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COURS IFSI

Pancréatite aigue sévère 

Publié le 03/05/2011

La PA est une urgence médicochirurgicale nécessitant une prise en charge immédiate dans les services d’urgence.

Retenir
La pancréatite dans sa forme nécrotique est une urgence
La gravité est liée à la nécrose (5-10 %) et surtout à l’infection (5-10 %)
Le traitement médicochirurgical doit être conduit en soins intensifs

Introduction

La pancréatite aigue (PA) est une affection particulièrement fréquente dans les services d’urgence, responsable d’une importante morbidité et mortalité. La Pancréatite Aigue  sévère (PAS) constitue encore un défi diagnostique et thérapeutique pour les équipes des urgences. Les recommandations actuelles concernent la prise en charge du patient présentant une forme sévère de pancréatite aigue.

Définition

La PA peut se constituer depuis des formes modérées entrainant des hospitalisations brèves jusqu’à des formes sévères fulminantes entrainant des défaillances multivicérales, avec ou sans sepsis.
La PA peut être retrouvée sous 4 entités : œdémateuse, nécroticohémorragique (avec nécrose stérile ou infectée), les abcès pancréatiques et les pseudo kystes.

La PA sévère évolue en deux phases :

  • phase initiale (première semaine) avec risque de retentissements sur les fonctions vitales (cardiovasculaire, respiratoire,rénale, hépatique et gastro intestinales) lié à la libération de substances toxiques vaso actives ;
  • deuxième phase évoluante en nécrose pancréatique ou autour du pancréas avec risque de complications (abcédation, hémorragie, infections, pseudo kystes).

Épidémiologie

L’incidence de la PA semble s’être accrue dans les pays occidentaux (Ecosse, sud du Royaume Uni : 150 à 420 cas/million de population ; 210000 admissions /an aux USA), probablement grâce à une meilleure détection.
L’incidence et la mortalité augmentent considérablement avec l’âge.

L’incidence annuelle de la maladie est estimée à 30 – 50 cas/100000 habitants/an.
Le taux annuel de mortalité de la pancréatite aigue reste stable : 1,5 décès/100000 patients/an.

Incidence 15,6 – 79,8 cas/100,000 patients/an
Suède : 27-35 cas/100,000 patients/an
Royaume Uni: 15-42 cas/100,000 patients/an (48,4 F/75M Ecosse)
France: 22 cas/100,000 patients/an (60 % M)

Il existe de nombreuses recommandations en langues anglaise et japonaise publiées dans la littérature. Notamment, l’American College of Gastroenterology propose un guide de recommandations et d’objectifs de prise en charge de la pancréatite aigue sévère dans les services d’urgence

  • Qu’est ce qui est important lors de la prise en charge initiale de la PA ?
  • Quand doit on admettre un patient en soins intensifs ?
  • Doit on donner des antibiotiques ?
  • Quel type d’apport nutritionnel ?
  • Quelles sont les traitements d’appoint ?
  • Quelle est la place de la chirurgie ?
  • Quel est le rôle du drainage percutané et de la laporoscopie ?

Les recommandations sont établies par un groupe d’experts chirurgiens, internistes, gastroentérologues et réanimateurs. Elles ne concernent pas la pédiatrie.

Étiologies

80 % des PA sont dues à 2 causes : les lithiases biliaires et l’alcool.
Dans la majorité des séries rapportées dans la littérature, la lithiase représente environ la moitié des cas de pancréatites aigues et 20 à 35 % seraient liées à une consommation abusive d’alcool. L’hypertriglycéridémie est une cause rare (1-4 %) principalement pour des valeurs de TG > 1g/dl (10 mmmol/l). Une minorité sont  classées en « autres causes » ou idiopathiques.

  • Lithiases biliaires (45 %)
  • Excès d’alcool (35 %)
  • Mixte (10%)
  • Autres ou idiopathiques (10 %)

La répartition schématisée des causes de pancréatite aigue est bien établie

  • Nord de l’ Europe (38- 60 %) alcool
  • Sud de l’Europe (60- 71 %) lithiases

De nombreuses études semblent indiquer qu’il n’y aurait pas de différence de pronostic entre les PA d’origine alcoolique et lithiasique.

Définition d’Atlanta

Une définition de la PAS a été établie au cours d’un symposium international tenu à Atlanta en 1992. La PA est définie comme un processus inflammatoire du pancréas pouvant s’étendre aux tissus péri pancréatiques ou aux organes voisins. La PA est une maladie regroupant une grande variété de formes physiopathologiques différentes dans leur gravité.

