Petite question par curiosité :
êtes-vous infirmier ?

Merci d'avoir répondu !

CADRE

La carte conceptuelle : un outil de développement de la métacognition

Publié le 23/09/2009
étudiant questions

étudiant questions

Cet article présente une technique pédagogique appelée « Carte conceptuelle » qui peut être utilisée par le formateur, quelles que soient les connaissances à enseigner et qui permet de développer les performances d’apprentissage des étudiants. Elle est également très utile à l’étudiant car elle lui permet de mesurer son apprentissage et d’identifier ses progrès. La carte conceptuelle, comme son nom l’indique, est basée sur le principe de la cartographie.

La carte conceptuelle favorise la vision globale et la mémorisation des situations complexes. 

En tant que formateur chargé d’une part d’organiser l’enseignement et d’autre part de dispenser des cours, et face à la masse de connaissances qu’un étudiant se doit d’apprendre et de retenir lors de ses études, vous êtes-vous posé les questions suivantes :

  • Comment fonctionne le cerveau ?
  • Comment fonctionne la mémoire ?
  • Comment fonctionne l’œil lors de la lecture ?
  • Comment aider l’étudiant à se concentrer le mieux possible lors des séquences d’apprentissage?
  • Comment développer et maintenir sa motivation ?
  • Comment développer son imagination et sa créativité ?
  • Comment augmenter son potentiel intellectuel ?

Présentation de la carte conceptuelle

La carte conceptuelle fait partie des outils qui servent à représenter les informations de façon visuelle. Elle favorise la vision globale et la mémorisation des situations complexes.
Elle sollicite les deux hémisphères du cerveau : le cerveau gauche pour la partie qui concerne le langage, la logique, la rationalité et le cerveau droit pour l’imagination, la créativité, la vision globale, l’analogie, la spatialisation de l’information. De ce fait, elle combine l’utilisation de deux hémisphères en parfaite synergie.
A partir de mots-clefs et/ou d’images clefs, elle stimule la pensée et donne accès aux souvenirs stockés au fond de la mémoire, ce qui permet de les évoquer, de les utiliser et de les enrichir par de nouvelles connaissances. Les mots-clefs véhiculent de l’information et leur évocation oriente vers d’autres mots. Ces mots-clefs représentés vont être utilisés comme des indices et permettre ainsi à notre cerveau d’en trouver d’autres afin de les associer aux premiers.
L’utilisation de la carte conceptuelle a été élargie au domaine pédagogique car elle présente de nombreux avantages. Elle permet de planifier, de gérer l’information et d’augmenter le potentiel de réussite de l’étudiant. Il s’agit d’une activité d’apprentissage, créative, visuelle et spatiale. Elle apporte une photographie des connaissances de l’étudiant sur un concept-clef, à un moment donné et elle illustre aussi comment il les relie dans sa mémoire à long terme.
Les connaissances antérieures constituent les structures d’accueil sur lesquelles le formateur peut s’appuyer pour orienter son enseignement en apportant de nouvelles connaissances à l’étudiant. C’est à partir de ses relations dites de « sens » que vont être traitées les informations nouvelles. Elle peut être utilisée lors d’une séquence d’enseignement basée sur l’apprentissage d’un concept, de façon individuelle ou en groupe.
La carte conceptuelle permet de :

  • Mettre en évidence les connaissances antérieures, les conceptions et les représentations des étudiants sur un concept
  • Identifier les connaissances erronées et/ou les connaissances partielles liées à ce concept
  • Faire prendre conscience à l’étudiant de ses lacunes en créant le doute qui est un des facteurs de la motivation
  • Aider à structurer et organiser la connaissance chez l’étudiant
  • Visualiser comment les apprentissages se réalisent par la représentation des relations de « sens » entre les concepts
  • Mettre en évidence par un pré-test et un post-test la modification des connaissances après une activité ou un cycle d’activités de formation

La carte conceptuelle en dehors de ses aspects pratiques, procure des sensations et des sentiments chez l’étudiant.
Elle permet de :

  • Développer une plus grande confiance en soi
  • Penser par soi même
  • Potentialiser sa mémoire
  • Donner envie d’apprendre
  • Utiliser de nouvelles ressources
  • Faciliter l’argumentation
  • Maitriser son savoir
  • Optimiser son temps

Son intérêt est donc multiple pour l’étudiant comme pour le formateur.

