Petite question par curiosité :
êtes-vous infirmier ?

Merci d'avoir répondu !

COURS IFSI

Cours Ifsi - Traitements des accidents de plongée

Publié le 13/11/2012

En 2011, 258 accidents de plongés ont été recensés selon une enquête de la fédération française d'études et de sports sous-marins. En fonction de l'accident plusieurs traitements sont possibles , de l'administration d'oxygène jusqu'à l'immersion dans un caisson hyperbare.

Les accidents qui surviennent lors de la pratique de la plongée subaquatique, peuvent être classés rapidement en accidents spécifiques et non spécifiques.

Les accidents spécifiques

Les accidents spécifiques sont de sévérité variable. Ils surviennent en cas de non-respect des lois sur les gaz parfaits et nécessitent le respect rigoureux des mesures de prévention, et pour certains, le recours à l’oxygénothérapie hyperbare (OHB).

  • Les accidents mécaniques :
    • barotraumatisme des sinus ;
    • barotraumatisme auriculaire ;
    • le placage de masque ;
    • barotraumatisme dentaire ;
    • surpression pulmonaire ;
    • barotraumatisme digestif (dilatation gastrique aiguë, colique du scaphandrier…)
  • Les accidents biochimiques :
    • hypercapnie ;
    • narcose aux gaz inertes ;
    • accident d’hyperoxie : toxicité de l’oxygène ;
    • intoxication au monoxyde de carbone et gaz polluants.
  • Les accidents biophysiques :
    • accidents de type I : les puces et moutons (manifestations cutanés), les bends (algie articulaire) ;
    • accidents de type II : maladie de décompression à minima, décompression explosive, accidents cérébraux, accidents vestibulaires, forme pulmonaire de la maladie de décompression, accidents cardiaques, accidents médullaires ;
  • pathologie chronique : ostéonécrose dysbarique.

Les accidents non spécifiques

Les accidents non spécifiques peuvent être plus ou moins graves entrainant une prise en charge allant de la simple sortie de l’eau avec mise au repos, à la réanimation pré-hospitalière et hospitalière lourde.

  • les pertes de connaissance : choc thermo-différentiel (hydrocution), syncope allergique, syncope vagale, pertes de connaissance secondaires ;
  • accidents dermatologiques : urticaire aquagénique, urticaire au froid acquise essentielle, conjonctivite irritative des piscines, otite externe ;
  • accidents traumatiques : contusions, lombalgies, névralgies, plaies diverses ;
  • noyade.

Physiopathologie de la maladie de décompression

Schématiquement, on peut considérer que la maladie de décompression est le résultat de la formation de bulles de gaz dans l’organisme et d’une réaction inflammatoire générale déclenchée par l’interface gaz/plasma ou gaz/endothélium. Le traitement de cette maladie de décompression comportera donc 2 branches :

  • oxygénothérapie hyperbare qui par effet pression /dissolution permet de diminuer l’importance des bulles de gaz présentes dans l’organisme.
  • Le traitement de la maladie en générale, par anti-agrégant plaquettaire et anticoagulant, anti-inflammatoire, divers traitements à visée micro circulatoire et anti-radicaux libres.

Symptômes de la maladie de décompression

Douleur thoracique qui peut être due à :

  • toxicité pulmonaire de l’oxygène ;
  • ischémie myocardique ;
  • lung squeeze (pression thoracique intra pulmonaire négative allant au-delà des possibilités anatomiques) ;
  • syndrome d’hyperventilation ;
  • surpression pulmonaire ;
  • pneumothorax, pneumo-médiastin ;
  • traumatisme ;

La perte de conscience est toujours une urgence en plongée. Elle peut survenir lors de la descente, au fond ou lors de la remontée. La perte de conscience due à la maladie de décompensation ne survient que lors de la remontée ou après la sortie de l’eau. Les diagnostics à évoquer sont une toxicité neurologique aiguë de l’oxygène, la toxicité du Co et l’hypoxie. L’histoire clinique est ici fondamentale pour différencier ces diagnostics.

Le vertige peut être alterno-barique, calorique (différence de température entre les 2 oreilles), une fistule péri-lymphatique, un barotraumatisme, une maladie de décompression de l’oreille interne ou le résultat de la toxicité de l’oxygène. Pour arriver au diagnostic, les circonstances de survenue du vertige sont fondamentales à préciser : moment de la plongée, durée du symptôme, association avec d’autres signes ORL. Le diagnostic de la maladie de décompression de l’oreille interne est parfois posé devant l’amélioration clinique procurée par la recompression.

