COURS IFSI

La relation soignant-soigné : L’auto-soin, un sujet connexe de l’éducation thérapeutique

Publié le 14/11/2023

Christine Paillard, documentaliste et lexicographe en sciences infirmières, propose d'analyser un concept et son application dans le champ infirmier, à partir de son Dictionnaire des concepts en soins infirmiers, utile pour les Analyses de pratiques professionnelles et pour le Mémoire de fin d’études et l’exercice de la profession soignante. 

L’auto-soin est particulièrement important dans le cadre de pathologies chroniques où le patient doit bien connaître sa maladie et les ressources à déployer pour vivre au mieux avec elle. Le concept de l’auto-soin comporte une dimension intrinsèque. Il reste déterminé par les comportements et les compétences des différents acteurs (soignants soignés).

L’auto-soin comporte une dimension intrinsèque. Il reste déterminé par les comportements et les compétences des différents acteurs (soignants-soignés).

Défini par l’OMS comme une prise de décision que le patient prend avec l’intention de modifier l’effet de la maladie sur sa santé, l’auto-soin est une approche holistique de la relation soignant-soigné. Ce concept peut être traduit de l’anglais self-care (soin que l’on prodigue à soi). Celui-ci est présent dans la littérature scientifique des Sciences Sociales à partir des années 70 (Levin, Katz and Host, 1976), puis dans les sciences infirmières (années 80 et 90) pour évoquer la volonté d’agir des patients atteints, par exemple, de maladies chroniques. Nous ne parlons pas d’automédication, mais de prendre en compte l’individu autonome et acteur de son parcours de soins… Mais qu’entend-on exactement par auto-soin ?

Pour Dorothea Orem (1987), l’auto-soin est une production d’actions orientées vers soi ou son environnement, en vue d’assurer la régulation de son processus fonctionnel dans l’intérêt de sa vie et de son bien-être. Cette théorie caractérise la relation existant entre les actions délibérées d’auto-soin des individus appartenant aux divers groupes sociaux afin d’assurer leur propre développement fonctionnel. Il s’agit tout d’abord d’un processus soignant marquant les enjeux des personnes soignées à être autonomes. Cette relation éducative se caractérise, par exemple, par l’entretien infirmier où l’on reconnaît des composantes essentielles à la relation d’aide (Hetu, J.L. 1998). C’est-à-dire que l’éducation thérapeutique réalisée par le soignant prend en compte les limites de la relation entre le patient et le professionnel de santé avec une gestion de temps et des affects. Il se doit de comprendre les défaillances intimede la personne qui restreint son autonomie en limitant sa capacité à répondre aux exigences ordinaires du cadre social commun. La relation induite par le soignant est avant tout éducative, momentanée et relève du champ psychosocial. Cette perspective humaine favorise l’émergence des éléments contributifs aux changements décidés par les personnes soignées.

Le concept d’auto-soins se réfère à une activité initiée de façon consciente et suite à un apprentissage, qui est appropriée à la situation et centrée sur un objectif.

Éducation thérapeutique : le patient doit savoir et vouloir

Pour les auteurs de l’article intitulé «  Une analyse évolutionniste du concept d’auto-soins » : le concept d’auto-soins se réfère à une activité initiée, de manière consciente et suite à un apprentissage, qui est appropriée à la situation et centrée sur un objectif. Ce concept est davantage utilisé dans des contextes de maladies chroniques que celles aiguës. La démarche d’auto-soin s’inscrit dans le cadre du service sanitaire, avec, par exemple, la néphropathie diabétique où malgré les progrès pharmacologiques du traitement, elle reste associée à une morbidité et une mortalité élevée. Pour réduire les complications cardiovasculaires qui lui sont associées et préserver la fonction rénale, il est recommandé aux patients d’adopter des schémas thérapeutiques complexes et de s’engager dans une démarche d’auto-soin. (Helou, Nancy et al, 2017).

 

L’auto-soin comporte une dimension intrinsèque. Il reste déterminé par les comportements et les compétences des différents acteurs (soignants-soignés), ce qui se caractérise par des savoirs en action et le vouloir agir. La démarche éducative est basée sur l’observance, le réajustement, et l’évaluation. En effet, cet apprentissage opère le plus souvent sur une base vicariante, c’est-à-dire par observation du comportement d’individus similaires à soi-même et des conséquences qui en résultent pour eux (regarder d’autres patients mobiliser des compétences d’auto-soin et constater les effets positifs ou négatifs qui en résultent pour eux)…(Fonte, D. et et, 2017). Chez des personnes asthmatiques, des programmes de formation à l'auto-soin ont une influence positive sur le niveau de connaissance de leur maladie et des compétences associées.

Un accompagnement facilitateur

Dans le cadre de l’éducation thérapeutique avec des personnes asthmatiques, des programmes de formation à l'auto-soin ont une influence positive sur le niveau de connaissance de leur maladie et de compétences associées en termes de capacités gestuelles, de techniques et de prises de décision concernant leur état de santé et leur traitement. Cette éducation est actuellement considérée comme une étape indispensable pour aboutir à un contrôle optimal du traitement de la maladie asthmatique. (Gagnayre, Rémi. 7-1027)

L’auto-soin est un concept dit multiple (T. G. Mashaba, Hilla Brink. 1994) qui se doit d’être bien compris pour les infirmiers. Il relève de relations interpersonnelles, d’actions structurées, évaluées, dans un cadre hospitalier interprofessionnel. Les effets sont analysés, mesurés. Cet accompagnement facilite l’acquisition de compétences chez les personnes soignées qui sauront s’identifier dans une relation thérapeutique. Un processus soignant en découle pour définir ensemble des objectifs opératoires conduisant à la médiation, au maintien de la santé, à la guérison, à l'autonomie ou à la gestion des différentes pertes physiologiques, psychiques, sensorielles…

Notes

  1. Fonte, D. et Lagouanelle-Simeoni, M.-C. et Apostolidis, T. Les compétences psychosociales en éducation thérapeutique du patient : des enjeux pour la pratique du psychologue. Pratiques psychologiques. Vol. 23, n°4. 12/2017. pp. 417-435
  2. Gagnayre, Rémi. Éducation thérapeutique du patient. AKOS (Traité de Médecine). [7-1027]
  3. Helou, Nancy et Zanchi, Anne et Shaha, Maya. La contribution infirmière à la prise en charge multidisciplinaire des patients vivant avec une néphropathie diabétique : une revue intégrative de la littérature. Revue francophone internationale de recherche infirmière.Vol.3, n° 2. 06/ 2017. pp. 79-86
    • HETU, J.L. La relation d'aide : Éléments de base et guide de perfectionnement. Gaëtan Morin. 2014.
    • OREM DE. Nursing : Concepts of practice. 4th ed. Mobsy ; 1991         
    • Levin, L.S et. Katz, A.H et Host, E. Self-care. Lay initiatives in health. New-York, prodist. 133 p. 1976
    • MAILHOT, Tanya et COSSETTE, Sylvie et ALDERSON, Marie, Une analyse évolutionniste du concept d'auto-soins, Recherche en soins infirmiers, 2013/, n°112. pp 94-106.         

    Christine Paillard
    Docteure en sciences du langage, diplômée en ingénierie pédagogique et licenciée en sciences de l’information et de la communication, elle accompagne les étudiant.es infirmier.ières (Ifsi, IPA) à l'acquisition de compétences informationnelles, linguistiques pour remobiliser une démarche documentaire scientifique.
     


    Source : infirmiers.com