Comment sécuriser la prise en charge médicamenteuse en établissement de santé ? À l'occasion de la semaine de la sécurité des patients, qui s'est déroulée du 23 au 27 novembre 2015, la Haute Autorité de Santé (HAS) a donné quelques pistes d'amélioration.
Afin de sensibiliser les professionnels de santé à la sécurisation de la prise en charge médicamenteuse en établissement de santé, la Haute Autorité de Santé (HAS) émet plusieurs recommandations et dresse un état des lieux des erreurs médicamenteuses. Une mise au point nécessaire alors que la cinquième édition de la semaine de la sécurité des patients s'est déroulée du 23 au 27 novembre 2015.
Des événements indésirables graves liés aux médicaments évitables
Selon l'enquête nationale ENEIS, les événements indésirables graves (EIG) liés aux médicaments représentent 32,9 % des EIG liés aux soins. Plus de la moitié d'entre eux (51,2 %) sont évitables et 54,5 % ont engendré une hospitalisation. Rappelons que les erreurs liées aux médicaments peuvent être dues :
- aux effets indésirables du médicament, qui peuvent être provoqués par un médicament pris seul ou en association avec d'autres donnant ainsi des interactions aux conséquences potentiellement graves ;
- à l'omission ou la réalisation non intentionnelle d'un acte relatif à un médicament. Ces erreurs médicamenteuses sont liées à l'organisation de la prise en charge du médicament et sont donc évitables.
La complexité du circuit du médicament et le fait que de nombreux acteurs interviennent (à la prescription, pendant la préparation, durant le stockage, au moment de la dispensation et à l'administration au patient) contribuent largement aux erreurs médicamenteuses. Ces dernières sont diverses et l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) en dresse un portrait relativement précis : erreurs d'omission, de doses, de produit, de formes galéniques, de techniques d'administration, de voie, de débit, de durée d'administration, de moment, de patient, de produits/flacons périmés ou détériorés.
Pour une meilleure conciliation des traitements médicamenteux
En matière de sécurité de prise en charge médicamenteuse, sur les cinq solutions prioritaires proposées par l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), la HAS en a retenu deux : la check-list au bloc opératoire et la précision de la prescription des médicaments aux points de transition du parcours de soins. C'est ainsi que le « projet Med'Rec », qui vise à prévenir ou corriger des erreurs médicamenteuses par l'obtention, au moment de l'admission du patient, de la liste exhaustive et complète de tous les médicaments pris ou à prendre en routine avant son hospitalisation, a été créé. Mise en place durant cinq ans au sein de neuf établissements, la conciliation des traitements médicamenteux a permis aux professionnels d'intercepter 46 188 divergences. Il s'agit de situations où un écart entre le bilan médicamenteux établi à l'admission et la prescription en cours a été constaté. Pour huit des neuf établissements, sur un échantillon de 22 863 patients conciliés, on dénombre ainsi 21 320 erreurs médicamenteuses et 23 381 changements de traitement non expliqués. Pour les professionnels de santé, la conciliation représente donc une démarche puissante de prévention et d'interception d'erreurs médicamenteuses, et cela contribue à l'optimisation thérapeutique des prescriptions. Mais même si la démarche est simple dans son principe, elle s'avère complexe à mettre en œuvre. En 2016, la HAS mettra à disposition des professionnels de santé un guide sur la mise en œuvre de la conciliation des traitements médicamenteux en établissements de santé.
Faire face aux interruptions de tâches
Afin de réduire les erreurs médicamenteuses, la HAS s'est également penchée sur la problématique de l'interruption de tâches à l'étape de l'administration. Inhérente au travail en équipe, elle affecte l'attention et est susceptible de générer du stress et par conséquent des erreurs. Soulignons également qu'il est difficile de reprendre une tâche interrompue. En moyenne, un infirmier est interrompu 6,7 fois par heure. Chaque interruption augmente le risque d'erreurs de 13 % et peut être due à des conversations déclenchées par les infirmiers eux-mêmes (dans 22 % à 36,5 % des cas), aux sollicitations des patients (4,7 % à 26,4 % des cas) ou à l'environnement de travail (dans 4,5 à 13 % des situations). Des solutions ont toutefois prouvé leur efficacité dans la réduction des erreurs médicamenteuses : marquage au sol d'une zone protégée, salle dédiée à la préparation des piluliers ou encore blocage du téléphone et des appels. En 2016, la Haute Autorité de Santé proposera une fiche et des outils d'aide à la gestion de l'interruption de tâches lors de l'administration des médicaments. Pour l'heure, les professionnels de santé peuvent d'ores et déjà agir en faisant un état des lieux des interruptions de tâches ce qui devrait permettre de repérer et diminuer les situations à risques.
Aurélie TRENTESSE Journaliste Infirmiers.com aurelie.trentesse@infirmiers.com @ATrentesse
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