Quel est son intérêt et comment l'utiliser ?

Pour comprendre l’intérêt de la carte conceptuelle et la façon dont le formateur peut l’utiliser, il faut faire référence au fonctionnement du cerveau. On pourrait assimiler son activité à celle d’un ordinateur capable d’accumuler des données, de les traiter puis de les trier pour ensuite les restituer sous différentes formes.

Le cerveau assume ainsi cinq fonctions :

  • La réception : il reçoit des informations en permanence par l’intermédiaire des 5 sens
  • La mémorisation : il retient et stocke ces informations auxquelles nous pouvons accéder selon notre sollicitation
  • L’analyse : il reconnait des schémas et organise l’information de façon à ce qu’elle soit accessible et utilisable
  • Le contrôle : il gère l’information de différentes manières et en fonction de paramètres qui nous sont propres comme notre personnalité, notre environnement et notre état de santé
  • La production : il traite l’information reçue et nous la restitue sous différentes formes de façon à ce que nous puissions l’utiliser à bon escient

Lorsque qu’un étudiant assiste à un cours, il a l’habitude de prendre des notes de façon linéaire parce qu’il pense que la phrase en tant que telle, permet de mémoriser les éléments. Cependant notre cerveau raisonne à partir d’une pensée qui est irradiante.
Le cerveau possède la capacité de développer des représentations et des concepts à l’infini. Donc plus la technique de mémorisation fait appel aux mécanismes innés du cerveau, plus l’étudiant augmentera sa capacité à se remémorer les connaissances déjà stockées dans sa mémoire.
Ainsi la prise de note linéaire freine l’apprentissage. En effet des études montrent que 90 % des mots ne sont pas utiles à la mémorisation, donc l’étudiant perdra autant de temps à relire et à essayer de retenir des mots inutiles et ceci souvent par cœur. La lecture des mots clefs (ceux qu’il devrait retenir) séparés entre eux par d’autres mots, interfère dans la mémorisation et affaiblit les associations d’idées. Ainsi plus les mots clefs sont distants les uns des autres, moins il y a de chance de faciliter les associations. Cette approche linéaire va à l’encontre du fonctionnement en réseau du cerveau et de ce fait ne permet pas à l’étudiant d’utiliser son réel potentiel de manière optimale.

L’utilisation la carte conceptuelle à partir de mots clefs permettant une représentation graphique, reflète la pensée irradiante et suscite la mémorisation et la pensée créative. Elle permet à l’étudiant de mémoriser et de prendre des notes autrement que de façon linéaire en faisant appel aux 4R de la mémoire qui sont :

  • Repérer
  • Relier
  • Ranger
  • Retrouver

Pour le formateur elle présente plusieurs intérêts suivant les moments où elle sera utilisée.

En pré-test

Le formateur peut effectuer un pré-test individuel ou en groupe avant de débuter une ou plusieurs séquences d’enseignement sur un même concept. Il peut ainsi évaluer les pré-requis des étudiants à partir des cartes conceptuelles qu’ils réaliseront au cours de la séquence.

L’analyse des cartes par le formateur, se fait immédiatement après leur présentation par les étudiants. Elle s’effectue conjointement par les étudiants eux-mêmes et par le formateur. Ils comparent ensemble les schémas présentés, notent les oublis, s’intéressent aux différences de contenus. Le formateur met en évidence les concepts communs et corrects ou les connaissances erronées aux différents étudiants ou groupes d’étudiants.
La qualité des connaissances de base et de leur organisation définies sur les cartes réalisées, par les étudiants, permet de différencier en un coup d’œil, l’expert du novice car le savoir de l’expert apparaît à la fois comme organisé, mis en structure et fortement hiérarchisé alors que celui du novice apparait comme déstructuré et partiel.

A l’issue de cette séquence, le formateur peut alors réajuster ses enseignements en fonction du niveau des étudiants car les cartes conceptuelles réalisées et présentées lui permettent d’évaluer les connaissances à consolider ou à réajuster et d’identifier celles qui seront à apporter pour que l’étudiant puisse bénéficier de connaissances justes précises et complètes sur le concept abordé au cours de l’enseignement.

