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TFE - "L’expérience et la connaissance de soi dans la prise en soin du patient psychotique"

Publié le 08/11/2019
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En juillet 2019,  Kekeli Jordan Tsikplonou , étudiant en soins infirmiers à l’Institut de formation en Soins Infirmiers du Centre Hospitalier d’Arras (promotion 2016- 2019), soutenait son travail de fin d'études sur la thématique suivante  "L’expérience et la connaissance de soi dans la prise en soin du patient psychotique". Il souhaite aujourd’hui le partager avec la communauté d’infirmiers.com et nous la remercions.

Face à une situation conflictuelle avec une patiente en service de psychiatrie, cet étudiant en soins infirmiers s’interroge sur le cadre légal auquel est soumis la profession d’infirmier au regard de son code de déontologie.

Voici comment cet étudiant présente ce travail de fin d’études. "L’expérience et la connaissance de soi dans la prise en soin du patient psychotique Ce travail d’initiation à la recherche porte sur le rôle de la connaissance de soi et de l’expérience professionnelle dans la prise en charge d’un patient psychotique. Mon sujet fait suite à une situation vécue lors d’un stage en milieu psychiatrique. Cette situation se répétant et suscitant de plus en plus mon questionnement, j’ai décidé de réaliser mon mémoire de fin d’étude sur le sujet. En effet, d’après mes recherches, la violence est récurrente en milieu psychiatrique et je pense que c’est un devoir pour tous les soignants quels que soient leurs niveaux d’expérience de savoir la gérer, pour améliorer leurs pratiques et pour le bien-être du patient. Une enquête réalisée auprès de quatre infirmiers à l’aide d’entretien semi-directifs m’a permis d’étayer mes connaissances sur le sujet malgré le faible échantillon interrogé. Les conclusions étaient que les situations de violence sont présentes en  psychiatrie et que le professionnel de santé a donc besoin d’expérience et de connaissance de soi pour les gérer.

N’éprouvant pas de difficultés à communiquer de nature et malgré mon appréhension, je n’ai pas rencontré d’obstacles pour communiquer avec les patients. Cependant, très vite j’ai remarqué certaines difficultés dans la gestion des patients lorsqu’ils étaient en crise ou que certaines situations les frustraient.

Durant mes trois années de formation, j’ai découvert le milieu de la psychiatrie grâce aux enseignements théoriques. J’avais à la fois beaucoup d’appréhension et de curiosité à l’égard de ce milieu de part ma culture et mes origines togolaises (pays dans lequel je suis né et j’ai effectué toute ma scolarité). En effet la psychiatrie, et principalement la santé mentale, reste chez nous un sujet tabou associé au mystique et à la sorcellerie. Ainsi, au collège, lors d’une visite de l’unique hôpital psychiatrique dont disposait le pays, j’ai pu constater que les patients étaient enfermés en permanence et parfois placés sous contention indéfiniment les privant de toute liberté. Ils n’étaient pas écoutés, obligés de prendre leurs traitements et leurs repas à heures fixes sous peine de subir des sévices corporels. Cela peut s’expliquer par le fait que le personnel n’avait reçu aucune formation médicale mais aussi par la peur systémique liée aux pathologies mentales. Le rôle du personnel consistait en la distribution des traitements visant à calmer les patients et en un accompagnement spirituel. Tout ceci a ancré en moi une appréhension pour ce milieu.

Ainsi, au collège, au Togo, lors d’une visite de l’unique hôpital psychiatrique dont disposait le pays, j’ai pu constater que les patients étaient enfermés en permanence et parfois placés sous contention indéfiniment les privant de toute liberté.

C’est donc au semestre 5 de formation que j’ai effectué mon premier stage en psychiatrie. Dès les premiers jours de stage, j’ai pu remarquer que l’approche du patient était différente par rapport aux autres services de soins conventionnels que j’ai pu découvrir lors de mes précédents stages. Les soins relationnels représentaient une très grande partie du soin. Le personnel était à l’écoute et répondait aux besoins du patient qu’ils soient médicaux ou sociaux. Le patient était au centre du soin et avait un projet de vie autour duquel s’articulait son devenir.

La situation qui m’a interpellé se déroule lors de ma troisième semaine de stage. Madame D, âgée de 35 ans est entrée dans le service en novembre 2014 pour maintien à domicile difficile dans un contexte de paranoïa, psychose, troubles du comportement, intolérance à la frustration et schizophrénie paranoïde avec fixation sur les images parentales. Elle a également un antécédent de retard mental.

A 16h30, Madame D me demande de l’accompagner dans sa chambre pour qu’elle se change. Je lui réponds que ce ne sera pas possible car en tant qu’étudiant et sous la responsabilité des professionnels de terrain, je n’ai pas le droit d’être seul avec un patient. J’ajoute qu’elle pourra se changer dans une demi-heure et lui propose donc de patienter. Je remarque alors que mes propos ont généré de la frustration chez Madame D qui commence à proférer des insultes à mon égard. Je lui demande de se calmer et lui explique qu’elle me doit autant de respect qu’à tous les autres membres du personnel et que je lui en dois réciproquement. Madame D reste vindicative. Je lui demande d’arrêter les insultes à mon égard d’un ton agacé. Elle se rapproche de moi et lève la main, mimant de me frapper. Je lui dis de ne pas faire ça en haussant le ton. Madame D s’en va vers la salle de repos en continuant ses insultes et en pleurant. Le fait qu’elle n’arrête pas de m’insulter génère en moi de la frustration. Je sens que je n’arrive pas à contrôler la situation, je perds mes moyens. Je me sens inefficace, je suis en colère. Je la suis, j’essaie de lui parler. Très rapidement le ton hausse de nouveau. Un soignant intervient donc et me demande de me calmer et de la laisser s’en aller. Je me pose alors beaucoup de questions sur le moment, pensant surtout à ma capacité à être un bon soignant.

J’ai été interpellé par mon comportement. Je me suis interrogé sur le cadre légal auquel est soumis la profession d’infirmier et notamment au regard de code de déontologie.

Je me suis calmé quelques minutes après et en repensant la situation j’ai été interpellé par mon comportement. Je me suis interrogé sur le cadre légal auquel est soumis la profession d’infirmier et notamment  au regard de son code de déontologie qui dit L’infirmier doit écouter, examiner, conseiller, éduquer ou soigner avec la même conscience toutes les personnes quels que soient, notamment, leur origine, leurs moeurs, leur situation sociale ou de famille, leur croyance ou leur religion, leur handicap, leur état de santé, leur âge, leur sexe, leur réputation, les sentiments qu’il peut éprouver à leur égard ou leur situation vis-à-vis du système de protection sociale. Il leur apporte son concours en toutes circonstances. Il ne doit jamais se départir d’une attitude correcte et attentive envers la personne prise en charge. Sa lecture a mis en évidence mon attitude inadaptée envers la personne que je prenais en charge. J’ai décidé d’analyser et de questionner l’importance de l’expérience et d’une bonne connaissance de soi pour pouvoir évoluer de façon sécure pour soi et pour le patient en tant que soignant en psychiatrie."

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Bernadette FABREGASRédactrice en chef Infirmiers.combernadette.fabregas@infirmiers.com @FabregasBern


Source : infirmiers.com