CONGRÈS DE LA FHP

L'hôpital privé attend un geste budgétaire fort du nouveau gouvernement

Publié le 24/09/2024

Coopération autour des urgences, alignement des salaires du privé sur ceux du public ou accompagnement financier du secteur : les hôpitaux privés abordent la rentrée automnale 2024 dans une ambiance morose sur fond de tours de vis budgétaires attendus dans le domaine de la santé.

Lamine Gharbi

Lamine Gharbi, président de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP)
Crédit photo : Alain ROBERT/SIPA

On connaît depuis peu le nom de la nouvelle ministre de la Santé, Geneviève Darrieussecq. Mais dès le 20 septembre  lors du en congrès à Nancy de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP), son président, Lamine Gharbi, énonçait ses priorités : «la suppression du CICE* (crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi), l'octroi des mesures Bornes sur les revalorisation de nuit et de week-end pour les collaborateurs du privé», et  «la rédaction d'un protocole de pluriannualité» pour permettre «une vision 2025-2027».

Il y a aujourd'hui 15 à 20% d'écart entre le salaire d'un infirmier dans le public et dans le privé

Ce dernier a également évoqué les tensions sociales qui occupent le secteur privé et la possibilité de voir financer l'avenant dit 33 «qui est le changement total de notre classification au niveau conventionnel pour que nos salariés puissent avoir une rémunération décente qui se rapproche de celle de la fonction publique», a-t-il noté. «Il y a aujourd'hui 15 à 20% d'écart entre le salaire d'un infirmier dans le public et dans le privé», a-t-il souligné. Un écart salarial qu'il a estimé «intenable», demandant «une égalité de traitement entre les deux secteurs». 

Plus de 50% de cliniques déficitaires en 2024

«Nous sommes désabusés», avait-il lâché la veille après un été sans interlocuteur au gouvernement. «Si on n'a pas plus de 4% d'augmentation sur nos tarifs en 2025, ça ne passera plus», affirmait-il. Allusion faite aux déficits des cliniques privées qui se creusent selon lui, notamment sous l'effet de l'inflation. Les tarifs des actes et prestations -en grande partie remboursés par l'Assurance maladie et fixés annuellement par l'exécutif- constituent l'essentiel des financements des cliniques. Selon la FHP, 40% des cliniques étaient déficitaires en 2023 et ce pourcentage devrait atteindre 50 à 60% en 2024. Or, la loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027 ne prévoit qu'une hausse de 2,6% de l’enveloppe dédiée aux établissements de santé en 2025, bien loin des +4% souhaités.

Les cliniques privées s'inquiètent aussi de l'avenir de l'accord financier qu'elles avaient trouvé fin mai avec le ministre de la Santé de l'époque, Frédéric Valletoux, à quelques jours d'une grève qui s'annonçait massive.

Une enveloppe nécessaire de 240 millions d'euros 

«L'accord n'a été que partiellement appliqué», a déploré Lamine Gharbi. Les cliniques privées ont pour l'instant touché 130 millions d’euros, depuis la suppression au 1er juillet d'un dispositif qui neutralisait l'avantage fiscal induit par le CICE.

«Mais nous n'avons pas encore touché l'enveloppe destinée à financer la revalorisation des gardes de nuit et de week-end (80 millions d'euros en année pleine)», décidée dans le secteur public l'année dernière, affirme Lamine Gharbi. Quant à l'accompagnement financier promis pour revaloriser les salaires, comme prévu par un accord patronat-syndicats signé en 2023, il reste dans les limbes, selon la FHP. Quelque 240 millions d'euros sont nécessaires, assure la fédération. En clair, les cliniques privés comptent sur la stabilité politique pour voir avancer les dossiers, alors même que la sixième ministre de la Santé en deux ans vient d'entrer en fonction. 

Retrouver "l'esprit Covid" 

Autre point chaud, l'organisation de la permanence des soins (gardes), en particulier au sein des services d'urgence, en crise larvée (engorgements, fermetures ponctuelles…) partout en France, fait également partie des préoccupations du secteur privé. En effet, la loi dite «Valletoux» de décembre 2023 prévoit de donner aux directeurs des Agences régionales de santé des pouvoirs contraignants pour forcer les hôpitaux privés et publics à s'entendre, afin d'assurer un accueil des malades 24/24H, 7 jours sur 7, en répartissant mieux l'effort. Mais la manière dont elle s’appliquera reste à définir.

«S'ils veulent qu'on participe plus à la permanence des soins, il faut qu'ils nous donnent les lignes (de garde) rémunérées», estime Lamine Gharbi. D'après lui, les cliniques privées «réalisent entre 15 et 20%» de l'activité des services d’urgences, mais ne sont financées qu'à «hauteur de 8% de la permanence des soins».

«On ne peut pas nous reprocher tout et son contraire, mais nous devons, avec nos forces et nos faiblesses, corriger les uns les autres les attentes réciproques d'entraide et de complémentarité entre les deux secteurs», a-t-il lancé, pour «enterrer la hache de guerre». En référence à la pandémie qui a obligé chacun à se serrer les coudes, il a appelé à «retrouver cet esprit Covid». 

*Le CICE : de quoi s'agit-il ? 

 

La Rédaction d'Infirmiers.com avec l'AFP

Source : infirmiers.com