En post-test

Lorsqu’elle est utilisée en post-test à l’issue de plusieurs séquences d’enseignement concernant un même concept, le formateur met l’accent sur les apprentissages réalisés les étudiants ou par le groupe en soulignant la progression entre le début et la fin des séquences Il démontre et explique les liens logiques ce qui donne alors un aspect dynamique à la représentation graphique du concept global.

Le formateur valorise les étapes de métacognition en tenant compte des connaissances présentées.

L’exploitation des différentes cartes peut modifier l’opinion des apprenants sur le concept développé, car si on les compare aux cartes réalisées en pré-test elles seront enrichies par les connaissances nouvelles. De pus l’exercice de présentation et d’analyse réalisé par les étudiants au cours des séquences favorise la mémorisation et l’organisation des connaissances liées au concept clef.

La carte conceptuelle permet de rassurer et d’éclairer les étudiants en faisant apparaître l’organisation de leurs connaissances.

Le formateur peut questionner l’étudiant et/ou le groupe d’étudiants pour favoriser la remémoration des connaissances, après la synthèse de la séquence pédagogique.

Comment effectuer une séquence pédagogique à partir de la réalisation de la carte conceptuelle ?

L’activité peut être réalisée avec un groupe de trente étudiants. Prévoir une durée de 2h environ par concept étudié.

  • Répartir les étudiants par groupes de cinq
  • Matériel nécessaire à l’activité pour chaque groupe:
    • Des feuilles blanches de format A4
    • Des feuilles blanches de format A3
    • Un feutre noir
    • Des feutres de couleurs

Déroulement de la séance

Le formateur choisit un concept clef à étudier.

Il demande aux étudiants de noter sur une feuille de façon individuelle la liste des mots-clefs qu’ils connaissent et qui sont en relation avec ce concept comme lors d’un brainstorming.

Puis il demande aux étudiants individuellement, de placer ce concept dans une bulle, au centre d’une feuille de type A4, disposée en format paysage de façon à utiliser tout l’espace et à faciliter la lecture pour l’œil.

A partir de ce concept central l’étudiant placera les autres mots de sa liste un par un dans d’autres bulles de couleur en les hiérarchisant du plus important au moins important et en les organisant sachant que la lecture de la carte se fera dans le sens des aiguilles d’une montre pour respecter le fonctionnement de l’œil. La couleur stimule la créativité et la mémorisation. Trois ou quatre couleurs différentes seront au moins utilisées

Des flèches indiquant le sens de la relation entre les différentes bulles, permettront de guider la lecture et d’orienter l’œil. Un verbe sera inscrit sur chacune des flèches, représentant ainsi les liens fonctionnels et de « sens » entre les deux mots clefs qu’elle relie.

Il est possible de laisser une bulle vide si l’on manque d’inspiration car le cerveau ayant horreur du vide et elle pourra être remplie plus tard.

Lorsque la carte est terminée, inscrire au dos de celle-ci le nom de l’auteur ainsi que la date à laquelle elle a été réalisée. Cela permettra de mesurer et de comparer les cartes entre elles, au fur et à mesure de l’apprentissage concernant ce concept.

Lorsque chaque étudiant au sein de son groupe aura crée sa carte, la mise en commun sera effectuée à partir de l’argumentation et de la comparaison des différentes cartes. Le groupe après analyse et discussion autour des différentes cartes présentées, réalisera alors une nouvelle carte commune à partir de la synthèse des cartes individuelles.

Une fois cette carte terminée, chaque groupe présentera sa nouvelle carte à l’ensemble des étudiants. Un rapporteur est choisi au sein du groupe pour argumenter cette carte oralement au grand groupe.

L’argumentation orale permet de se concentrer sur la représentation du concept, définie par le groupe et en même temps de le mémoriser. Par ailleurs cet exercice permet de s’entrainer à communiquer et à maitriser son émotion face à un public et à se positionner. La répétition de cet exercice permettra à l’étudiant de gagner en aisance et de développer ses compétences en communication.

Pour clore la séquence, le formateur commentera et mettra en évidence les points communs et les différences entre les cartes qui ont été présentées et réalisera ainsi un réajustement et une synthèse du concept étudié et des éléments essentiels à mémoriser.
Cette technique fait appel successivement à :

  • la réflexion
  • l’analyse
  • l’organisation
  • la hiérarchisation
  • l’argumentation
  • la négociation
  • la mémorisation

Quelles limites à l'utilisation de cette technique pédagogique ?

