Nathan, 22 ans et Lucie, 21 ans, tous deux étudiants en 3e année dans des IFSI de province, expriment leurs difficultés à accéder aux services universitaires et, plus globalement, leurs difficultés financières. Dans ce contexte, qu’en est-il de leur santé physique et mentale ? « Je dois bien admettre que ma santé est un peu mise de côté pour le moment. Je n’ai pas le temps de la prendre en compte. Je m’en occuperai après les études », confie Nathan. Il poursuit en expliquant que son dernier rendez-vous chez le dentiste remonte à plus de 4 ans et que le prochain, il le prendra certainement lorsqu’il sera diplômé…
Je suis déjà allée en cours avec le Covid alors que j'avais 40 de fièvre. Tout se joue au mental sauf que le mental, au bout d'un moment, il peut lâcher.
Côté médecine générale, il sait qu’il peut s’adresser à Medsoin, un réseau de centres de santé privés dédiés aux soins non programmés, qui dispose de plusieurs antennes dans sa ville. N’étant plus en capacité de prendre une mutuelle, il n’a à débourser que 7 euros après présentation de sa carte vitale.
Loin des services de santé étudiante
Pour Lucie, les choses ne sont pas simples du tout : « Je suis déjà allée en cours avec le Covid alors que j'avais 40 de fièvre. Tout se joue au mental sauf que le mental, au bout d'un moment, il peut lâcher. » Son médecin traitant ne travaille que 2 jours et demi par semaine et il est très rare que cela coïncide avec ses moments de pause. Le campus universitaire étant situé très loin de son IFSI et de son domicile, elle peut difficilement se rendre au service de santé étudiante de son université de rattachement. « Le fait que nous, étudiants en soins infirmiers (ESI), soyons si excentrés des campus universitaires, engendre une grande différence de droits par rapport aux autres étudiants », déplore-t-elle.
Établir des conventions
Elodie Lenfant, secrétaire générale en charge de la communication à la FNESI abonde dans ce sens : « La vie est assez compliquée pour les étudiants dont l’IFSI et le logement personnel sont situés loin des universités. Ils n’ont, de ce fait, pas accès à un psychologue, une infirmière ou un médecin. » Selon elle, plus de la moitié des étudiants en IFSI seraient concernés. « Nous souhaiterions pouvoir établir des conventions, par exemple avec un psychologue ou un médecin proche de l’IFSI, pour permettre un accès facile aux étudiants en soins infirmiers. D’une certaine manière comme s’ils se rendaient au service de santé étudiante de leur campus de rattachement», poursuit-elle. Il s’agit d’un sujet très débattu dans le cadre de la réforme de la formation socle : « Nous avions fait le tour des établissements de formation afin de recueillir les souhaits forts des étudiants, puis sur cette base, défini 50 propositions. L'accès aux services étudiants et donc l’accès à la santé faisaient partie des sujets récurrents. Il tenait tout particulièrement à cœur aux ESI que tous les établissements puissent proposer à tout le monde des services de santé adaptés. »
La santé mentale, un enjeu majeur
Concernant la santé mentale, enjeu majeur de cette génération d’étudiants post-Covid, ils peuvent faire appel au Santé Psy Étudiant. Ce dispositif a été mis en place par le gouvernement dans l’objectif d’accompagner les étudiants dans leur bien-être mental. Concrètement, les étudiants bénéficient de 12 séances gratuites avec un psychologue conventionné. « Nous aimerions que le nombre de séances puissent être plus élevé et adapté à tous les types de problèmes et à toutes les situations. Globalement que le dispositif soit renforcé », souligne Elodie Lenfant.
Si les étudiants rencontrent des difficultés, ils peuvent également faire appel à leur référent pédagogique. En principe, ils le rencontrent avant et après le stage mais ils peuvent le solliciter à tout moment au cours de l’année. S’ils se sentent plus en confiance avec un autre formateur, une personne de la direction, des élus de promotions ou des associations, ils peuvent se tourner vers eux.
Comme en témoigne Lucie, c’est souvent la santé mentale et le moral qui en prennent un coup durant les études à l’IFSI : « Durant ma 1re année, une amie, lors de son stage, a entendu la cadre de santé de l’établissement, dire au personnel soignant, qu’il n’était pas nécessaire d’employer quelqu’un en intérim puisqu’il y avait "l’étudiante". Son stage s’est très mal passé. Elle n’a fait que des toilettes alors qu’elle n’avait aucune base du métier. Ils l’ont vraiment exploitée. Il y a un réel manque de reconnaissance, que ce soit au niveau de la paie ou même des relations humaines. Et, à côté de cela, la formation est très dense. Personnellement, je fais énormément d’efforts et moralement c’est vraiment très dur. »
Pour évaluer de plus près et plus globalement quels types de problèmes de santé ou d'accès à la santé rencontrent les étudiants en soins infirmiers, la FNESI a lancé une grande enquête "Bien-être" en fin d'année 2023 auprès des IFSI. Les résultats devraient permettre, outre un état des lieux, d'envisager des actions ciblées pour agir en prévention comme dans le suivi de la santé de ces étudiants.
La FNESI travaille de concert avec les associations étudiantes dans l’objectif de déployer des projets au niveau local. Elodie Lenfant cite notamment la semaine du bien-être des étudiants qui aura lieu du 24 au 30 mars 2025 : « Chaque jour de cette semaine est dédié à une thématique particulière. Cela peut être la santé mentale, la santé sportive, la santé alimentaire, etc. » Ce sont des projets menés directement par les étudiants. Ils organisent des temps d’échanges avec des psychologues qu’ils invitent pour l’occasion. Ils proposent aussi des projets autour du sport. Ils font des séances de sophrologie, etc.
Pour 2025, la FNESI va lancer, sur le même principe, les journées nationales de la santé et du bien-être qui se dérouleront du 27 au 30 mars. Les associations étudiantes sont invitées à les organiser approximativement aux mêmes dates, sous réserve des dates d’entrée en stage des étudiants, qui peuvent différer d’un IFSI à l’autre. La FNESI propose un kit pour mettre en place le projet et accompagner les associations.
Pour en savoir plus :
- Santé Psy Etudiant
- L'enquête « Bien-être » en cours de la FNESI
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