Va-t-on passer d'un jour de carence en cas d'arrêt maladie à deux ou trois à l'hôpital et dans les établissements médico-sociaux ? C'est en tout cas l'une des mesures actuellement avancées par les inspections générales des finances et des affaires sociales pour réduire les coûts*. Dans le cadre de l'établissement du budget annuel, l'ancien Premier ministre Gabriel Attal leur a confié une mission de revue des dépenses relatives à la réduction des absences dans les trois versants de la fonction publique.
Résultat : «La mission a identifié plusieurs leviers pour réduire les absences pour raison de santé dans la fonction publique qui reposent sur des mesures de prévention, de contrôle et d’incitation et qui permettent, le cas échéant, de réaliser des gains d’efficience ou des économies budgétaires», note le rapport.
Réduire les coûts
Dans le détail, le rapport rendu au mois de juillet, explore trois pistes pour permettre aux établissements publics de santé, sociaux et médico-sociaux de réaliser des économies à hauteur de 350 millions d'euros environ :
«L'instauration de deux ou trois jours de carence est un levier possible dans l'objectif de réduire la survenance des absences de courte durée», estiment d'abord les inspections. Les dernières estimations budgétaires démontrent que ce projet permettrait à la fonction publique hospitalière (FPH) de réaliser 33 M€ d'économies par an pour deux jours de carence et 54 M€ pour trois jours. Rétabli depuis le 1er janvier 2018, le jour de carence a représenté un total de «134 millions d'euros d'économies pour le budget de l'État en 2023». «L'introduction du jour de carence a rempli son objectif de réduction des arrêts de courte durée et a représenté des économies (...) pour le budget de l’État», souligne le rapport, sans toutefois faire mention des raisons détaillées de cette réduction et de ses conséquences éventuelles pour les personnels sur le terrain.
Autre piste à l'étude : le passage du taux de remplacement à 90% voire 80% de la rémunération brute, soit en clair : le salarié recevrait un pourcentage de son revenu et non plus son revenu habituel. «La diminution du taux de remplacement de la rémunération des agents publics en arrêts de courte durée – actuellement rémunérés à plein traitement à l’exception du premier jour de carence, dans la limite de 90 jours par année glissante – est un autre levier envisageable, complémentaire au jour de carence, pour réduire la durée des absences et dégager des économies budgétaires. Chaque jour d’absence supplémentaire étant partiellement rémunéré, il y a une incitation à modérer la durée d’un arrêt une fois cet arrêt débuté».
Avec la mise en place d'un taux de remplacement à 80%, ce sont 600 M€ d'économies budgétaires qui pourraient être réalisées par le versant hospitalier contre 300 M€ pour un taux de remplacement à 90%. Une mesure drastique là encore qui permettrait, selon les auteurs du rapport «des économies d'efficience par une diminution de l'absentéisme».
Troisième option : un contrôle plus assidu des arrêts maladie aurait plusieurs avantages selon le rapport : celui d'émettre «un signal de vigilance vis-à-vis des abus éventuels tant en direction des agents en arrêt de travail que des agents appelés à absorber le surplus de charge lié à l'absence d'un collègue ; sensibilisation des managers ; appréhension plus fine de l'état de santé de l'agent arrêté ; et possibilité d'une adaptation plus rapide des réponses apportées (reprise du travail, reclassement, etc.)» Le rapport cite deux exemples à la clé, qui concernent l'année 2023 : celui de l'Assistance publique-hôpitaux de Paris où, malgré un taux de contrôles en baisse de 80% depuis 2019, le nombre de jours d'arrêts jugés injustifiés représentait 10,2% des arrêts totaux ; et celui du CHU de Nantes (Loire-Atlantique), où les arrêts jugés injustifiés représentaient 13% du total des arrêts de moins de six mois.
Quelques mesures préventives
Alors que les moyens humains, notamment, ainsi que l'amélioration des conditions de vie au travail sont réclamés depuis des années par les personnels qui expriment de la souffrance sur le terrain, ces mesures pourraient faire grincer des dents.
A côté de ces propositions davantage répressives, le rapport évoque tout de même quelques mesures préventives pour améliorer la santé au travail ainsi que les mesures de sécurité. «Une politique de prévention plus volontariste et un accompagnement renforcé des parcours professionnels sont à déployer pour assurer une meilleure maîtrise des absences des agents publics. En particulier, il s’agit d’optimiser la mobilisation des dispositifs de maintien de l’emploi et de faire appliquer, par tous les employeurs publics, les obligations qui leur incombent en matière de sécurité et santé au travail. La protection sociale complémentaire, qui se met en place dans la fonction publique, constitue également l’occasion d’améliorer l’accès des agents publics aux actions de prévention».
Bien que la fréquence totale des accidents et maladies professionnelles soit en baisse depuis quelques années, les hospitaliers présentent tout de même un taux de sinistralité sévère, supérieur à 7%. Afin de prévenir de futurs arrêts maladie et maîtriser les absences pour raisons de santé, la mission préconise ainsi de renforcer les politiques de santé dans les établissements et de fiabiliser la remontée des données grâce notamment aux rapports sociaux uniques et, à terme, à la déclaration sociale nominative événementielle.
*Retrouvez ici le détail du rapport conjoint de 'L'Inspection générale des finances et de l'Inspection générale des affaires sociales : REVUE DE DÉPENSES RELATIVE À LA RÉDUCTION DES ABSENCES DANS LA FONCTION PUBLIQUE" - juillet 2024.
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