Avec la guerre, le spectre de la tuberculose ressurgit en Ukraine

Avec l'invasion de l'Ukraine par la Russie, tous les efforts du pays pour combattre la tuberculose risquent d'être anéantis par la guerre, craignent des spécialistes, alors que deux ans de Covid ont fait reculer de dix ans les progrès mondiaux dans la lutte contre la maladie.

L'Ukraine enregistre environ 30 000 nouveaux cas par an. Et elle affiche l'un des taux les plus élevés au monde de tuberculose pharmacorésistante -qui concernait 29% des nouveaux malades ukrainiens en 2018, d'après l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Pour Michel Kazatchkine, ex-envoyé spécial de l'ONU, le problème est désormais de faire parvenir ces médicaments aux patients. Un centre de lutte antituberculeuse a ainsi été bombardé à Nizhyn, une ville au nord-est de la capitale Kiev, a-t-il relevé. Il va y avoir une crise sanitaire majeure. L'Ukraine va se retrouver avec un système de santé effondré ... des maladies comme la tuberculose et la tuberculose pharmacorésistante vont vraiment grimper en flèche ensuite, a-t-il assuré. Autre défi : poursuivre le traitement des malades fuyant les violences. Nous avons perdu la trace de beaucoup de patients parce qu'ils ont fui, comme bien d'autres dans le pays, a expliqué Kate White, responsable des urgences pour Médecins sans Frontières.

Des besoins accrus 

Les problèmes actuels ne sont que la partie émergée des besoins. L'OMS a appelé mercredi à relever massivement l'aide humanitaire en Ukraine dans les prochaines semaines, alors qu'une crise humanitaire majeure est en cours. Je n'ai jamais, moi-même, vu des besoins aussi complexes et aussi rapidement dans une crise qui s'est développée si vite, a ainsi souligné le directeur des urgences de l'OMS, Michael Ryan.

Plus de 3,5 millions de réfugiés ont été contraints de fuir l'Ukraine, tandis que 6,5 millions de personnes supplémentaires ont été déplacées à l'intérieur du pays et 12 millions d'autres personnes sont touchées par le conflit, ce qui signifie qu'environ la moitié de la population est touchée par la guerre. C'est une statistique honteuse quatre semaines après le début de l'invasion*, a déclaré Michael Ryan. L'OMS n'a reçu que 9,6 millions de dollars sur les 57,5 millions nécessaires pour les trois prochains mois en Ukraine.

64 attaques contre le système de santé 

L'OMS a également appelé à l'arrêt des attaques contre le système de santé , affirmant en avoir authentifié 64 jusqu'à présent. Les infrastructures médicales et le personnel de santé ne sont pas - et ne devraient jamais - être une cible, a martelé le directeur général de l'OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, citant le terrible exemple de la ville de Marioupol, assiégée depuis des semaines par l'armée russe : environ 100 000 personnes sont toujours bloquées sous les bombes dans la ville, le simple fait d'essayer d'emmener quelqu'un à l'hôpital étant devenu une expérience qui pouvait conduire à la mort, a affirmé Michael Ryan. C'est une horreur de devoir rester assis à regarder des êtres chers mourir parce que vous ne pouvez pas les emmener à l'hôpital, s'est-il insurgé, dénonçant en soi une attaque contre le système de santé : en terrifiant les gens au point qu'ils ne peuvent plus se déplacer pour aller chercher de l'eau, de la nourriture, des soins.

M. Tedros a par ailleurs fait part de ses inquiétudes quant à l'intégrité et la sécurité des installations nucléaires et chimiques en Ukraine, et a exhorté toutes les parties à minimiser le risque d'un tel accident. Nous serons prêts à apporter une assistance médicale en cas d'utilisation de telles armes, a-t-il indiqué. 

* Le 24 février soit il y a un mois. 

La Redaction Infirmiers.com avec AFP