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Addictions : des adolescents vulnérables

Publié le 17/03/2014
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Alors que des pratiques comme le « binge-drinking », les soirées « cartables » ou la « neknomination » sont sur le devant de la scène, l'Inserm s'est penché sur les conduites addictives des adolescents et sur les moyens de prévention les plus efficaces.

Les adolescents, plus que jamais concernés par les problèmes engendrés par une addiction, notamment l'alcool

Alors qu'en France, les niveaux de consommation d'alcool, de tabac ou encore de cannabis demeurent élevés chez les adolescents, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), sollicité par la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (Mildt), a établi un bilan1 permettant d'en savoir plus sur les conduites addictives des adolescents et sur les moyens de prévention à privilégier. Comme le souligne l'Inserm, le cerveau de l'adolescent est plus vulnérable aux substances psychoactives que le cerveau de l'adulte. De fait, plus l'expérimentation et l'entrée dans la consommation sont précoces, plus les risques de dépendance ultérieure et de dommages subséquents sont élevés. D'où l'intérêt de mieux sensibiliser les jeunes...

Des effets à ne pas négliger

Tabac, alcool, cannabis, jeux vidéo, de hasard et d'argent... Toutes ces substances et pratiques peuvent provoquer des dommages plus ou moins importants chez l'adolescent, selon les experts de l'Inserm. Ainsi, l'alcool exerce des effets neurotoxiques plus prononcés sur le cerveau des adolescents que sur celui des adultes. Cela peut engendrer des troubles d'apprentissage ou de la mémoire. A noter que les atteintes sont plus importantes chez les filles que chez les garçons du même âge. En outre, les pratiques consistant à consommer une grande quantité d'alcool, comme le « binge-drinking »2, les soirées « cartables »3 ou la « neknomination »4, peuvent s'avérer très dangereuses pour la santé.

Les méfaits du tabac ne sont, quant à eux, plus à démontrer : risque de dépendance et conséquences sanitaires à long terme (cancers, pathologies respiratoires et cardiovasculaires...).

Le cannabis, premier produit psychoactif illicite consommé à l'adolescence, peut avoir des effets à court et long terme. Ainsi, dans les heures suivant l'usage de cannabis, des troubles cognitifs concernant l'attention, le temps de réaction, la mémoire de travail et les fonctions exécutives sont observés. Même si ces troubles ont tendance à disparaître dans le mois suivant l'arrêt de la consommation, ils peuvent persister chez l'adolescent, même après un sevrage, et plus particulièrement si la consommation a commencé à l'âge de 15 ans. A long terme, la consommation régulière de cannabis peut altérer les résultats scolaires et les relations interpersonnelles. De plus, des troubles psychiatriques (anxiété, symptômes psychotiques, schizophrénie, dépression) peuvent apparaître.

Par ailleurs, si la pratique de jeux vidéo peut présenter des aspects positifs, comme le développement des fonctions cognitives et spatiales, elle peut également engendrer des problèmes d'ordres psychiques et somatiques en cas d'usage excessif : irritabilité, difficultés relationnelles, troubles du sommeil... La pratique de jeux de hasard peut, quant à elle, faire apparaître des symptômes dépressifs et anxieux, un risque suicidaire, une diminution des performances scolaires...

Un travail plus directement en lien avec la culture adolescente, adapté à son goût des nouveaux médias et aux nouveaux espaces d'échange qu'ils ouvrent, ainsi qu'un accompagnement des familles sur ces questions nouvelles qu'elles doivent gérer s'imposent

Des facteurs à prendre en compte

Les experts de l'Inserm ont relevé que les adolescents issus de milieux sociaux favorisés ont des niveaux d'expérimentation plus élevés et les jeunes issus de milieux défavorisés ou ayant des difficultés scolaires ont un risque plus élevé de consommer régulièrement du tabac, de l'alcool ou du cannabis de manière excessive. De plus, le risque de s'engager dans une consommation régulière augmente lorsque les parents présentent des conduites addictives. Toutefois, la cohésion familiale permet de le réduire. A noter que les facteurs génétiques peuvent également jouer un rôle non négligeable dans développement de la dépendance.

L'inserm note également que les publicités et outils marketing déployés par les industriels incitant les jeunes à acheter des produits addictifs licites peuvent limiter l'efficacité des programmes de prévention.