La surdité brusque pendant ou après une plongée peut être due à une maladie de décompression mais survient également après un traumatisme sonore ou une fistule péri-lymphatique. L’OHB n’est utile qu’en cas de maladie de décompression de l’oreille interne.

Les examens complémentaires ne doivent en rien retarder la séance d’OHB. Ils seront donc réduits au strict minimum et orientés par l’examen clinique. Un cliché pulmonaire est indispensable la recherche de signes d’épanchement gazeux pulmonaire.

Conduite à tenir des lieux de l’accident jusqu’à l’unité d’OHB

La prise en charge du plongeur en difficultés débute dès la sortie de l’eau par la réalisation correcte et simultanée de 2 types de procédures à savoir la réanimation précoce et l’évacuation de l’accidenté dans les meilleurs conditions. La difficulté est parfois de savoir reconnaître l’accident de décompression en voie de constitution quand celui-ci se manifeste seulement par une fatigue inhabituelle ou par des signes cutanés. Les secours doivent venir chercher le plongeur le plus rapidement possible, pour l’orienter vers le centre d’OHB le plus proche. Le recours aux moyens d’évacuation aéroportés doit être privilégié. L’hélicoptère à l’avantage d’une grande vitesse de déplacement et permet d’éviter les secousses du transport routier qui favorisent le dégazage. Le vol doit s’effectuer à basse altitude, au mieux à moins de 100m et en tout cas à moins de 300m. Une telle procédure d’évacuation doit être prévue à l’avance par le responsable de la plongée, et nécessite que les moyens de communication radio du bateau soient en parfait état de fonctionnement et vérifiés régulièrement. L’intérêt de procédures de sécurité préétablies et proches de celles utilisées en plongée professionnelle est souligné depuis la conférence de consensus de Marseille en 1996.

La réanimation précoce du plongeur est entreprise dès la sortie de l’eau par la personne la plus compétente et la plus expérimentée. La présence d’un médecin et d’un infirmier sur les lieux doit permettre une prise en charge plus technique. La présence d’oxygène est fortement recommandée sur le bateau avec la consigne de l’administrer précocement et à fort débit (≥10l/min). La lutte contre l’hypothermie est utile car celle-ci favorise la vasoconstriction néfaste à l’élimination de l’azote tissulaire. Le recueil des informations concernant la plongée est primordial. Celui-ci doit être aussi précis et complet que possible. Les données concernant la plongée seront consignées par écrit : niveau technique du plongeur, durée, profondeur maximale, profil, respect des paliers, vitesse de remontée, plongées précédentes dans la journée, incidents déjà survenus au plongeur ou à la palanquée. Le recueil policier de toutes les données techniques de la plongée est impératif pour se faire une idée précise des circonstances de survenue de l’accident. La saisie pour enquête de l’ordinateur de plongée peut s’avérer nécessaire. L’ensemble de ces renseignements permettra de faire la différence entre maladie de décompression et surpression pulmonaire, de planifier au mieux le traitement et de poser les éventuelles contre-indications à la reprise de l’activité après la phase de guérison.

Le patient victime d’un accident de décompression bénéficie d’une prise en charge médicale classique qui présente quelques particularités. L’objectif est de faire rapidement le tri entre les patients qui nécessitent ou non l’OHB. L’examen clinique doit être effectué par une personne formée à la médecine subaquatique. Le diagnostic des formes mineures repose en effet sur la présence de petits signes cliniques : asthénie inhabituelle, fourmillements, globe vésical, troubles de la conscience à type de désorientation temporo-spatiale. La confusion entre la maladie de décompensation grave et surpression pulmonaire avec signes généraux est souvent faite de part leurs similitudes. Les principaux arguments qui permettent de différencier les 2 diagnostics sont :

  • Maladie de décompensation
  • Surpression pulmonaire
  • Plongeur expérimenté
  • Débutant
  • Non-respect des tables
  • Remontée brutale glotte fermée (panique)
  • Plongée longue
  • Plongée courte, d’initiation
  • Plongée de travail
  • Zone des 10-20m
  • Plongée profonde
  • Début de plongée
  • Survenue de la symptomatologie en fin de plongée
  • Loi du tout ou rien
  • Évolutivité possible de la maladie de décompensation

Traitement de la maladie de décompression

L’administration d’oxygène normobare sur le bateau lors de la survenue de l’accident de décompression peut améliorer la symptomatologie clinique et masquer la maladie de décompression en évolution, mais l’amélioration initiale ne dispensera pas de la séance d’oxygénothérapie hyperbare. On rappellera en effet que la maladie de décompression est une maladie au potentiel évolutif certain.

