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COURS IFSI

Cours - Equilibre acido-basique

Publié le 08/08/2023
balance équilibre

balance équilibre

Ce cours fait partie de l’UE 2.1 biologie fondamentale et plus précisément du cours sur l’homéostasie

Quelques rappels 

Tout sur l'équilibre acido-basique

L’équilibre acido-basique de l’organisme est défini par la concentration en ions hydrogène (H+) des cellules. Il est essentiellement régulé par deux organes : le poumon assure l’élimination du C02 et le rein régule la concentration en bicarbonates. Toutefois, le foie et les muscles jouent également un rôle secondaire de soutien, notamment en faveur du rein pour préserver des bicarbonates.

L’oxygène existe sous 2 formes dans l’organisme :

  • dissoute (Pa02) ;
  • combinée à l’hémoglobine (Hb02 ou Oxyhémoglobine).

Le C02 existe sous trois formes dans l’organisme :

  • dissous : environ 10% éliminé par les poumons ;
  • bicarbonates : Ils représentent 90% du sang artériel et 60% du sang veineux régulés par le rein. Les bicarbonates sont aussi appelés - composés carbaminés : Forme combinée aux protéines sanguines, présente notamment dans le sang veineux (environ 30%) et éliminée par les poumons.

Le pH (potentiel hydrogène) permet de définir si un milieu est acide, basique ou neutre. A savoir que le pH est différent d’un milieu à un autre, d’une solution à une autre. Ainsi le pH du sang artériel est environ de 7.4 alors que celui des urines varie de 5.2 à 6.4 et que celui de la salive est environ de 6. Le pH varie également entre le sang artériel et le sang veineux. Une valeur de pH artériel inférieure à 6.9 ou supérieure à 7.9 sont généralement considérées comme incompatibles avec la survie.

C’est l’activité métabolique des cellules, nécessaire au fonctionnement du corps humain (production d’énergie : ATP grâce au glucose oxydé et dégradé par l’oxygène) qui produit des composés acides (ions hydrogène, H+ ou protons) qui sont ensuite éliminés par deux voies : pulmonaire et rénale (et dans une moindre mesure par le foie et les muscles).

Lors d’une hypoxie, le métabolisme se fait par voie anaérobie provoquant une accumulation de produits non complètement dégradés qui sont des acides faibles : acide lactique (lactates), acide pyruvique Etc. dont l’élimination est, dans une certaine limite, assurée par les reins (mais pas de manière immédiate comme on le verra plus tard).

Equation Henderson-Hasselbach

Le pH est régulé de manière immédiate par le système tampon : un tampon est une base faible (bicarbonates, protéines, phosphates) qui accepte des ions hydrogène (acide fort) présents dans une solution pour donner un acide faible (acide carbonique), ainsi le pH de la solution est maintenu neutre tant que le tampon est présent en quantité suffisante pour capter tous les ions H+. L’acide carbonique (H2C03) est instable et tend à se séparer en H20 + C02.

L’intérêt essentiel de cette équation est de transformer un produit dangereux (H+ ou ions hydrogène) en C02 (dioxyde de carbone), gaz qui se diffuse très bien et facilement éliminé par les poumons, et en eau, facilement éliminée par les reins. La voie pulmonaire est majoritaire car plus puissante, via le cycle de Krebs et la chaîne respiratoire mitochondriale, pour éliminer rapidement des acides (oxydation des anions organiques et élimination du C02 produit pour cette oxydation).

L’examen de base pour apprécier l’équilibre acido-basique de l’organisme sont les gaz du sang artériel (GDS).

Les normes (en sang artériel) :

  • pH : 7.38 à 7.42
  • Pa02 : 90 à 100 mm Hg (ou 12 à 13.3 kPa)
  • PaC02 : 38 à 42 mm Hg (ou 5 à 5.6 kPa)
  • Bicarbonates (HC03-) : 22 à 26 mmol/L
  • C02 total : 23 à 27 mmol/L
  • Hb02 : 95 à 100% (véritable saturation en oxygène du patient)
  • Contenu en 02 : 16 à 22 ml/dL (volume d’O2 contenu dans 100 ml de sang).

