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ESI

La génération d'ESI "parcoursup" à l'épreuve du covid-19

Publié le 24/06/2020

Voilà la question que l'on pourrait se poser à l'issue de cette première année "Génération parcoursup" effectuée par les étudiants en soins infirmiers : est-ce une génération des "éprouvés" ou toujours "désaprouvée" ? En effet, en septembre dernier, cette promotion d'ESI "sans concours" était au centre de tous les débats professionnels. Si la génération "parcoursup" était donc attendue au tournant de la légitimité, la crise sanitaire a soumis les ESI à "l'épreuve du feu"... Quelles conclusions en tirer aujourd'hui ?

Fort de notre propre expérience de professionnel de santé, puissions-nous prendre conscience, à sa juste mesure, de l'épreuve pédagogique et professionnelle que vient de rencontrer la première promotion d'étudiants en soins infirmiers "sans concours".

Nul ne pourrait le nier, cette première année de formation en soins infirmiers qui se termine aura été particulière, tant sur le fond que sur la forme ! En effet, c'est sur fond de crise sanitaire que s'est tissé le fil conducteur de leur formation, théorique et pratique. Ainsi, l'on a vu notamment se muer l'enseignement présentiel en distanciel, les stages se transformer en champ de bataille contre la COVID19 au sein duquel les étudiants en soins infirmiers (ESI) de 1ère année ont dû trouver une place dans la stratégie de défense sanitaire auprès de leurs pairs, ou non. A fortiori, les ESI de 1ère année, au même titre que les 2ème ou 3ème année, ont su relever les défis qui leur ont été imposés et développer ainsi des capacités de futurs professionnels de santé .

Pour autant, rappelons-le, en septembre dernier, la première promotion d'ESI dite "parcoursup" était au centre de tous les débats professionnels. Dans une grande partie de la communauté soignante, elle suscitait même de l'inquiétude et des doutes sur le potentiel de ces futurs infirmiers n'ayant pas été passés par le "tamis" d'un concours mais plutôt par celui d'un algorythme ! La génération "parcoursup" était donc attendue au tournant de la légitimité. La crise sanitaire fut son épreuve du feu pour la faire valoir ! Cependant, tout ne fut pas si facile et bon nombre d'ESI, à la façon des professionnels de santé confirmés, se sont brûlés leurs jeunes ailes. A l'aune de leur carrière, certains garderont d'ineffaçables cicatrices professionnelles, certains en ressortiront plus "affûtés" quand d'autres encore ont préféré battre en retraite...

Moralité, la génération "parcoursup" est-elle celle des "éprouvés" ou bien restera-t-elle toujours "désapprouvée ?"

Une génération des "éprouvés" oui, sans nul doute par cette crise sanitaire d'une envergure inégalée, mais les ESI de 1ère année disposaient-ils des armes pour faire face ? La première année de formation est en ceci particulière qu'elle ouvre une page professionnelle encore vierge de toutes ratures ou de fautes. De fait, le premier cycle du cursus en soins infirmiers est d'abord l'occasion de recevoir des fondamentaux théoriques afin de commencer à dessiner les traits du professionnel de santé IDE que l'on sera à l'issue de trois années de formation.

Ainsi, l'étudiant en soins infirmiers de 1ère année attend beaucoup et reçoit énorménent tant des formateurs pédagogiques que des professionnels de santé de terrain. Il est en quelque sorte un "buvard" duquel la 2ème année et la 3ème année se nourriront du meilleur, pour continuer à écrire l'histoire d'un néo-infirmier. Par conséquent, être en première année signifie que l'on ne dispose pas encore de l'épaisseur professionnelle nécessaire pour résister et surmonter efficacement un choc dans ce domaine. En somme, la fameuse capacité de résilience.

La plupart des IFSI l'ont bien compris et ont fait preuve de flexibilité pédagogique en mettant en oeuvre plusieurs mesures préventives. Sur le plan pratique, citons par exemple les réaffectations de stages vers les systèmes de garde des enfants des professionnels de santé en première ligne ou bien un aménagement des tâches par des fonctions connexes aux services de soins (appels aux familles, recensement, suivi...). En bref, il s'agissait surtout d'éloigner du contact direct de la crise les ESI de 1ère année pour éviter de les éprouver, quoi que cela peut se discuter car l'état d'esprit n'a pas été homogène... Mais était-ce le seul endroit où ils risquaient d'être éprouvés ? En effet, sur le plan théorique, l'isolement social imposé par l'enseignement distanciel mais aussi les aléas d'un univers numérique, dont se sont emparés les IFSI avec plus ou moins de facilités, le prouve. L'environnement même de l'étudiant est une arme dangereuse ou profitable qui peut se retourner contre lui.

Alors qu'à l'IFSI tout le monde joue dans la même cour d'un amphithéâtre, à la maison cela est bien différent. Tous les étudiants en soins infirmiers ne disposent pas des mêmes facilités socio-économiques pour accéder au numérique ou pour disposer d'un endroit dédié, au calme, pour étudier. Habituellement entraîné par la locomotive institutionnelle, certains ont ainsi progressivement décroché leurs wagons faute de pouvoir rester sur les rails... Par conséquent, même si l'on a vu poindre des innovations numériques, pédagogiques dans les instituts de formations ainsi que le souci d'individualiser les parcours de formations en essayant de garder au maximum le lien avec les ESI, l'on soulève malgré tout des problématiques profondes qui dépassent a priori le seul cadre de l'IFSI. Or, force est de constater que tous ces facteurs micro et macro entraînent un risque psycho-social majeur pour l'étudiant en soins infirmiers de première année par le simple fait que tous ces élèments présentent un danger pour la santé mentale de ce dernier. Ils ne disposent donc pas de toutes les armes afin d'entamer correctement un processus de résilience.

Fort de notre propre expérience de professionnel de santé, puissions-nous prendre conscience, à sa juste mesure, de l'épreuve pédagogique et professionnelle que vient de rencontrer la première promotion d'étudiants en soins infirmiers "sans concours".

A cet égard, l'enquête nationale STUDENCOV mené auprès d'ESI, en mai dernier, et proposé par Gwenaëlle Jacq, coordonnatrice paramédicale de la recherche au Centre Hospitalier de Versailles, nous apportera très prochainement ses conclusions et des pistes de réflexions quant à l'impact de ce nouvel environnement imposé aux ESI durant cette crise sanitaire. Nous n'en mesurons que le dixième, j'en suis persuadé...

Fort de notre propre expérience de professionnel de santé, puissions-nous prendre conscience, à sa juste mesure, de l'épreuve pédagogique et professionnelle que vient de rencontrer la première promotion d'étudiants en soins infirmiers "sans concours". A juste titre, elle vient de terminer un incroyable et valeureux "parcoursup", celui de la COVID19. Un première étape de la vie professionnelle de ces jeunes apprentis soignants "éprouvés" qui ne doivent définitivement appartenir à une une génération "désapprouvée" ! Voilà ce qu'il nous fallait démontrer. Et nous l'avons fait !

Alexis BatailleEtudiant en soins infirmiers L1 (2019-2022),Aide-soignant@AlexisBtlle


Source : infirmiers.com