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TFE - L'autonomie des patients réduite, synonyme d'une liberté déchue ?

Publié le 02/06/2017
Parachute

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En 2015, Benjamin Becker, alors étudiant en soins infirmiers à l'Institut de Formation en Soins Infirmiers de Rueil-Malmaison (promotion 2012-2015) a soutenu avec succès son travail de fin d'études sur la thématique suivante : L'autonomie des patients réduite, synonyme d'une liberté déchue ?. Il souhaite aujourd’hui le partager avec la communauté d’Infirmiers.com et nous l'en remercions.

Dans son TFE, Benjamin s'est intéressé à la liberté des patients et à l'autonomie.

Benjamin débute ainsi son travail de recherche : « Chacune des relations humaines qui nous lient aux autres peut devenir un souvenir unique, fragile et précieux, à la condition toutefois d’y insuffler une volonté ferme et arrêtée de considérer cet autre comme un réel compagnon de route, un alter égo, un autre Soi-même. Et ceci évoluant dans une relation qui se devra d’être maintenue à l’équilibre le plus idéal possible. Le cas échéant pourrait biaiser le prendre soin qui donne à chaque relation soignante la valeur inestimable des trésors les plus convoités. Mais, ces interactions humaines devront malgré tout répondre à des codes explicites ou non, qu’il faudra alors s’évertuer de comprendre et de déchiffrer, témoignant de facto cette volonté précédemment exprimée. Et cette complexité même du rapport humain, le rôle que chacun peut y jouer et la place qu’il doit y tenir constituera le questionnement fondamental de ce travail, sa trame directrice mais également sa source d’énergie. Et précisément, sur cette obligation d’équité qui sous-entend l’importance d’y prioriser la Liberté et l’Egalité des chances de chacun d’entre nous face à l’accès au soin, patients comme soignants (chacun des soignants que nous sommes étant susceptible de devenir patient à son tour…), comme deux obligeances constitutionnelles garantes de la qualité de nos prises en soin infirmières et soignantes.

Et de renchérir que cette Liberté dont nous tous voudrions pouvoir nous targuer de jouir en tant qu’Êtres Humains nous semble devoir se situer à la base même des droits de l’Homme, et son respect dans notre système de soins une conduite déontologique qu’on ne saurait abroger. Dès lors, nous pourrions nous demander ce que nous mettons derrière cette notion de Liberté, lorsque nous sommes infirmiers ? Serait-ce de laisser vacante la possibilité pour le patient de prendre ses propres décisions, d’assumer ses propres choix ? Nul doute, assurément. Le dictionnaire Larousse propose au mot Liberté une pléthore de définitions, toutes tributaires d’un sens qui lui est propre : Caractère de ce qui relève de l’initiative privée, Etat de quelqu’un qui n’est pas retenu prisonnier, Etat de quelqu’un qui n’est pas soumis à un maître … pourtant avec pour chacune d’entre elles, le sentiment d’une capacité à pouvoir prendre des décisions pour soi-même, à se gérer et à juger ce qui paraît être bon pour soi. Ainsi, exister à part entière finalement, s’affirmer en tant que personne vivante et unique, pouvant revendiquer des droits et des devoirs communs à tous et pourtant propres à chacun, et que l’état de santé ou de maladie/handicap ne saurait réduire à néant.

Pour autant, l’adage populaire de préciser que La liberté des uns s’arrête où celle des autres commence. On peut alors penser que la possibilité pour les patients de jouir d’une toute liberté empiéterait sur celle des soignants qui ont fait envers eux voeu de protection, d’aide et de soins ?! L’Histoire de France, mais pas seulement, nous prouve de surcroît l’importance que ce principe tient dans le coeur des Hommes, rappelant qu’il est la base de tout fondement sociétal, de tout rapport humain et de toutes les constitutions gouvernementales que l’histoire mondiale a vues se construire. Elle est la fondation la plus ancrée de notre Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, son préambule et son cri d’espoir : Les Hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit. En cela, il semblerait être le principe éthique soignant le plus inaliénable, et le plus respectable. Nelson Mandela clamera un jour Je ne suis pas vraiment libre si je prive quelqu’un de sa liberté. L’opprimé et l’oppresseur en sont alors tous deux dépossédés de leur humanité.

Et de renchérir, Jacques Ruffié écrivait qu’ il n’y a d’éthique que lorsqu’il y a liberté.Une Liberté donc assurée et affirmée par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen et constitutive de la base même de nos rapports humains qui, dès lors, devrait permettre de maintenir symétrique toute relation soignant/soigné : laisser l’autre décider pour lui-même, établir ses propres jugements, exprimer ses conditions et sa volonté. L’élever au rang de vertu permettrait peut-être à chaque soignant de mettre à mal n’importe quel déséquilibre ou asymétrie naissant(e) dans cette relation de soin, qui se traduirait par le pouvoir de l’un sur l’autre.

On l’a vu, la Liberté première dont peut bénéficier les patients serait peut-être et avant tout, la possibilité de pouvoir penser librement ce qui semble bon pour lui, et d’en tirer les résultats et les actions itératives consciemment et délibérément. Mais bien au-delà des valeurs présentement introduites, notons qu’un certain nombre de principes et de mouvements encadrent au quotidien les relations soignant/soigné. Ces relations que la demande de soin produite par le patient et l’offre de prise en soin, de soutien et d’accompagnement qui émane des soignants (et notamment des infirmiers puisqu’il s’agit de cela) mettent en place, sans que l’on s’en rende réellement compte, comme un processus humain naturel, logique et inévitable. Finalement, les relations humaines constitutives d’un métier que l’on a certes choisi d’exercer, mais qui nous conduit parfois dans des situations imposées qui nous demandent réflexion, questionnement, maturité, ouverture d’esprit, patience et remise en question...

Pour conclure cette introduction, arrêtons-nous quelques instants sur l’une des pensées d’Eric-Emanuel Schmitt, extraite de son recueil de nouvelles Concerto à la mémoire d’un ange et qui traduira, espérons-le l’image de cette profession infirmière de laquelle nous tâcherons de ne jamais nous éloigner : Tout homme est responsable de tout homme, de son frère et des autres. Tuer, c’est l’oublier. Être violent, c’est l’oublier. Cette violence dont on parle étant parfois la forme que prennent nos prises en soin infirmières qui peuvent bafouer certains droits auxquels les patients devraient pourtant pouvoir prétendre, sans que ce choix ne soit opéré par nous, en tous les cas, d’une manière consciente et volontaire… »

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Rédaction Infirmiers.com


Source : infirmiers.com