L’interface entre bulle et gaz de sang ou endothélium peut déclencher l’activation de nombreuses réactions procoagulantes et inflammatoires néfastes pour l’organisme. Celles-ci peuvent dont être la cible de certains traitements médicamenteux.

Le plongeur à la sortie de l’eau est déshydraté par l’effet de la pression via le facteur atrial natriurétique mais aussi par l’effort physique accompli au fond. La déshydratation entraîne une vasoconstriction des microcirculations qui favorise l’hypoxie tissulaire et diminue l’élimination tissulaire de l’azote. Le remplissage est donc une mesure thérapeutique logique dans ce contexte. Les modalités dépendant de l’état du plongeur. Si le plongeur est conscient et ne présente pas de contre-indication, la voie orale doit être privilégiée. Le plongeur sera autorisé à boire selon la sensation de soif cependant les boissons gazeuses sont bannies. En cas de coma, seul le remplissage par voie intraveineuse est possible. Per os comme IV, l’apport de sucre sera proscrit car l’hyperglycémie est néfaste en cas d’œdème cérébral dû à un aéro-embolisme artériel. Curieusement, rien n’est dit d’une éventuelle hypoglycémie, toujours possible après une plongée de travail particulièrement éprouvante physiquement.

Les traitements anti-agrégants plaquettaires de type aspirine ont été largement proposés et utilisés pour bloquer l’agrégation plaquettaire déclenchée par l’interface bulle de gaz/plasma ou endothélium. Leur utilisation n’a pas été validée. Elle est tolérée en cas d’absence de contre-indication mais ne doit pas être recommandée.

L’héparine anticoagulante utilisée à la seringue électrique est très controversée. L’avantage théorique de son puissant effet anticoagulant est contrebalancé par la possibilité clinique de transformation hémorragique des AVC ischémiques dus aux bulles de gaz intra-artérielles. On ne peut donc pas la recommander en l’état actuel des connaissances.

De nombreuses molécules ont été utilisées dans le traitement de la maladie de décompression. Il s’agit de la prostacyline, la lidocaïne et de substances antiradicaux libres de l’oxygène. A l’heure actuelle, leur utilisation ne peut être que ponctuelle dans le cadre de protocole de recherche.

L’utilisation de l’OHB dans le traitement de la maladie de décompression permet :

  • une récupération complète est d’autant plus fréquente que le traitement par l’OHB est appliqué précocement après la survenue de l’accident. Par contre, si un délai court garanti de plus grandes chances de récupération, le délai maximum au-delà duquel l’OHB n’est plus efficace, n’est pas fixé actuellement. Si les circonstances ne permettent pas une recompression précoce, une recompression tardive peut néanmoins être tentée avec quelque espoir d’amélioration ;
  • dans certains cas d’aéro-embolisme artériel massif et brutal, la recompression précoce en air avec des pressions élevées (6 ATA) peut suffire à corriger la symptomatologie clinique. Cette technique peut être employée en cas de moyens techniques limités ;
  • si des signes cliniques évocateurs surviennent plus de 24h après la sortie de l’eau, on peut exclure à priori la maladie de décompression. La seule exception à cette règle est l’exposition à l’altitude notamment lors des déplacements en avion.
  • thérapeutique.
  • L’incursion à 6 ATA aux mélanges hyperoxiques est également envisageable dans cette situation surtout si le délai est inférieur à quelques heures.

En conclusion

Beaucoup d’incertitudes persistent sur la physiopathologie et le traitement de la maladie de décompression. Les connaissances viendront de modèles expérimentaux adaptés et du recueil épidémiologique soigneux et multicentrique. La conduite à tenir actuelle est basée sur les recommandations de la séance de consensus de Marseille de 1996.

Aymeric LAPP
IDE en Réanimation Médicale Polyvalente au CHU NANCY.
alertofeu@voila.fr


Source : infirmiers.com