Des moyens de prévention efficaces mais de nouvelles stratégies à mettre en place

Les experts relèvent que le développement des compétences psychosociales des adolescents (gestion des émotions, prise de décisions, estime de soi...) et de leurs parents (amélioration de la communication, gestion des conflits), les stratégies à composantes multiples qui intègrent d'autres acteurs que l'école et les parents sont efficaces en matière de prévention. Les campagnes dans les médias, les interventions d'aide à distance et les actions législatives et réglementaires visant à limiter l'accès aux produits addictifs ont elles-aussi prouver leur efficience.

Dans un communiqué daté du 7 mars 2014, la Fédération addiction souligne que défendre l'interdit de la vente d'alcool aux adolescents est nécessaire et qu' il faut répondre autrement à cette banalisation de l'excès, à cette normalisation de l'abus […] Un travail plus directement en lien avec la culture adolescente, adapté à son goût des nouveaux médias et aux nouveaux espaces d'échange qu'ils ouvrent, ainsi qu'un accompagnement des familles sur ces questions nouvelles qu'elles doivent gérer s'imposent.

En 2011, seuls 6,6 % des adolescents de 17 ans n'ont expérimenté aucune substance psychoactive

Dans leur bilan, les experts de l'Inserm recommandent de retarder l'âge d'initiation et de mieux sensibiliser le public et les différents acteurs (jeunes, parents, intervenants du secteur scolaire, parascolaire ou médical...) à la vulnérabilité de l'adolescent et aux dangers associés à une initiation précoce. Il s'agirait de renforcer, sans dramatiser, les messages décrivant l'impact durable sur la santé, en en particulier sur le cerveau, d'une consommation massive et rapide d'alcool ainsi que d'une consommation régulière de cannabis pendant l'adolescence. Pour modifier les motivations, les attentes et les représentations existantes de ces produits, les campagnes média doivent être accompagnées de mesures éducatives et législatives. Ils préconisent également d'informer régulièrement les parents afin de les aider à avoir l'attitude la mieux adaptée à la situation. Il conviendrait aussi de renforcer la formation des intervenants en milieu scolaire de manière à ce qu'ils soient informés des pratiques addictives et puissent décidés des interventions qui peuvent être réalisées. De plus, le groupe propose d'améliorer le repérage des usages à risque et les interventions précoces, de renforcer les actions de première ligne telles que les « Consultations Jeunes Consommateurs » en formant le personnel aux méthodes de prise en charge précoce et de former un certain nombre aux thérapies ayant fait preuve d'efficacité (thérapie comportementale et cognitive, thérapie familiale multidimensionnelle).

Dans ses dernières campagnes, notamment dans la lutte anti-tabac , l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) s'est d'ores et déjà attaché à sensibiliser les jeunes autrement, en reprenant les codes qu'ils connaissent bien. Reste à les utiliser pour l'ensemble des autres campagnes, où les adolescents, bien que concernés par les problèmes d'alcool, de tabagisme et d'addiction, semblent souvent être oubliés...

La consommation de substances psychoactives en chiffres

  • En 2010, 58 % des élèves âgés de 11 ans déclaraient avoir déjà expérimenté une boisson alcoolisée. A 17 ans, 59 % des élèves avouent avoir déjà été ivres au cours de leur vie et 53 % déclarent avoir vécu une alcoolisation ponctuelle importante (consommation d'au moins cinq verres d'alcool en une même occasion) au cours du mois précédent l'enquête.
  • En 2011, 68 % des adolescents âgés de 17 ans avaient expérimenté le tabac.
  • 42 % des adolescents de 17 ans déclaraient avoir déjà fumé du cannabis au moins une fois.
  • Seuls 6,6 % des adolescents de 17 ans n'ont expérimenté aucun de ces produits.

Notes

  1. Bilan élaboré dans le cadre de l'élaboration du Plan gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives 2013-2017
  2. Binge-drinking : Consommation d'une grande quantité d'alcool sur une courte période de temps où l'état d'ivresse est recherché.
  3. Soirées cartables : Vient de l’expression « se mettre cartable ». Ces soirées consistent à remplir son sac de diverses boissons alcoolisées qui seront ensuite consommées en ville.
  4. Neknomination : Un participant se filme en train de boire une grande quantité d'alcool, publie la vidéo sur Internet, puis désigne deux autres personnes qui doivent relever le défi.

Aurélie TRENTESSE  Rédactrice Infirmiers.com aurelie.trentesse@infirmiers.com


Source : infirmiers.com