Astuce : Pour s’assurer que le prélèvement soit bien artériel, outre la pulsatilité de celui-ci et la couleur du sang évidemment, il faut que l’équation suivante soit vérifiée : C02 total = bicarbonates +/- 2 mmol (ou C02 total – bicarbonates

Vocabulaire médical associé :

  • Acidose Alcalose
  • Hypoxémie Hyperoxie
  • Hypocapnie Hypercapnie

Rappel : L’hypoxémie est une diminution de la quantité d’oxygène circulant dans le sang, l’hypoxie est une diminution de la quantité d’oxygène délivrée aux tissus, une hypoxémie entraîne donc une hypoxie.

 

Acidose et alcaloses

 

On détermine deux types d’acidose et deux types d’alcalose.

Acidose respiratoire

L’acidose respiratoire est consécutive à une diminution d’élimination du C02 par les poumons, elle entraîne ainsi une augmentation de la PC02 appelée hypercapnie. Elle est généralement secondaire à une hypoventilation (intoxication médicamenteuse ou atteinte neuromusculaire type Guillain-barré par exemple) ou à une augmentation de l’espace mort alvéolaire (hypovolémie ou insuffisance cardiaque). Il existe des mécanismes compensateurs (système tampon) qui vont alors chercher à augmenter les bicarbonates pour limiter la baisse du pH : on parle alors d’acidose respiratoire compensée mais en situation aiguë, la compensation est quasi nulle (vous comprendrez pourquoi plus bas). L’hypercapnie entraîne une vasodilatation voire un œdème cérébrale en situation aiguë puis, provoque une perte progressive de la réponse ventilatoire au C02 (hypercapnie) en situation chronique. L’hypoxie provoque un état de choc par hypoxie tissulaire avec acidose métabolique en situation aiguë et provoque une hypertension pulmonaire et une élévation de l’hémoglobine de manière chronique.

Alcalose respiratoire

L’alcalose respiratoire est consécutive à augmentation d’élimination du C02 par les poumons entraînant ainsi une diminution de la PC02 appelée hypocapnie. Elle est généralement secondaire à une hyperventilation, dont les causes peuvent être multiples (peur, hystérie, sepsis, crise d’asthme, altitude, grossesse). Pour compenser, il y a une augmentation de l’excrétion des bicarbonates au niveau rénal (mais avec une hyperchlorémie).

Acidose métabolique 

L’acidose métabolique est consécutive à une diminution des bicarbonates dans le plasma. Elle est généralement secondaire à une augmentation de l’acidité de l’organisme (acidocétose diabétique ou hypoxie/hyperlactatémie sur un état de choc septique par exemple) ou à une fuite de bicarbonates (diarrhées, insuffisance rénale). Ainsi pour compenser, l’organisme fera diminuer la Pc02 par hyperventilation (d’où la nécessité de contrôler la fréquence respiratoire lors de la prise des paramètres vitaux).

Alcalose métabolique 

L’alcalose métabolique est consécutive à une augmentation des bicarbonates. Elle est généralement secondaire à une perte d’acides tels les vomissements ou diarrhées et/ou l’ingestion de bases (bicarbonates de soude). La compensation est limitée dans cette situation car une il faudrait provoquer une hypercapnie par hypoventilation.

Il est évident qu’en situation réelle, des causes multiples peuvent interagir et donc créer des situations mixtes ou complexes.

On distingue donc différentes situations :

  • simples ou pures : Réponse respiratoire ou rénale isolée par systèmes tampons, il n’y a jamais de compensation complète ;
  • mixtes : Association de deux troubles « similaires » (acidose respiratoire et métabolique par exemple) ;
  • complexes : Association de deux troubles opposés (acidose métabolique et alcalose respiratoire par exemple).

Lors de ces troubles acido-basique, les systèmes de régulation sont de plusieurs ordres :

  • immédiats par systèmes tampons (bicarbonates et protéines sanguines) ;
  • rapides : de l’ordre de quelques minutes pour les troubles métaboliques avec régulation pulmonaire de l’élimination du C02 :
  • retardés : de 12 à 24h pour les troubles respiratoires avec régulation rénale qui ajuste la réserve en base : Réabsorption rénale de bicarbonates dans le cas d’une acidose respiratoire et fuite rénale de bicarbonates dans le cas d’une alcalose respiratoire.

Les caractéristiques des systèmes de régulation/ compensation

  • Le stimulus de toute compensation est une altération du pH artériel, le but est la correction de ce pH.
  • Un trouble métabolique déclenchera une compensation respiratoire rapide et un trouble respiratoire déclenchera une compensation rénale lente.
  • Les mécanismes de compensation ne parviennent quasiment jamais à ramener le pH artériel à 7.4 et donc il n’existe pas de surcompensation.
  • Ces systèmes de compensation nécessitent un poumon/rein sain et libre de répondre au stimulus.