Dans 80 à 90 % des cas, la pancréatite aigue se présente sous une forme mineure avec une faible morbi/mortalité, régressant à la normale en 3 à 4 jours, quasi totalement en 1 semaine. Seuls 15 -20 % sont des formes sévères pouvant entrainer des complications locales ou systémiques avec nécroses  (17%) voire des défaillances multi viscérales (47%).

Diagnostic

Le diagnostic de PA repose sur 3 critères

  1. Clinique : douleur épigastrique caractéristique
  2. Biologique : élévation des enzymes pancréatiques amylase et/ou lipase sériques à 3 fois la limite supérieure de la normale
  3. Imagerie : images caractéristiques au scanner abdominal.

Clinique (CF Figure) : douleur abdominale aigue typique débutant dans la région épigastrique.

La douleur est le symptôme cardinal ; elle est présente dans 95 % des cas. Le début de la douleur représente le début de l’histoire de la maladie. Elle apparaît typiquement dans la région haute de l’abdomen en particulier dans la région du quadrant supérieur droit, épigastrique et occasionnellement dans la région du quadrant gauche. La douleur est exacerbée par le repas ou la boisson, en particulier l’ingestion d’alcool.

Le patient se présente classiquement aux urgences  allongé sur le coté, couché en « chien de fusil » (ou position fœtale) avec une douleur épigastrique à type de coup de poignard  à son paroxysme en intensité (EVA ++++), irradiant fréquemment dans le dos , accompagnée de nausées et de vomissements.

La douleur atteint son maximum d’intensité dans les 30 minutes et peut persister plus de 24 heures.

Figure 4 Présentation typique de la pancréatite aigue : douleur épigastrique sévère à son maximum d’intensité (100%) associée à une fièvre (80 %),
défense abdominale (80 %), nausées et vomissements (>70 %), flatulences (> 60 %), ictère (> 30 %), choc (20 – 30 %), confusion (10 – 20 %)

Biologie

La présence d’une douleur abdominale aigue avec vomissements associée à une élévation des concentrations sériques en enzymes pancréatiques  sont des éléments essentiels au diagnostic de la maladie.
La littérature concernant l’utilité du dosage de l’amylase et de la lipase dans les services d’urgence est contradictoire.
D’une manière générale, l’amylase et la lipase s’élèvent simultanément au cours des premières heures de la PA.

Lors de la pancréatite aigue, l’amylase sérique (amylasémie) augmente progressivement au cours des 6-24h pour atteindre son pic en 48h puis se normalise dans les 5 à 7 jours suivants. La lipasémie peut rester modérément moins élevée que l’amylasémie. Il n’y a pas de corrélation entre les chiffres élevés d’amylasémie ou de lipasémie et la gravité de la pancréatite. Une amylasémie  peut être normale dans d’authentiques cas de PA quel que soit le niveau de sévérité.

Il n’est généralement pas nécessaire de doser simultanément amylasémie et lipasémie.
Il est préférable de doser la lipasémie car cette enzyme ne s’élève pas lors de pathologies non pancréatiques au cours desquelles l’amylasémie s’élève (cf tableau 1)

Tableau 1 pathologies pancréatiques et extra pancréatiques associées à une hyperamylasémie

En effet, plusieurs organes contiennent des enzymes à activité de lipolyse comme la langue, l’œsophage, la jonction œsogastrique, certaines parties de l’estomac, du duodénum, du grêle et du foie.
D’une manière générale, la lipasémie semble être plus sensible et spécifique que l’amylasémie pour le diagnostic de pancréatite aigue.

 

Une majorité des auteurs suggèrent qu’une valeur minimale de lipasémie élevée à 3 fois la valeur normale signe le diagnostic de pancréatite aigue avec une quasi-certitude.

Imagerie

L’échographie abdominale est plus utile à l’admission pour retrouver la présence de calculs dans la vésicule biliaire que pour affirmer le diagnostic de pancréatite aigue. Sa sensibilité est seulement de 67 % lorsque la PA est secondaire à une lithiase biliaire et nettement moins bonne dans les autres étiologies.

Figure 5 Lithiases de la vésicule biliaire en échographie abdominale Figure 6 vésicule biliaire normale (Fig 1) et lithiasique (Fig 2)

La détection des lithiases comme la dilatation de la voie biliaire principale est limitée par la faible sensitivité de l’échographie, mais sa spécificité est élevée lorsque les calculs sont identifiés. En échographie, la pancréatite aigue peut être diagnostiquée lorsque le pancréas est visualisé s’il est élargi, sa texture hypoéchogène reflet d’un œdème, ou bien en cas de présence d’ascite.

