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ESI

Le congrès mondial des IDE francophones à Marrakech : Itinéraire d’une expérience d’étudiants !

Publié le 07/08/2009
IFSI Varene

IFSI Varene

Affiche réalisée par les étudiants en soins infirmiers de 3ème  année de l’IFSI de Saverne

Affiche réalisée par les étudiants en soins infirmiers de 3ème année de l’IFSI de Saverne

Le cadre de santé formateur a un rôle primordial à jouer dans la chaîne de la formation des étudiants en soins infirmiers. Avant même d’organiser son programme de formation il doit se poser un ensemble de questions comme par exemple : quel professionnel voulons-nous former ? Quel avenir souhaitons-nous pour la formation infirmière ? Après cela il pourra seulement envisager la construction de ses actions pédagogiques en accord avec le projet pédagogique de son institution. De plus qui le mieux peut témoigner de son vécu, de son évolution, de sa transformation d’étudiant au cœur même de sa formation ? L’étudiant lui même qui la vit au quotidien durant ses 3 années de formation, période alternée de stages pratiques et de cours théoriques.

Avant la sortie du nouveau programme de formation prévu fin août 2009 certains formateurs ont déjà amorcé le virage et développé de nouvelles orientations pédagogiques. Ce projet construit par deux formateurs et 46 étudiants en soins infirmiers de troisième année de l’IFSI de Saverne s’inscrit dans cette mouvance.

Expérience vécue lors du IVème Congrès Mondial des Infirmières et Infirmiers francophones à Marrakech organisé par le SIDIIEF (Secrétariat International des infirmières et infirmiers de l’espace Francophone) du 7 au 11 juin 2009

Une autre vision de l’alternance

En tant que formatrices responsables des étudiants de 3ème année en formation infirmière nous sommes plusieurs partenaires. Il était donc inconcevable de vivre cette aventure seules. Nous y avons donc associé les étudiants en soins infirmiers de troisième année.

Un des axes de notre pédagogie est de vivre pleinement l’alternance. Mais l’alternance non vue comme une dualité entre lieux professionnels et lieux de formation, mais orientée autour des quatre pôles définis par Gagnayre R. Nous retrouvons donc l’espace de vie, l’autoformation, les lieux de formations et les lieux professionnels. Ces quatre axes sont en interaction les uns avec les autres et permettent à l’apprenant de se construire professionnellement et personnellement. L’étudiant trouve ainsi un équilibre et un enrichissement pour étoffer son projet de vie.

Fini de penser que l‘apprentissage ne peut se réaliser que par une transmission de savoirs ou par l’imitation de gestes professionnels. Le formateur a un autre rôle à jouer que celui de seulement réguler et faire assimiler la connaissance.

Une ouverture professionnelle

La formation initiale doit impulser une dynamique d’ouverture, des approches différentes du soin afin de pouvoir appréhender et analyser les pratiques soignantes complémentaires pour les réinvestir dans l’activité infirmière de demain. Quoi de mieux alors que d’aller à la rencontre de professionnels partageant une culture et un regard pluriel sur l’exercice soignant ?

Prendre soin de l’autre, c’est d’abord prendre soin de soi, et pour cela il faut se connaître, s’écouter, apprendre à gérer les situations complexes humaines. La visée pédagogique des formateurs étant basée sur la confiance en soi, en l’autre, en la VIE….avec engagement et enthousiasme.

Etre créatif dans le soin, c’est aussi faire « ce que je peux avec ce que j’ai et ce que je suis et qui j’ai envie d’être, à ce moment  T ». Ceci grâce à un socle solide de base qui sont mes valeurs liées à mon éducation, mon histoire personnelle et professionnelle et ma vision humaniste, dans un monde où le progrès technologique n’arrête d’évoluer…
Etre créatif dans le soin à l’heure actuelle, c’est être artisan de sa vie …de la vie, mais surtout artisan de soins, …c’est « promouvoir le développement humain » (Thème du Congrès) qui va à l’encontre d’un monde stéréotypé et de production (tarification à l’activité (T2A), des critères économiques…) dans lequel l’étudiant est amené à prodiguer des soins !!!

L’inscription dans un projet : la phase de conception

Faire participer les étudiants en tant que congressiste au même titre que les professionnels c’est leur donner une place, la place qu’ils valent dans leur processus d’apprentissage : « Est-ce que parce que  je ne suis pas Mozart que je n’ai pas le droit de jouer du piano en concert ? »… (Marc Lévy), non bien au contraire…c’est en donnant à l’étudiant l’occasion d’être lui-même et de se projeter dans le monde professionnel qui l’attend, en le faisant connaître sa motivation, son sens du soin, ses désirs…..en le faisant rencontrer d’autres professionnels de santé de surcroît de cultures différentes qu’il peut mesurer l’ampleur de ce qui l’attend et qui il est, pour s’y intégrer au mieux.

