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COURS IFSI

La relation soignant-soigné : le sourire

Publié le 28/11/2023

Le sourire est une valeur-ajoutée à l'attitude soignante. En effet, s’il est en adéquation avec les pensées du soignant, le sourire peut faciliter un soin, être un outil de communication non verbale et induire une relation de confiance.

fond noir, smiley, souriant, jaune

Christine Paillard, documentaliste et lexicographe en sciences infirmières, propose d'analyser un concept et son application dans le champ infirmier, à partir de son Dictionnaire des concepts en soins infirmiers, utile pour les Analyses de pratiques professionnelles et pour le Mémoire de fin d’études et l’exercice de la profession soignante.

Le sourire peut avoir un effet miroir, en cela, il est interactif.

Le sourire est une expression silencieuse du visage. Nom masculin ou verbe, le sourire se caractérise par un léger mouvement rieur des lèvres qui détermine un style propre à chacun. Le sourire peut être narquois, imité, gentil, affectueux, poli, sympathique, accueillant, faible, enfantin, continu, rare,  forcé, à demi, feint, hypocrite, agréable, intéractif, complaisant, rusé, discret, noyé dans les larmes, naïf, sous cape, engageant, mécanique, apaisant, mélancolique, gêné, moqueur, authentique, sincère, dissimulé, prêteur, révélateur… Les yeux réagissent simultanément au sourire, ils grandissent ou rapetissent, s’illuminent, dessinent des rides, les yeux sourient. Cit J’entendais son sourire au téléphone.

Attesté en 1140 comme le "surrire" , le préfixe sous signifie bien qu’il n’est pas tout à fait un rire (bruyant), mais qu’il est catégorisé comme une expression à part, singulière. Le sourire est la manifestation d’un comportement accueillant et n’entraîne pas nécessairement le rire. Le sourire peut être le reflet d’une expérience subjective, autrement dit, des émotions et le rictus du sourire est une adaptation à celles-ci . Comme le souligne Armelle Nugier, les théoriciens qualifient l’émotion de phénomène multicomponentiel adaptatif (avec plusieurs composantes) pouvant être caractérisé par les réactions expressives, comme le sourire, le froncement  de  sourcil, l’intonation de la voix, la posture ; par  les réactions  physiologiques comme la fréquence cardiaque, le flux sanguin, la production des larmes …. Cit. C’était magique, nous ne pouvions pas nous arrêter de sourire. Il est des instants comme celui-là, enrichissant humainement parlant et surtout inoubliable1.

Il existe une gamme variée de sourires. Il y a le sourire de joie, quand on apprend une bonne nouvelle. Le sourire d’aise du bébé repu... Comment comprendre leur signification et l’émotion qui leur est associée ? Selon Paula Niedenthal, c’est par une imitation subtile et presque inconsciente que l’on parvient à comprendre le sens d’un sourire. En contractant les muscles du visage à la manière de la personne d’en face, s’activent aussitôt des zones cérébrales différentes associées aux émotions suscitées par chaque type de sourire.

Lié à la culture, le sourire n’a pas la même signification pour tout le monde, il est interprétable. Pour David Le Breton, on sourit partout, mais pas pour les mêmes raisons. Pour cet enseignant en anthropologie , le sourire est un adoucisseur de contact, il assure le fonctionnement apaisé de la rencontre en la plaçant d'emblée sur un terrain propice, ou bien il dissipe le trouble ou le malentendu en affichant le signe de la bonne volonté, de l’accommodement. C'est un ingrédient nécessaire des rites d'entrée ou de sortie d'une interaction, une modalité minimale de consécration de l'autre et de consécration de soi par l'autre. Si ce dernier ne renvoie pas de sourire, le signe est clair d'une hostilité ou d'un désintérêt

Le sourire est un outil interpersonnel. Il n’est pas forcément sous catégorisé dans l’humour mais peut simplement exprimer une politesse contenue ou encore être une stratégie pour faire face au stress provoqué par des situations difficiles (coping). Le sourire peut avoir un effet miroir, en cela, il est intéractif. Pour J. Cosnier, le sourire et les rires appellent le sourire et les rires, les pleurs, les pleurs ou du moins une mimique compassionnelle... Les "mines de circonstance" sont fréquentes, mais de plus, souvent contagieuses.

S’il est en adéquation avec les pensées du soignant, le sourire peut  faciliter un soin, être un outil de communication non verbale et induire une relation de confiance. Dans le domaine du soin, il est le premier maillon de la prise en charge. Il est le média garantissant une certaine bienveillance. Avec un public dit précaire, il y a la question, de l’hygiène bucco-dentaire. Ici, le sourire est avant tout esthétique. Le soignant accompagne alors sans jugement les personnes vulnérables vers un processus de prise en charge personnalisée. Prendre en compte les pathologies associées est alors une nécessité. D’après l’article "Soins bucco-dentaires pour les patients handicapés"2, l’esthétique du sourire influence la relation à l’autre et l’acceptation de soi.

Comme le souligne C. Catteau3, les pathologies bucco-dentaires constituent un facteur de comorbidités important en présence de pathologies cardiaques, de pathologies broncho-pulmonaires, de diabète. En pédiatrie, et pour Lucie Caritoux4, le sourire de l’enfant au premier mois de vie est une réponse à la présence humaine ou à l’audition d’une voix. Des études l’ont présenté comme un témoignage de la satisfaction d’un besoin.

Les soignants ont un rôle pour répondre au sourire, sans pour autant afficher un sourire forcé, il s’agit de répondre aux besoins des personnes soignées. Ils ont aussi un rôle de facilitateur pour prendre soin dans l’exercice créatif de leur métier. La douceur d’un sourire est un baume de paroles chaleureuses et drôles, peuvent faire la différence pour dédramatiser une situation (Margot Phaneuf).

Notes

  1. Virginie Brelot et Dominique Conrath. Le toucher:  outil privilégié de la communication non verbale. La revue de l'infirmière. Volume 66. n°233. août 2017. pp. 51-52
  2. Pujade Céline, Kheng Roddy, Braconni Marianne et al. Soins bucco-dentaires pour les patients handicapés. Santé Publique, 2017/5. Vol. 29. pp. 677-684.
  3. Catteau C. Évaluation d’une mesure nationale expérimentale d’amélioration de l’hygiène bucco-dentaire en établissement médico-sociale : le Projet Santé Orale et Autonomie. Thèse Médecine humaine et pathologie. Université d’Auvergne - Clermont-Ferrand I ; 2013. 254 p.
  4. Dennis W. Un test expérimental de deux théories du sourire chez le jeune enfant. Journal of social psychologie. 1935; VI,2 : 214-24. cité par Lucie Caritoux. Naître… et sourire !. Cahiers de la puéricultrice. Vol 46, N° 230, octobre 2009. pp. 23-25.

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Christine Paillard
Docteure en sciences du langage, diplômée en ingénierie pédagogique et licenciée en sciences de l’information et de la communication, elle accompagne les étudiant.es infirmier.ières (Ifsi, IPA) à l'acquisition de compétences informationnelles, linguistiques pour remobiliser une démarche documentaire scientifique.


Source : infirmiers.com