Le scanner abdominal

Selon plusieurs auteurs, une majorité des patients avec un tableau typique de pancréatite aigue  ne devraient pas bénéficier d’un scanner abdominal à l’admission aux urgences, voire à aucun moment de leur hospitalisation.

Par exemple, le scanner n’est pas essentiel chez les patients présentant une forme récurrente et modérée de pancréatite alcoolique.
Une indication raisonnable du scanner abdominal à l’admission (et pas obligatoirement avec injection de produit de contraste) est le diagnostic différentiel entre une pancréatite aigue et une autre cause de douleur abdominale aigue comme l’ulcère perforé.

L’autre indication raisonnable du scanner est la réalisation au 2ème ou 3ème jour d’admission d’un scanner abdominal avec injection de produit de contraste afin de distinguer les formes de pancréatites interstitielles des formes nécrotiques, dès lors qu’il existe des signes évidents de sévérité clinique.

Le pancréas peut apparaître normal sur un scanner abdominal sans injection dans 30 % des pancréatites aiguës. Le scanner abdominal multibarettes avec injection de produit de contraste est actuellement la meilleure technique d’imagerie pour :

  • exclure les autres causes qui pourraient masquer une PA ;
  • le diagnostic de sévérité d’une PA : élargissement du pancréas avec œdème diffus, parenchyme pancréatique hétérogène et collections péri pancréatiques ;
  • rechercher les complications de la pancréatite : obstruction biliaire duodénale, inflammation du colon transverse, infarctus splénique, vasculaires (pseudo anévrysmes, thrombose de veines splénique, thrombose de la veine porte), ascite…
  • le critère principal de nécrose du pancréas est la présence de zones diffuses bien limitées et non rehaussées de parenchyme pancréatique de taille > 3 cm ou étendues à > 30 % du pancréas.

L’utilisation de l’Imagerie à Résonnance Magnétique (IRM) pour le diagnostic et la sévérité de la PA est actuellement à l’étude, mais les premiers résultats sont prometteurs.

Critères de gravité

Plusieurs indices pronostiques sont utilisés pour déterminer la gravité de la maladie, afin de décider l’orientation du patient en réanimation.Les scores utilisés sont les scores IGS, IGS II et APACHE II utilisant les paramètres calculés sur des données de routine au cours des 24 premières heures.
Il est courant d’utiliser les 11 critères de Ranson : la pancréatite est dite sévère lorsque 3 items au moins sont présents.

Critères de Ranson

  • A l’admission :
  • Age > 55 ans
  • Leucocytose > 16000 /mm3
  • Glycémie > 11 mmol/l (en l’absence de diabète)
  • LDH > 350 UI/l (1,5 fois la normale)
  • SGOT > 250 UI/L (6 fois la normale)

Dans les 48 h :

  • Chute de l’hématocrite > 10 %
  • Urée sanguine > 0,83 mmol/l
  • Calcémie
  • PaO2
  • Chute des bicarbonates > 4 mEq/l
  • Séquestration liquidienne > 6l

A l’admission : quels critères faut il rechercher pour admettre le patient  en unité de soins intensifs ?

Rechercher les signes de sévérité

  • âge (>55 ans),
  • Obésité (BMI >30),
  • Défaillance d’organe dès l’admission, définie par la présence d’un choc, défaillance pulmonaire, épanchement pleural à la radiographie des poumons, insuffisance rénale ou saignements gastro-intestinaux,
  • épanchement pleural et/ou infiltrats.

Le signe de Cullen ou ecchymose périombilicale est associé à un hémopéritoine et peut être présent dans de nombreuses pathologies intra abdominales.

Le signe de Grey Turner est un exsudat rétropéritonéal lié à une pancréatite aigue sévère. Il a également été observé dans les traumatismes abdominaux sévères (accidents de route) ou rupture d’anévrysme abdominaux.

Tableau 2 signe de Grey Turner Tableau 3 signe de Cullen

Traitement symptomatique

  • Aspiration nasogastrique
  • Analgésiques morphiniques (recommandations anglo saxonnes) ou non morphiniques
  • Surveillance des paramètres vitaux : pouls, TA, température, oxymétrie de pouls, diurèse
  • Lutte contre l’état de choc et maintien d’une volémie efficace,  voire transfusion de culots globulaires
  • Oxygénothérapie  adaptée à l’oxymétrie de pouls et à la gazométrie artérielle
  • Correction de l’insuffisance rénale aigue et maintien d’une diurèse efficace
  • Correction des troubles de l’hémostase
  • Apport nutritif  précoce par voie parentérale
  • L’utilisation des antibiotiques est largement discutée par les auteurs et n’est actuellement plus recommandée.