La prise de conscience de prodiguer un soin doit être une priorité pour le formateur en soins infirmiers, ce qui implique la nécessité de placer l’homme, l’étudiant au centre de la vie, de sa vie, de sa formation et pour cela il faut lui faire confiance et lui en donner les moyens !

Pour que l’étudiant devienne le meilleur artisan du soin, il faut qu’il commence par développer sa confiance en lui et en l’autre. Rendre l’étudiant autonome, acteur de sa formation ne peut se faire qu’au travers de la confiance. Ce résultat ne se fera que si le formateur donne la possibilité à l’étudiant de mieux se connaître (ses limites, son potentiel) pour mieux se ressourcer et rebondir afin d’appréhender davantage les situations professionnelles rencontrées et de prendre soin de l’autre, toujours motivé par l’enthousiasme.

La phase de réalisation :

Tout commence par une affiche…. Ses couleurs chatoyantes, l’intensité du « bleu Majorelle », l’invitation à partager notre vision du soin infirmiers et promouvoir l’exercice infirmier et c’est parti…

Il faut d’abord répondre à un appel à communication. Le thème est vite choisi, notre vision de la pédagogie et notre ouverture à la réalité du monde professionnel nous mène naturellement vers : « La créativité au service de la pédagogie. »

La réalisation d’une affiche

La conception d’une affiche répondait donc au mieux à tous ces objectifs. C’est ainsi que 46 étudiants en soins infirmiers se sont mis à l’œuvre.  Chacun a puisé en lui et mis en avant des compétences parfois bien cachées et qui seraient passées totalement inaperçues sans la réalisation de ce projet. Ainsi chacun a pu investir des champs de compétences différents pour les mettre au service d’une équipe de travail dans le but d’un objectif commun. N’est ce pas là une des réalités de leur profession de demain ? L’infirmière ne  peut pas travailler seule et chacun à son niveau apporte une pierre à l’édifice si la confiance, la solidarité et l’expression vraie de tous sont possible.

Méthodologie de travail

Cet espace de confiance créé, sept pré-projets sont conçus, présentés et argumentés. Deux groupes se constituent ; l’un pour la réalisation de l’oeuvre et l’autre pour la rédaction de l’argumentaire de la symbolique de l’affiche. Les artistes infirmiers sont en marchent…

Palettes, aquarelles, pinceaux sont investis. La salle de cours est transformée en atelier de création. Une nouvelle ambiance de travail se créée permettant de fédérer le groupe et impulser une dynamique de réussite.

Les phases de répétitions réalisées, il est l’heure de d’embarquer pour Marrakech.

Le temps de décharger ses bagages, de prendre la température culturelle de la ville et il est déjà temps de se rendre au Palais des Congrès, lieu choisi par le SIDIIEF pour organiser son congrès. Le groupe d’étudiants responsable de l’installation de l’affiche rempli avec succès sa mission.

Premier soir, premier regard…

Premier soir, premier regard sur l’ensemble des productions. L’entrée dans la cours des professionnels est difficile et manque un peu d’objectivité. Il est vrai que l’affiche n’est pas dans le courant des réalisations. En effet, par sa création manuelle, et artistique par sa symbolique, et par sa représentation en 3 D, elle est loin des homologues chargés de connaissances, de statistiques et conceptuellement scannerisées. Reste alors, à nous formateurs de profiter du temps d’échange instauré tous les soirs, pour écouter, canaliser et recadrer les éléments dans le contexte professionnel. Puis reste la nuit pour permettre à chacun de se recentrer avant le grand jour…

Le lendemain, l’étape de l’apprivoisement de l’espace est dépassé et après avoir fait trois pas en avant et deux en arrière les étudiants provoquent la rencontre, osent l’échange et argumentent avec dynamisme et fermeté leur vision de la formation et du soin infirmier. Les tabous liés aux statuts d’étudiants ont disparu. Ils sont considérés comme des professionnels et les participants s’étonnent de la qualité de la production et des commentaires présentés. Une interface culturelle s’établie avec des échanges sur les pratiques soignantes, la vision du soin et l’art infirmier à « la sauce Savernoise ». Ils sont devenus des grands, défendant leur conviction soignante.

Le soir lors du débriefing, l’enthousiasme est présent. Les valeurs professionnelles s’expriment. Il y a un grand respect, une qualité d’écoute dans cette salle marocaine de l’hôtel que nous avons décidé d’investir. Il en sera de même tous les jours. La qualité de la réflexion ne faisant que de s’approfondir, s’enrichir au contact des professionnels des différents pays présents.