A priori cette technique ne présente aucune limite d’utilisation. Elle nécessite avant tout d’être bien présentée et explicitée aussi bien aux utilisateurs qu’aux formateurs qui s’en serviront.
Elle peut présenter cependant quelques réactions lors de son utilisation :
Auprès des étudiants :

  • Les étudiants peuvent ne pas apprécier le caractère ludique de l’activité souvent ressenti au premier abord
  • La concentration individuelle demandée au début de l’activité représente un effort intense pour certains participants qui ne sont pas à l’aise avec le concept
  • L’élaboration d’une carte est difficile pour certains car la négociation qu’elle exige au niveau du groupe nécessite des efforts.
  • Certaines personnes ont du mal à organiser leurs idées et surtout à les représenter autrement que de façon linéaire
  • Sans l’aide du formateur, le groupe peut ressentir des difficultés à comprendre la méthode et à exprimer ses connaissances. La carte en sera moins riche.

Auprès des autres formateurs de l’équipe pédagogique

  • L’activité sort du formalisme habituel et peut générer une sorte de peur car elle représente un changement de méthode pédagogique
  • Les autres formateurs peuvent être méfiants quand à l’efficacité de cette méthode sur l’apprentissage et sur la métacognition du fait de son originalité et de sa simplicité d’utilisation

Conclusion

Pour avoir intégrée cette technique dans ma pratique pédagogique auprès de différents publics lors de ma pratique de formatrice aussi bien en formation initiale que continue, je peux dire que l’utilisation de la carte conceptuelle lors de séquences de formation suscite toujours l’intérêt et la satisfaction des apprenants.

Elle permet la participation active de chacun et de ce fait, favorise l’attention. Les séquences de formation sont plus créatives et animées. Elle met en évidence de façon visuelle non seulement les mots clefs mais aussi les liens fonctionnels qui les relient permettant une organisation des connaissances et une meilleure compréhension du concept-clef étudié. Elle favorise aussi le questionnement de l’apprenant et permet de réaliser une synthèse immédiate des contenus essentiels qui seront à mémoriser à l’issue de la séquence.

Sa présentation finale réajustée, satisfait et valorise son créateur car elle lui laisse une image complète, enrichie et synthétique du concept qu’il aura étudié et qu’il pourra à tout moment réactiver et approfondir s’il le souhaite. La carte conceptuelle mobilise la réflexion et l’émotion.

Son utilisation peut être élargie à d’autres domaines comme celui de l’éducation thérapeutique, de la prise de note, de l’apprentissage par problèmes, de la rédaction de fiches de lectures.

Afin d’illustrez cette méthode, vous trouverez ci-joint en exemple, trois cartes conceptuelles réalisées lors de séquences d’enseignements que j’ai animés auprès d’étudiants en soins infirmiers de 3ème année de l’IFSI de Saverne. Le concept étudié était le Cancer.

Deux d’entre elles ont été publiées dans le livre sur les Concepts en sciences infirmières écrit par Mmes Formarier M.et Jovic L. de l’ARSI aux Editions Mallet Conseil.

Exemples de cartes conceptuelles:

LIVRES

  • BUZAN T. – Muscler son cerveau avec le Mind Mapping – Ed. Eyrolles – Paris - 2008 – 89 p.
  • BUZAN T. Une tête bien faite – Ed D’Organisation Les guides Buzan– Paris – 2004 – 184 p.
  • DELADRIERE J.L. – LE BIHAN F. – MONGIN P. – REBAUD D. – Organisez vos idées avec le Mind Mapping – ED Dunod – Paris – 2007 – 157 p.
  • FORMARIER M. – JOVIC L. – Les concepts en sciences infirmières – Ed. Mallet Conseil – Lyon – 2009 – 286 p.
  • BUZAN T - Dessine moi l’intelligence – Éd. d’Organisation - Les guides Buzan – 2003 - 326 p.
  • La mémoire en activités – Ariane ASSEMAT – Soigner et accompagner – Ed. Lamarre – Reuil Malmaison – 2008 – 135 p.

Bibliographie

Webographie

Pascale MEYER
Rédactrice Infirmiers.com
pascale.meyer@infirmiers.com


Source : infirmiers.com