Relation pH, kaliémie, chlorémie

  • Au niveau cellulaire, Le pH et la kaliémie ont une relation forte : Ions H+ et K+ se disputent les mêmes places dans nos cellules, c’est pourquoi l’alcalose (diminution de H+ dans la cellule et donc K+ prend sa place) est souvent hypokaliémique et à l’inverse l’acidose hyperkaliémique.
  • Au niveau l’anse de Henlé, le rein réabsorbe le potassium en échange d’ions H+. En cas d’acidose, le rein doit retenir plus de potassium pour excréter plus d’ions H+. A l’inverse en cas d’hypokaliémie, il doit excréter des ions H+ pour récupérer des ions K+. C’est pourquoi l’acidose est souvent hyperkaliémique et l’alcalose hypokaliémique.
  • Il y a également une relation entre chlore et bicarbonate, on a donc souvent une alcalose hypochlorémique et une acidose hyperchlorémique, c’est surtout important en cas d’alcalose, le manque de chlore entraîne une réabsorption de bicarbonates à l’origine de l’alcalose.

A noter que les  β2-mimétiques (Bricanyl®, Ventoline®) à fortes doses peuvent parfois provoquer une hyperlactatémie, elle-même responsable d’une acidose (souvent métabolique).

Equilibre acido-basique

 

Traitement d’un trouble acido-basique

  • Le traitement principal est souvent celui de la cause (choc septique, acidocétose, néphropathie, hypo ou hyperventilation...)
  • Adaptation de la ventilation selon la situation : Hyperventilation (intubation ?) si acidose et contrôle ventilation/sédation si alcalose : Le poumon est le principal régulateur de l’équilibre acido-basique.
  • Administration de bicarbonates lors d’une fuite de bicarbonates et non pour corriger un pH, il faut traiter la cause et non la conséquence
  • Soutien cardio-vasculaire dans tous les cas : Débit cardiaque = vecteur du transport de l’02/C02 dans l’organisme.

Attention : Il y a souvent des troubles hydro-électrolytiques associés qu’il faudra corriger (dyskaliémie, dyschlorémie, déshydratation...)

La lecture et l’interprétation des gaz du sang peuvent également être facilitées par le diagramme de Davenport.

Diagramme Davenport

 

Ce diagramme reprend reprend en abscisse les concentrations en bicarbonates et en ordonnées le taux de pH, en haut il y a également la PC02. Par la confrontation de ces trois variables, le diagramme propose des grandes orientations diagnostiques, desquelles dépendra le traitement associé.

La surveillance de l'EtC02 (C02 expiré) ou capnographie, permet d'être renseigné sur un des aspects les plus importants du système de compensation de l'équilibre acido-basique (comme nous l'avons vu plus haut). Utilisable chez le patient en ventilation spontanée, cette mesure n'est pertinente que chez le patient intubé et doit être mise en perspective avec les autres paramètres vitaux du patient.

Bibliographie

  • Ventilation artificielle, Jérôme Liotier, 3ème édition, 2011, Maloine.
  • Diagnostic d’un déséquilibre acide base aux urgences, J.Levraut, CHU de Nice, COPACAMU, 2010.
  • Évaluation de l’équilibre acido-basique en réanimation, H.Quintard, JC.Orban, C.Ichai, CHU Nice, 51ème congrès de la SFAR, 2009.
  • Transport des gaz dans le sang, L. Baud, PCEM2, Faculté Saint Antoine, Paris.
  • L’équilibre acide-base, P.Baele, UCL St Luc, 1996.
  • Bases physiopathologiques du traitement des acidoses métaboliques : Place du bicarbonate, X.Leverve, D.Barnoud, M.Guignier, CHU Grenoble, Conférences d’actualisation SFAR, 1996.

Mickael PERCHOCInfirmier aux urgencesmickael.perchoc@infirmiers.comMerci à Charles Groizard, médecin urgentiste et à Vincent Elmer, infirmier anesthésiste, pour leur relecture attentive et leurs conseils.

Texte revu le 8 août 2023 par Bruno Guerry, Cadre de santé infirmier
 

Source : infirmiers.com