En guise de conclusion : Une reconnaissance des professionnels

Sur le lieu du congrès nous découvrons qu’un concours est organisé pour élire les trois affiches les plus représentatives de la promotion de l’exercice soignant.
La tension est palpable à l’heure des résultats….. Et c’est avec une grande surprise et satisfaction que nous remportons le « premier prix. »

Cette distinction outre la reconnaissance et la valorisation de leur production, permet aux étudiants d’envisager leur exercice infirmier sous un autre regard.

Le congrès a été l’occasion de constater la richesse et la diversité des savoirs infirmiers. Autant d’expertise et de compétences en provenance de 27 pays différents n’ont pu que susciter un dialogue francophone permettant d’aborder les grands enjeux et les défis communs à notre profession. L’avenir professionnel est en route avec des idées nouvelles et constructives pour faire évoluer nos réalités d’aujourd’hui. A nous les « anciens » de laisser la possibilité aux étudiants d’exprimer toutes leurs richesses pour construire ensemble le Soin Infirmier. Pour finir nous reprendrons une expression d’un jeune étudiant Suisse développer lors du Forum Etudiant «  ne voyez pas les jeunes comme une menace mais comme des alliers ».

Présentation de l’argumentaire de l’affiche réalisée par les étudiants en soins infirmiers de 3ème  année de l’IFSI de Saverne. Promotion 2007/2010.

Explication de la représentation de la symbolique de l’affiche

Les mains sont celles de l’étudiant qui construit son avenir professionnel et développe sa créativité. Il est l’auteur du tableau qui symbolise le cheminement de sa formation.

La palette et le pinceau sont les outils pédagogiques mis à sa disposition. Ce qu’il en fait lui appartient et dépendra de sa motivation. Les multiples couleurs sur la palette représentent les compétences que l’étudiant acquiert au fil de son parcours.

Le chevalet soutient la toile. Il symbolise à la fois les pré-requis de l’étudiant, mais aussi sa vie privée, ses loisirs et ses ressources personnelles…

La chenille représente l’étudiant en début de formation. Elle est curieuse, souple, et se nourrit avec délectation de la culture soignante symbolisée par la feuille. « Ses chaussures » multicolores sont à l’image de sa créativité. Elles lui permettent de « tenir la route » en toutes circonstances et de continuer à progresser vers son but. Le chemin semble long parfois, semé de difficultés mais aussi d’agréables surprises. Grâce à sa flexibilité et à son sens de l’adaptation, l’étudiant parvient à maintenir son équilibre pour avancer.

Le cocon représente l’école et les lieux de stages. Il se veut contenant, rassurant, à la fois solide et douillet. Il permet alors la maturation de l’étudiant grâce aux différents apports théoriques et pratiques. Le rôle des personnes ressources, formateurs et tuteurs, y est fondamental. Le cocon permet la construction du savoir et savoir-faire, mais aussi du savoir-être. En effet, par la confrontation de ses valeurs personnelles avec celles de ses collègues et de ses futurs-pairs, l’étudiant se forge son identité professionnelle.

Puis la chenille devient papillon après l’obtention du diplôme d’état. Il est alors prêt à déployer ses ailes pour aller rejoindre ses semblables au sein d’une équipe. La fragilité du papillon illustre celle des compétences infirmières. Afin de garantir une prise en charge optimale, l’infirmier se doit une remise en question constante de ses pratiques ainsi qu’une formation continue. Ce n’est que dans l’humilité que l’apparente fragilité du papillon se transformera en force et pérennisera le plus beau métier du monde…

Adresse professionnelle :
Institut de Formation en Soins Infirmiers
Centre Hospitalier St Catherine
Rue de la Côte
67700 SAVERNE (Alsace/ Bas-Rhin)
FRANCE

Bibliographie

  • Nouveau programme IDE – voir dossier sur le site Infirmiers.com
  • Gagnayre R, professeur de Sciences de l’Education – Université Paris 13
  • Goleman D. (2003), L’intelligence émotionnelle, éd. J’ai lu
  • Zarifian E. (2004), Le goût de vivre, éd.Odile Jacob
  • Levy M, émission ARTE mai 2009
  • Le Bleu Majorelle de J. Majorelle, artiste peintre – Au Jardin Majorelle à Marrakech

Véronique MAISCH
cadre de santé formateur de l’IFSI de SAVERNE
Titulaire du Durf responsable de formation (Université Marc Bloch Strasbourg) – 2006 -
veronique.maisch@ch-saverne.fr

Isabelle BAYLE
cadre de santé formateur de l’IFSI de SAVERNE
Titulaire d’une licence en sciences de l’éducation (Université d’Aix-en-Provence) et d’un Master 2 en Ingénierie de la formation et des compétences (Université de Strasbourg département des Sciences de l’Education) – 2007-
isabelle.bayle@ch-saverne.fr


Source : infirmiers.com