départs en retraite, aux postes créés liés à une augmentation de l’activité (hospitalisation de jour, SSPI, bloc ambulatoire par exemple), souligne Anne-Marie Pronost, directrice adjointe. Enfin, comme dans le public, les Ibode sont aussi particulièrement recherchés. C’est pourquoi des IDE souhaitant faire du bloc seront ensuite formées sur cette spécialité, poursuit pour sa part A-M Pronost. Soulignons aussi ici le regard porté sur la dernière promotion 2009-2012 IDE issue du nouveau référentiel qui, pour Mariette Longueville, directrice des soins, a beaucoup de mal à transposer la théorie à la réalité des services de soins et dont l’adaptation se fait d’autant mieux dans les services de soins que les stages dans ces secteurs sont effectués en milieu ou en fin de cursus. Et Anne-Marie Pronost de renchérir : Les nouveaux diplômés recrutés s’intègrent mieux lorsqu’ils ont fait des stages en MCO, mieux encore les stagiaires en alternance donc déjà embauchés (contrats d’apprentissage, de professionnalisation, de fidélisation) et ceux en parcours de professionnalisation (promotion interne), qui font leur parcours d’étudiant sur la Clinique Pasteur sauf sur les stages de psychiatrie et Ehpad.

Pour autant, sur le plan national, les perspectives pour les années à venir sont plutôt favorables...

Quelles perspectives ?

L’Aquitaine et Midi-Pyrénées sont deux régions attractives qui comptaient en 2011 chacune un peu plus de 28.000 infirmiers en activité. Pour toutes deux, l’année 2012 a mis fin au mythe du plein emploi infirmier et depuis la tendance est plutôt à la baisse ou à la stagnation des recrutements de ces paramédicaux. De fait, la mobilité géographique pour les jeunes diplômés, le choix par défaut vers certains postes et la précarité sont une réalité pour nombre d’infirmiers et de jeunes diplômés issus de ces régions.

Pour autant, sur le plan national, les perspectives pour les années à venir sont plutôt favorables compte tenu du vieillissement de la population et de la baisse prévisible du nombre de médecins (de l’ordre de 10 % dans les dix prochaines années), ce qui risque d’accroître le besoin en infirmiers, en sachant toutefois que le nombre d’infirmiers en activité devrait continuer à augmenter jusqu’en 2030 mais à un rythme de moins en moins soutenu selon des projections de la Drees. En attendant, l’enquête annuelle « Besoins en main d’œuvre » (BMO) réalisée par le Pôle emploi avec le Credoc prévoit pour cette année 21 433 projets de recrutements d’infirmiers, de cadres de santé et de puéricultrices en France (métiers classés en 9e position parmi ceux les plus recherchés), dont 1383 en Aquitaine et 933 en Midi-Pyrénées avec respectivement 32,4 % et 52,9 % de difficultés à recruter (38,5 % en moyenne nationale).

Valérie HEDEF-CAPELLE Journaliste


Source : infirmiers.com