Petite question par curiosité :
êtes-vous infirmier ?

Merci d'avoir répondu !

AU COEUR DU METIER

Cancérologie – Quid de « l'infirmière de coordination »

Publié le 02/10/2012

L'infirmière de coordination n'est pas jugée généralisable à l'issue de l'expérimentation pilotée par l'Institut national du cancer et la direction générale de l'offre de soins (DGOS), a indiqué une représentante de l'Institut national du cancer (Inca) le jeudi 27 septembre 2012 à Paris lors du congrès de l'Association francophone pour les soins oncologiques de support (Afsos).

Le parcours personnalisé des patients pendant et après le cancer a fait l'objet d'une expérimentation dans 35 établissements de santé à la suite d'un appel à projets lancé en 2010, avec un financement de 3,3 millions d'euros, a rappelé Graziella Pourcel, chef de projet "coordination des soins" à l'Inca. L'objectif était de tester un nouveau modèle de prise en charge globale, coordonnée et intégrée reposant sur une infirmière de coordination ou infirmière pivot comme cela a été développé au Canada.

L'expérimentation s'est déroulée dans toutes les régions sauf le Centre et les DOM-TOM, surtout dans les CHU et les centres de lutte contre le cancer (CLCC), avec des régions plus représentées comme l'Ile-de-France, Rhône-Alpes et le Nord-Pas-de-Calais. Le point de départ était hospitalier avec une infirmière de coordination, mais visait aussi à développer les liens ville-hôpital, les expérimentations impliquant des partenaires de ville, a indiqué Graziella Pourcel.

L'évaluation faite à un an sur 9.200 patients inclus montre que ce "dispositif de prise en charge intégrée apparaît pertinent". Il a suscité un niveau de satisfaction élevé auprès des patients, selon une enquête menée auprès de 1.748 d'entre eux. Il est perçu de manière positive par les professionnels qui ont apprécié la vision plus globale de la prise en charge donnée par ce dispositif, la sensibilisation aux problématiques sociales, l'amélioration de la qualité de la relation avec le patient et une relation d'équipe facilitée.

L'infirmière de coordination a quatre fonctions clefs: l'évaluation des besoins des patients et des proches; l'information; l'écoute et le soutien; la facilitation du parcours et la coordination hôpital-ville. La facilitation et l'évaluation des besoins sont les tâches qui lui prennent le plus de temps (respectivement 37% et 34%) puis vient le soutien (15%) et l'information (14%). L'entretien initial dure en moyenne 45 minutes et le temps de contact avec le médecin traitant 10 minutes.

En moyenne, une infirmière a pu suivre 200 à 250 patients par an, certaines moins de 100 et parfois plus de 600. Les cancers concernés étaient surtout le cancer du sein, les cancers digestifs et les cancers du poumon et ORL.

Un programme personnalisé de soins a été remis à 64% des patients. L'outil de détection des fragilités sociales a permis de repérer des besoins chez 32% dont deux tiers nécessitaient une action d'accompagnement social.

Pour 3.000 patients en fin de traitement pendant l'évaluation, 31% ont eu une remise d'un programme personnalisé de l'après-cancer (PPAC) et une prise en charge psycho-oncologique et une aide au maintien à l'emploi ont été initiées pour moins de 10%.

Cependant, des questionnements sont apparus sur le lien avec le dispositif d'annonce pour que le parcours commence à l'annonce. L'articulation avec la ville reste à préciser. Il faut améliorer l'implication des médecins traitants et le positionnement de la ville dans la phase de surveillance, a rapporté Graziella Pourcel. De plus, il est apparu que le dispositif pouvait avoir une grande plus-value dans des situations complexes comme les cancers ORL ou du poumon.

"Au vu de ces enseignements, le dispositif n'est pas généralisable d'emblée à l'ensemble du territoire", a indiqué la représentante de l'Inca. "Il est nécessaire de poursuivre l'expérimentation pour mieux définir les objectifs et des cibles prioritaires, mieux définir le rôle et les missions prioritaires de l'infirmière de coordination et préciser les modalités d'intégration avec le dispositif d'annonce", a détaillé Graziella Pourcel.

Karine Rinck, infirmière de coordination au Centre Léon Bérard à Lyon pour les cancers du sein, qui a participé à cette expérimentation, a témoigné de l'intérêt de sa fonction mais a aussi noté la difficulté de positionnement par rapport au dispositif d'annonce.

Vers un dispositif ciblé sur les parcours complexes

L'Inca a proposé à la DGOS "une deuxième phase d'expérimentation en 2013 avec une démarche qui impliquerait les Agences régionales de santé (ARS) en tenant compte des résultats de la première phase et de ce qui se fait à l'étranger". Il a été demandé à l'Inca de réfléchir à un modèle de coordination plus ouvert sur la ville autour de l'idée d'une plate-forme (plutôt qu'une seule infirmière qui n'est pas là en permanence notamment le soir ou pendant ses congés). En outre, il faudra montrer une plus-value par rapport au coût engagé et donc avoir une approche coût-efficacité.

Étant donné le contexte de ressources plus contraintes, le dispositif pourrait être plus ciblé sur des prises en charge complexes. "Toutes les situations ne nécessitent pas un niveau aussi élevé d'accompagnement. On pourrait proposer un accompagnement gradué en réservant les ressources à des patients qui en ont le plus besoin comme ceux qui ont des parcours complexes car ce n'est pas possible de le déployer partout dans tous les services de cancérologie en France", a-t-elle déclaré.

L'ensemble des résultats de l'expérimentation seront présentés lors d'un séminaire réunissant les professionnels y ayant participé le mardi 9 octobre. L'Inca publiera à cette occasion trois rapports sur son site internet.

Des financements à trouver

Invité à intervenir sur les aspects financiers, Jacques Hostein, directeur adjoint du Centre Hospitalier de Belfort-Montbéliard et administrateur de l'Institut fédératif régional de cancérologie (IFRC) de Franche-Comté, a reconnu que la tarification à l'activité (T2A) ne finançait pas ces actions transversales qui doivent donc être intégrées aux MIG (missions d'intérêt général).

Il faut trouver des ressources complémentaires auprès de l'Inca, de l'ARS, des associations (dont la Ligue nationale contre le cancer, très active dans ce domaine) et éventuellement des dons pour expérimenter des actions de coordination, comme cela se fait dans sa région pour des consultations de psychologues ou un "call center" (numéro de téléphone unique pour faciliter la communication et bien répondre aux patients).

Se posera ensuite la question de la pérennité de leur financement. Il a fait remarquer que l'absence de coordination avait probablement un coût qu'il serait intéressant de mesurer en termes de qualité de la prise en charge et en termes financiers.

Pour lui, la coordination est imposée par l'évolution des modes de prise en charge (les patients sont de plus en plus à leur domicile et moins à l'hôpital, ce qui nécessite des interventions et donc une coordination) et elle est source de progrès. "Il faudra trouver des financements pour une coordination maîtrisée avec des objectifs clairs et validés, une évaluation régulière et un contrôle démocratique", a-t-il conclu.


Source : infirmiers.com