Le traitement chirurgical est discuté selon les équipes

Conclusion

La PA est une urgence médicochirurgicale nécessitant une prise en charge immédiate dans les services d’urgence. Le diagnostic doit être facilement évoqué devant l’association de la triade douleur typique + biologie et/ou imagerie. Le pronostic de cette pathologie fréquente est amélioré par un traitement symptomatique administré le plus tôt possible et par la recherche des complications aigües.

{encart} Retenir :
La pancréatite dans sa forme nécrotique est une urgence
La gravité est liée à la nécrose (5-10 %) et surtout à l’infection (5-10 %)
Le traitement médicochirurgical doit être conduit en soins intensifs
{fin de l’encart}


inter : Introduction : La pancréatite aigue (PA) est une affection particulièrement fréquente dans les services d’urgence, responsable d’une importante morbidité et mortalité. La Pancréatite Aigue  sévère (PAS) constitue encore un défi diagnostique et thérapeutique pour les équipes des urgences. Les recommandations actuelles concernent la prise en charge du patient présentant une forme sévère de pancréatite aigue.
Inter : Définition : La PA peut se constituer depuis des formes modérées entrainant des hospitalisations brèves jusqu’à des formes sévères fulminantes entrainant des défaillances multivicérales, avec ou sans sepsis.
La PA peut être retrouvée sous 4 entités : œdémateuse, nécroticohémorragique (avec nécrose stérile ou infectée), les abcès pancréatiques et les pseudo kystes.
La PA sévère évolue en deux phases :
phase initiale (première semaine) avec risque de retentissements sur les fonctions vitales (cardiovasculaire, respiratoire,rénale, hépatique et gastro intestinales) lié à la libération de substances toxiques vaso actives ;deuxième phase évoluante en nécrose pancréatique ou autour du pancréas avec risque de complications (abcédation, hémorragie, infections, pseudo kystes).

{encart} Retenir :
La pancréatite dans sa forme nécrotique est une urgence
La gravité est liée à la nécrose (5-10 %) et surtout à l’infection (5-10 %)
Le traitement médicochirurgical doit être conduit en soins intensifs
{fin de l’encart}


inter : Introduction : La pancréatite aigue (PA) est une affection particulièrement fréquente dans les services d’urgence, responsable d’une importante morbidité et mortalité. La Pancréatite Aigue  sévère (PAS) constitue encore un défi diagnostique et thérapeutique pour les équipes des urgences. Les recommandations actuelles concernent la prise en charge du patient présentant une forme sévère de pancréatite aigue.
Inter : Définition : La PA peut se constituer depuis des formes modérées entrainant des hospitalisations brèves jusqu’à des formes sévères fulminantes entrainant des défaillances multivicérales, avec ou sans sepsis.
La PA peut être retrouvée sous 4 entités : œdémateuse, nécroticohémorragique (avec nécrose stérile ou infectée), les abcès pancréatiques et les pseudo kystes.
La PA sévère évolue en deux phases :
phase initiale (première semaine) avec risque de retentissements sur les fonctions vitales (cardiovasculaire, respiratoire,rénale, hépatique et gastro intestinales) lié à la libération de substances toxiques vaso actives ;deuxième phase évoluante en nécrose pancréatique ou autour du pancréas avec risque de complications (abcédation, hémorragie, infections, pseudo kystes).

Bibliographie

  • Encyclopédie Médicochirurgicale 2007. P Montravers, A Benbara,H. Chemchick,N, Rkaiby
  • Pancréatites aigues . Urgences Médicochirurgicales. B Riou, P carli
  • « Updates in pancreatitis » E. Revue EuSEM 2009
  • pancréas 2002 Apr ;24 (3) :223-7 .Acute pancreatitis in Five European countries : étiologies and mortality. Gullo and col.
  • Amylase and lipase in the emergency department évaluation of acute pancreatitis. Robert . Journal of Emergency médicine , Vol 17, N°6 pp1027-1037 ; 1999
  • Illustrations Franck Netter (Fig 1,2) Eric Revue ( Fig 4,8)

Dr Eric REVUE
Rédacteur Infirmiers.com
erevue@ch-dreux.fr


Source : infirmiers.com